Le Canada attend la décision de la Cour pénale internationale sur Israël

Mia Rabson, La Presse Canadienne
Le Canada attend la décision de la Cour pénale internationale sur Israël

OTTAWA — Le Canada soutient la Cour pénale internationale (CPI) et «surveille attentivement» ses délibérations sur une allégation de génocide contre Israël, a déclaré mercredi le premier ministre Justin Trudeau.

Il n’a toutefois pas indiqué si le Canada était d’accord avec cette allégation, ni même si Ottawa reconnaîtrait la décision du tribunal s’il déclare Israël coupable de génocide.

«Je ne vais pas commenter sur des décisions qui pourraient être prises par la (CPI) avant qu’elle ne soit prise», a-t-il affirmé en conférence de presse à Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick.

Le plus haut tribunal des Nations Unies a tenu deux jours d’audiences publiques la semaine dernière alors que l’Afrique du Sud a fait valoir qu’Israël commet un génocide dans la bande de Gaza.

L’Afrique du Sud a déclaré que même si elle condamne le Hamas pour son attaque brutale contre Israël en octobre, rien ne justifie l’ampleur de la réponse israélienne à Gaza. Le pays a demandé au tribunal d’ordonner à Israël de cesser son attaque sur le territoire palestinien.

Israël a rejeté catégoriquement l’allégation de génocide et a fait valoir devant le tribunal que l’allégation de l’Afrique du Sud était «déformée» et qu’il avait le droit de se défendre contre le Hamas.

Les militants du Hamas ont tué 1200 personnes et pris plus de 200 otages lors d’une série d’attaques dans le sud d’Israël le 7 octobre. Israël a répondu avec une force considérable à Gaza, insistant sur le fait que ses attaques visaient à éliminer le Hamas et ses partisans, et non les civils.

Le ministère de la Santé de Gaza, dirigé par le Hamas, affirme que plus de 24 000 personnes ont été tuées dans le conflit. Il ne fait aucune différence entre les civils et les combattants du Hamas.

Plus de 100 otages israéliens ont été libérés lors d’un cessez-le-feu temporaire en novembre, mais Israël estime que plus de 100 d’entre eux restent captifs à Gaza et qu’au moins une vingtaine sont morts pendant leur détention.

Appuis et objections à la cause

L’Afrique du Sud affirme que plus de 50 pays soutiennent sa cause, dont les 22 membres de la Ligue arabe, tandis que la plupart des alliés occidentaux d’Israël restés neutres ou ont carrément rejeté cette cause.

Le secrétaire d’État américain Antony Blinken a qualifié l’allégation de génocide de «sans fondement» et a déclaré que le dossier sud-africain est particulièrement troublant parce que le Hamas est une organisation terroriste qui appelle ouvertement à la fois à la destruction d’Israël et à l’anéantissement des Juifs.

Le Canada, qui reconnaît également le Hamas comme organisation terroriste, n’a pas publié de déclaration sur cette affaire jusqu’à ce que l’Afrique du Sud et Israël aient fait valoir leurs arguments devant le tribunal.

Le 12 janvier, interrogé sur la position du Canada lors d’une conférence de presse, M. Trudeau a déclaré que le Canada soutenait le tribunal, mais que cela ne signifiait pas qu’il soutenait les «prémisses» de l’argumentation de l’Afrique du Sud.

Dans une déclaration publiée plus tard le même jour, la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, a répété la même déclaration, mais a également précisé que les arguments en faveur du génocide nécessitent des preuves juridiques convaincantes et que la barre pour prouver le génocide est assez élevée.

La position du Canada critiquée

M. Trudeau a insisté mercredi sur le fait que ces déclarations étaient «très, très claires», mais a tenu à les répéter. 

«Le Canada a toujours soutenu l’ordre international fondé sur des règles et les structures autour du droit international, y compris et surtout la Cour internationale de Justice», a-t-il soutenu.

«Nous sommes directement engagés dans cinq affaires différentes devant la CIJ à l’heure actuelle parce que nous croyons dans le travail qu’elle accomplit. En même temps, notre soutien à la CIJ et à ses processus ne signifie pas que nous acceptons les prémisses de l’affaire présentée par L’Afrique du Sud et nous suivons attentivement le déroulement de toutes les étapes.»

De nombreuses organisations estiment que la position du Canada n’est pas claire ou constitue un soutien indirect à Israël.

Dans un communiqué publié mardi soir, le Centre consultatif des relations juives et israéliennes, un groupe de défense des fédérations juives au Canada, a qualifié la position du Canada de «déroutante et ambiguë».

«Comme d’autres alliés d’Israël, le gouvernement du Canada aurait dû condamner clairement et sans équivoque les accusations de l’Afrique du Sud», indique le communiqué. 

«Après tout, si le Canada s’oppose réellement au terrorisme, à l’antisémitisme et respecte le droit international, il devrait dénoncer cette application et émettre une réponse similaire à celles des États-Unis et de l’Allemagne.»

Les Canadiens pour la justice et la paix au Moyen-Orient ont déclaré le 12 janvier qu’ils étaient «indignés» par le refus du Canada de soutenir l’Afrique du Sud. 

«Le fait de ne pas être d’accord avec la «prémisse» d’une telle allégation, sans réfuter aucun des arguments de l’Afrique du Sud, constitue une abdication grave et choquante des responsabilités du Canada en vertu de la Convention sur le génocide.»

La semaine dernière, le chef du Parti conservateur, Pierre Poilievre, a adopté une position claire, se rangeant du côté d’Israël et rejetant catégoriquement les allégations de génocide de l’Afrique du Sud. 

«Je trouve incroyable que ces pays n’aient pas accusé le Hamas de génocide alors que la charte du Hamas stipule qu’il veut commettre un génocide contre Israël», a déclaré M. Poilievre vendredi.

La charte fondatrice du Hamas appelle à l’anéantissement d’Israël.

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