Une molécule québécoise offre un nouvel espoir pour les leucémies intraitables

Jean-Benoit Legault, La Presse Canadienne
Une molécule québécoise offre un nouvel espoir pour les leucémies intraitables

MONTRÉAL — Une molécule développée par des chercheurs québécois permet de multiplier le nombre de cellules souches provenant de sang de cordon ombilical, ce qui offre un nouvel espoir à certains patients qui avaient épuisé toutes les options dont la médecine disposait jusqu’à présent.

La molécule UM171 permet de multiplier de 10 à 80 fois le nombre de cellules souches prélevées chez un donneur ou obtenues grâce à du sang de cordon.

«Nos essais cliniques montrent que cette technologie-là nous permet maintenant de guérir des gens qui, jusqu’à maintenant, semblaient non guérissables en greffe parce que leur maladie était trop agressive», a dit le docteur Guy Sauvageau, de l’Institut de recherche en immunologie et en cancérologie de l’Université de Montréal.

La molécule UM171 a été testée, lors d’essais cliniques de phase II, chez 50 patients souffrant de leucémies ou de myélodysplasies (un ensemble de maladies caractérisées par une production insuffisante de cellules sanguines matures saines par la moelle osseuse) à risque élevé de rechute après une greffe de cellules souches.

Soixante-dix pour cent des patients ont survécu deux ans après leur greffe de cellules souches amplifiées avec la molécule UM171, sans aucun signe de récidive de la maladie.

Ces résultats sont d’autant plus prometteurs qu’environ le tiers des patients concernés n’avaient pas obtenu de résultats significatifs à la suite d’une première greffe de cellules souches sans recours à la molécule UM171.

Dans environ 10 % des cas de leucémie aiguë, a dit le docteur Sauvageau, les médecins n’arrivent pas à trouver un donneur de moelle osseuse qui soit compatible avec le patient. Et même si les cellules souches ombilicales donnent une plus grande marge de manœuvre aux soignants, il se produit très souvent que le cordon disponible soit trop petit pour répondre aux besoins d’un adulte de 70 kilos.

«Cette molécule est littéralement le seul exemple présentement dans le monde d’une molécule qui peut résoudre ce problème pour ce 10 % de patients», a résumé le docteur Sauvageau.

L’utilisation de la molécule UM171, a-t-il ajouté, permet non seulement d’obtenir suffisamment de cellules souches pour maximiser les chances d’une réussite de la greffe, mais ces cellules ont aussi tendance ― de par leur nature même ― à être plus agressives envers la leucémie. «On obtient donc le meilleur des deux mondes», a-t-il dit.

Au fil de leurs travaux, le docteur Sauvageau et ses collègues ont constaté que la molécule UM171 semble agir sur les mécanismes de base du rajeunissement des cellules souches du sang. Il se pourrait même qu’elle ait un impact sur les mécanismes de base du vieillissement humain.

«La cellule exposée à la molécule UM171 retrouve des caractéristiques de cellules jeunes, a dit le docteur Sauvageau. Notamment ces cellules-là génèrent des cellules du système immunitaire qui sont beaucoup plus actives et qui sont beaucoup plus nombreuses chez l’individu transplanté.»

La découverte de la molécule UM171 avait tout d’abord été annoncée dans les pages de la revue Science en 2014. La nouvelle avait fait sensation et avait même été choisie comme nouvelle scientifique de l’année au Québec. Les premiers essais cliniques organisés avaient ensuite donné des résultats très prometteurs.

«Ça avait encore fait un ‘boom’ dans les médias, mais il y a environ cinq ans j’avais dit aux gens, on s’en va dans une période noire, vous n’entendrez plus parler de nous pendant à peu près cinq ans parce qu’on doit faire les phases 2 et on doit recruter une centaine de patients», a rappelé le docteur Sauvageau.

«Mais j’avais dit, vous allez réentendre parler de nous un jour. Et bien, le jour est venu.»

Les chercheurs sont actuellement en discussions avec la Food and Drug Administration des États-Unis et avec l’Agence européenne du médicament pour la réalisation de nouveaux essais cliniques.

Les plus récents résultats ont été dévoilés lors du 65e congrès annuel de l’American Society of Hematology.

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