Demandeurs d’asile: Rodriguez reproche à Québec de manquer de sensibilité

Stéphane Blais, La Presse Canadienne
Demandeurs d’asile: Rodriguez reproche à Québec de manquer de sensibilité

MONTRÉAL — Le ministre fédéral Pablo Rodriguez ne ferme pas la porte à négocier avec Québec des montants supplémentaires pour les demandeurs d’asile, mais il reproche au gouvernement Legault de manquer de sensibilité à l’égard de ceux qui demandent d’être protégés par le Canada, particulièrement les enfants, à qui, selon lui, il ne faut pas enlever l’accès aux garderies subventionnées.

Le ministre fédéral des Transports et lieutenant du Québec a convié les journalistes jeudi matin à Montréal pour répondre au gouvernement Legault qui réclame 1 milliard $ à Ottawa, arguant que c’est ce que lui a coûté l’accueil des demandeurs d’asile depuis 2021.

Pablo Rodriguez a débuté son discours en soulignant que «Québec a été extrêmement généreux et il a fait plus que sa part au niveau de l’accueil des demandeurs d’asile», mais qu’il faut «rétablir certains faits».

La «chose la plus importante» aux yeux du ministre, c’est que lorsqu’on parle de demandeurs d’asile, «on ne parle pas de statistiques, de colonnes comptables, de piastres, on parle d’êtres humains, on parle d’hommes, de femmes, d’enfants qui sont venus demander la protection du Canada, du Québec», a indiqué le  ministre en rappelant que ses parents avaient demandé l’asile lorsqu’ils ont quitté l’Argentine.

Selon son gouvernement, le milliard de dollars que demande Québec «n’est pas une somme due, mais une somme réclamée».

Une table de négociation?

La veille, à Montréal, le ministre Rodriguez avait indiqué que ce type de demande, «ça se négocie et ça se discute autour de la table, pas à travers des sorties médiatiques».

Mais la ministre québécoise de l’Immigration, Christine Fréchette, lui avait répondu que «si le fédéral souhaite négocier à une table, qu’il la convoque! On est plus que disponible. On a eu plusieurs rencontres à deux ministères, à quatre ministères, peu importe le nombre, le résultat est le même.»

Selon le ministre Rodriguez, les deux gouvernements ont discuté de la situation «pas plus tard que lundi» et «le sous-ministre de l’Immigration du Québec, le sous-ministre des Finances du Québec, leurs homologues d’Ottawa se sont réunis pour discuter exactement de ça, des détails financiers concernant l’immigration, concernant les demandeurs d’asile».

Ce qui a fait dire au ministre Rodriguez: «Elle est là cette table, elle existe, elle est formelle». 

Le lieutenant du Québecne ferme pas la porte à des négociations, mais il a tenu à rappeler «que dans le cadre de l’accord Canada-Québec pour 2023-2024, Ottawa transfère 775 millions $ à Québec et que pour 2022-2023, c’est  727 millions $ et les années précédentes, autour de 700 millions $ par année».

Ces sommes, a-t-il indiqué, servent à l’intégration et à la francisation.

Il a ajouté qu’Ottawa a versé 437 millions $ depuis 2015 pour la santé des demandeurs d’asile et 440 millions $ pour le logement.

«Il y a 2300 demandeurs d’asile dans les hôtels actuellement payés à 100 % par Ottawa», a ajouté M. Rodriguez.

Accès aux garderies

Le ministre fédéral a également fortement critiqué l’intention de Québec d’aller jusqu’en Cour suprême pour empêcher les enfants de demandeurs d’asile d’avoir accès aux Centres de la petite enfance (CPE) et garderies subventionnées de la province.

«En tant qu’humain, étant un père, je ne comprends pas», a indiqué Pablo Rodriguez en faisant valoir qu’à la garderie, «c’est là qu’on se fait des amis», que l’on «rencontre ensuite au parc» ou pour «jouer une partie de hockey», donc la garderie représente «le début de l’intégration».

«Quand je lis que Québec est prêt à aller jusqu’à la Cour suprême pour empêcher des enfants de fréquenter des CPE, je me dis qu’il y a quelque chose qui ne marche pas chez nous» et «quand tu fais deux catégories d’enfants, ceux qui ont le droit puis ceux qui n’ont pas le droit, j’ai un profond malaise».

La moitié des demandeurs d’asile passe par le Québec

Selon Québec, la province accueille 55 % des demandeurs d’asile qui arrivent au Canada. Cela représente 160 651 réfugiés en 2023, toujours selon les chiffres du gouvernement.

Mais Pablo Rodriguez a tenu à apporter une nuance à ces chiffres: «55 % entrent au Québec, mais 25 % d’entre eux quittent le Québec».

Négocier par le biais des médias

Le ministre Rodriguez, qui avait pourtant reproché la veille à ses homologues de Québec d’utiliser les médias pour négocier  les transferts d’argent concernant les demandeurs d’asile, s’est défendu de faire le contraire de ce qu’il demande.

«On doit répondre aux actions de Québec, mon premier choix n’est pas d’être ici», mais «si Québec n’était pas sorti hier, je n’aurais pas besoin de faire ça aujourd’hui et j’espère que la suite va continuer autour d’une table».

Une rencontre entre premiers ministres

Plus tôt cette semaine, quatre ministres du gouvernement du Québec ont de nouveau interpellé Ottawa pour que soit freinée l’arrivée des demandeurs d’asile et pour qu’ils soient mieux répartis à travers le pays.

Alors que la pression s’accentue sur les services publics, le premier ministre François Legault a annoncé qu’il va rencontrer son homologue Justin Trudeau dans les prochaines semaines.

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