Démêlés de Le Bouyonnec: Legault assure qu’il n’était pas au courant

Patrice Bergeron, La Presse Canadienne
Démêlés de Le Bouyonnec: Legault assure qu’il n’était pas au courant

QUÉBEC — Le premier ministre François Legault assure qu’il n’était pas au courant des démêlés du sous-ministre Stéphane Le Bouyonnec, un ancien élu de la Coalition avenir Québec (CAQ).

Il réagissait à l’enquête de «La Presse», qui révélait jeudi que M. Le Bouyonnec aurait toujours des liens avec une entreprise de prêts usuraires, des liens qui l’avaient pourtant forcé à démissionner à titre de président et candidat de la CAQ durant les élections de 2018. 

L’opposition a demandé jeudi la suspension du sous-ministre en attendant que la lumière soit faite. 

M. Le Bouyonnec devra même justifier en cour des montants qui auraient été virés pour rembourser une dette des partenaires de l’entreprise au crime organisé, a rapporté un ancien dirigeant de cette entreprise, Finabanx. La Presse Canadienne n’était pas en mesure de vérifier ces allégations jeudi. 

«Est-ce que le gouvernement est capable de vous dire qu’il n’était pas au courant des enjeux judiciaires? a demandé le député péquiste Pascal Bérubé. Si le gouvernement était au courant, puis le gardait, on entre dans une autre dimension. Dans tous les cas, c’est très grave.»

M. Legault était-il au courant? «Non», a-t-il répondu à la volée en se rendant vers son bureau jeudi matin.

Il a dit qu’il a demandé à la secrétaire générale du Conseil exécutif, Dominique Savoie, de faire «toutes les vérifications» en insistant ensuite: «Non, je n’étais pas au courant.»

Mme Savoie est en quelque sorte la grande patronne de toute la fonction publique. 

«Que savait François Legault?» a demandé jeudi matin le chef de l’opposition officielle, Marc Tanguay.  

Dans une lettre transmise à Mme Savoie, le porte-parole libéral en matière d’éthique, Monsef Derraji, réclame une enquête «sans délai afin de déterminer s’il a contrevenu aux règles éthiques en vigueur pour les titulaires des emplois supérieurs».

Le chef libéral demande la suspension du sous-ministre qui officie au ministère de la Cybersécurité et du Numérique. 

«Je ne vois pas trop comment il peut rester en poste», a pour sa part renchéri peu après le député Vincent Marissal, de Québec solidaire (QS).

«C’est à son ami, M. Legault, qui l’a nommé là, de prendre les décisions.» 

«Les amis de la CAQ», a aussi martelé Pascal Bérubé.

C’est une «nomination partisane» parce qu’il s’agit d’un ancien député caquiste et président du parti, a-t-il insisté, en rappelant comment M. Legault, quand il était dans l’opposition, dénonçait pourtant les nominations partisanes. 

«Est-ce qu’il a une quelconque compétence qui est indispensable au gouvernement du Québec? Non. C’est un cas classique de nomination partisane.»

Le gouvernement a fait passer son salaire de 197 303 $ à 228 642 $ en début d’année, s’est plu à préciser le député péquiste.

Récemment, le premier ministre a résilié le contrat d’une sous-ministre à l’Éducation en raison d’une controverse, donc «il lui reste une décision à prendre» concernant M. Le Bouyonnec, a jugé M. Bérubé, sans préciser s’il parlait de le démettre ou le suspendre.  

«S’il ne le fait pas, il va devoir prouver que, parce qu’il est l’ancien président de la CAQ, et ancien député de la CAQ, et son ami, il est plus compétent que quiconque pour occuper un poste de sous-ministre.»

En 2018, les médias de Québecor avaient révélé que M. Le Bouyonnec était à la fois actionnaire et président du conseil d’administration de Finabanx. Rappelons que le prêt usuraire est interdit au Québec, donc les activités de l’entreprise sont dans le reste du pays. 

Il avait alors quitté ses fonctions à la tête de Finabanx, mais avait par la suite aussi renoncé à la présidence de la CAQ et même à sa candidature dans La Prairie. 

Il avait été élu pour la première fois dans cette circonscription en 2012 pour la CAQ. Le parti fondé l’année précédente présentait pour la première fois des candidats.

M. Le Bouyonnec avait été battu aux élections de 2014, mais voulait regagner son siège au scrutin de 2018 jusqu’à ce que la controverse sur ses intérêts dans une société de prêts usuraires l’éclabousse.

Il a été secrétaire général associé au Conseil exécutif, le ministère du premier ministre, et est devenu sous-ministre du ministère de la Cybersécurité et du Numérique le 23 octobre 2023.

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