OTTAWA — Le premier ministre Justin Trudeau a dit qu’il ne commentera pas l’avenir de TikTok aux États-Unis, mais que son propre gouvernement continuera de veiller à la sécurité des Canadiens.
Le Sénat américain a adopté un projet de loi qui oblige la société mère de TikTok, ByteDance, établie à Pékin, à vendre l’application d’ici un an, sous peine d’une interdiction du réseau social aux États-Unis.
La proposition de l’interdiction a été intégrée à un programme d’aide de 95 milliards $ destiné à l’Ukraine, à Israël et à Taïwan qui a été promulgué par le président des États-Unis, Joe Biden, mercredi.
TikTok a promis de contester la «loi inconstitutionnelle» devant les tribunaux.
M. Trudeau a dit qu’il ne commenterait pas les décisions des autres gouvernements, mais que le sien continuera de protéger la sécurité des Canadiens.
«Nous savons que la sécurité, la vie privée et la protection des données des Canadiens doivent être une priorité absolue, a-t-il déclaré mercredi. Nous avons déjà pris des mesures importantes à cet égard et nous continuerons de le faire. Mais nous agirons d’une manière qui convient aux Canadiens.»
Le gouvernement libéral fédéral avait ordonné un examen de la sécurité nationale au sujet de TikTok en septembre dernier. Quelques mois plus tôt, il avait interdit l’application sur les appareils des fonctionnaires.
Cependant, elle est toujours utilisée par les partis fédéraux libéraux et néo-démocrates, qui s’en servent pour rejoindre les jeunes Canadiens qui affluent de plus en plus vers la plateforme pour découvrir l’actualité et la culture populaire.
Au cours de la dernière année, le gouvernement fédéral a invité des influenceurs connus sur TikTok à des événements et à des séances d’information privées, notamment au plus récent budget fédéral.
«Les Canadiens consomment de plus en plus de contenu numérique. À mesure que le paysage médiatique se développe, la façon dont nous communiquons s’élargit également», avait expliqué Mohammad Hussain, porte-parole de Justin Trudeau, la semaine dernière.
Le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD), Jagmeet Singh, avait de nombreux abonnés sur TikTok avant l’interdiction au sein de la fonction publique.
Des responsables lui avaient fait part d’inquiétudes concernant l’application, qui traçait ses mouvements, démontrant que les membres du Parlement pouvaient être facilement identifiés.
Mais le NPD s’est depuis reconnecté à l’application, a annoncé M. Singh. Son équipe réfléchit aussi à des moyens pour ramener le chef lui-même sur TikTok «de manière sécuritaire».
«Notre préoccupation concernant TikTok est de nous assurer que les utilisateurs au Canada sont en sécurité, que leurs données et leur vie privée sont protégées», a-t-il assuré mercredi à Edmonton.
Les conservateurs se sont également conformés à la directive et sont allés «plus loin en suspendant complètement leur utilisation de l’application», a déclaré Sebastian Skamski, porte-parole du chef conservateur Pierre Poilievre.
«Les conservateurs prennent au sérieux toutes les menaces à la vie privée et à la sécurité émanant de régimes autoritaires étrangers et défendront toujours le droit à la vie privée des Canadiens», a-t-il affirmé.
«Justin Trudeau devrait être franc et s’assurer que les Canadiens sont conscients des risques associés à l’utilisation de l’application.»
Un responsable de TikTok avait précédemment dit à un comité de la Chambre des communes que l’entreprise prenait des mesures pour protéger les données des Canadiens en les stockant sur des serveurs aux États-Unis, en Malaisie et à Singapour.
Les gouvernements occidentaux ont exprimé leurs inquiétudes concernant le possible envoi de données sensibles par TikTok au gouvernement chinois et l’utilisation de l’application comme un outil de désinformation.
Selon la loi chinoise, le gouvernement de Pékin peut ordonner à des entreprises de l’aider à recueillir des renseignements.
Un rapport de renseignement du Bureau du Conseil privé du Canada datant de 2022 a démontré que TikTok est la première application chinoise à avoir atteint plus d’un milliard d’utilisateurs à l’extérieur de la Chine, «créant une plateforme de collecte et d’influence intégrée et omniprésente à l’échelle mondiale que Pékin peut exploiter».
