Gaza: le NPD et QS demandent à Ottawa de faciliter la réunification des familles

Stéphane Blais, La Presse Canadienne
Gaza: le NPD et QS demandent à Ottawa de faciliter la réunification des familles

MONTRÉAL — Alexandre Boulerice, chef adjoint du Nouveau Parti démocratique (NPD), et le député de Québec solidaire (QS) Guillaume Cliche-Rivard ont tenu une conférence de presse, vendredi matin, devant les bureaux montréalais du ministre de l’Immigration, Marc Miller, pour lui demander de faciliter l’émission de visas aux proches de Canadiens qui tentent de fuir la guerre en Palestine.

Les deux partis politiques exhortent le gouvernement à éliminer «sa limite arbitraire pour les Palestiniens» et à veiller à réunir plus rapidement les proches avec leur famille.

«Des gens meurent tous les jours, des centaines de personnes meurent tous les jours et le gouvernement fédéral a une responsabilité d’accélérer le processus pour sauver des vies, éviter d’autres pertes humaines», a dénoncé le député Alexandre Boulerice.

Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada a créé un programme visant à offrir des visas temporaires aux personnes coincées dans le territoire palestinien assiégé, à condition que des proches puissent les soutenir ensuite au Canada.

Mais cette politique stipule qu’elle n’examinera que 1000 demandes, ce qui constitue une injustice envers les Canadiens d’origines palestiniennes, selon le NPD et QS.

«Il vient d’où ce chiffre de 1000 personnes? On a été extrêmement bienveillants et accueillants avec les Syriens et avec les Ukrainiens. Pourquoi on ne peut pas faire exactement la même chose avec les Palestiniens en ce moment? C’est ça qu’on ne comprend pas», a ajouté le député du NPD.

Elle perd sa fille et tente de sauver sa sœur

Quelques dizaines de personnes étaient réunies devant les bureaux de Marc Miller pour appuyer la démarche des deux députés.

Samar Alkhdour, dont la fille de 13 ans est morte à Gaza il y a quelques semaines, était du nombre.

«C’est le système qui a laissé tomber Jana», a expliqué la mère endeuillée qui tente maintenant de sauver la vie de sa sœur.

«Imaginez un instant voir les membres de votre famille bien aimés mourir lentement sous vos propres yeux et devant le monde entier. Vous regardez cela avec une impuissance et un désespoir total. Mais pour moi, ce n’est pas imaginaire, c’est une réalité. Tout ce que j’attends du gouvernement aujourd’hui, c’est de faciliter l’arrivée de ma sœur et de sa famille au Canada avant qu’il ne soit trop tard. S’il vous plaît», a imploré Samar Alkhdour.

La femme de 38 ans, qui travaille dans un centre d’aide aux immigrants à Montréal, est arrivée au Québec en tant que demandeuse d’asile avec deux de ses trois enfants en 2019.

Son troisième enfant, celle qui est morte il y a quelques semaines, n’avait pas pu faire le voyage au Canada à l’époque. Elle était restée avec des membres de sa famille à Gaza, en raison de problèmes de santé. 

Le but de Samar Alkhdour était de faire venir sa fille une fois qu’elle obtiendrait la résidence permanente.

Mais la guerre est arrivée à Gaza et Samar Alkhdour a tenté de la faire évacuer d’urgence, sans succès.

Sa fille Jana a été retrouvée morte en raison de malnutrition, selon sa mère, dans une église qui servait de refuge, le 8 janvier dernier. Quatre jours après son 13e anniversaire.

«Je n’ai pas pu vivre le deuil de Jana parce qu’aujourd’hui je dois continuer à me battre pour m’assurer que la même chose n’arrive pas à ma sœur et à sa famille», a indiqué la femme d’origine palestinienne.

Sa sœur ne fait pas partie de la liste des 1000 demandes qui sont examinées par le gouvernement du Canada dans le cadre du programme visant à offrir des visas temporaires aux personnes coincées dans le territoire palestinien.

«J’ai appliqué, mais je n’ai pas encore reçu de code», a-t-elle expliqué.

Son mari palestinien pris à Rafah

Dina Ibrais, qui est âgée de 21 ans, vit le même genre d’angoisse que Samar Alkhdour.

Cette citoyenne canadienne vit avec son fils de 9 mois au Québec et elle tente de faire venir au pays son mari, un Palestinien, qui n’a pas encore vu son enfant.

«J’ai fait la dernière demande, celle annoncée le 9 janvier, mais rien ne se passe, je n’ai pas de réponse.»

Elle a raconté à La Presse Canadienne que 38 personnes de sa famille élargie sont mortes depuis le début de la guerre.

«Mon mari est à Rafah et Israël dit qu’il va attaquer Rafah bientôt, ils ont des bombes et des avions, nous, on n’a rien, je veux juste faire sortir mon mari», a déclaré la femme en pleurs.

Pas de présence sur le terrain

Il y a 976 demandes en cours d’examen. 

Le ministère de l’Immigration a commencé à accepter les demandes de visa le 9 janvier dernier.

Dans un échange de courriels avec La Presse Canadienne, Jeffrey MacDonald, conseiller en communications pour le ministère, a indiqué qu’en date du 19 février, six personnes qui ont quitté Gaza par leurs propres moyens et dont la demande de visa était en cours «ont été autorisées à venir au Canada».

Également, il y a «976 demandes acceptées en traitement» et «en cours d’examen».

Les personnes dont les demandes sont «acceptées en traitement» doivent faire l’objet de vérifications à des fins de sécurité.

En absence de personnel dans cette zone de guerre, le gouvernement fédéral doit effectuer des enquêtes à distance, en se fiant notamment aux «autorités locales», a expliqué le conseiller en communications.

«Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) n’est pas présent sur le terrain pour procéder au contrôle initial et à la collecte de données biométriques. En utilisant les renseignements biographiques détaillés fournis par les demandeurs, nous sommes en mesure de procéder à un contrôle de sécurité préliminaire alors que les personnes se trouvent encore à Gaza», a expliqué Jeffrey MacDonald.

IRCC a également indiqué qu’Ottawa transmet «aux gouvernements d’Israël et d’Égypte, pour approbation, les noms des personnes qui ont passé l’examen préliminaire d’admissibilité et de recevabilité».

IRCC se dit «profondément préoccupé par la sécurité des personnes dans la région».

Quant à savoir si Ottawa pourrait éventuellement examiner plus que 1000 demandes de réunification, le ministère a répondu «qu’IRCC continue de faire preuve de souplesse alors qu’il évalue la situation, notamment le nombre de demandes reçues et la capacité à faciliter le départ de Gaza des personnes admissibles afin qu’elles puissent se rendre dans un pays tiers sûr».

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