Les autorités ukrainiennes disent avoir repris le contrôle de deux villes

Yuras Karmanau, La Presse Canadienne
Les autorités ukrainiennes disent avoir repris le contrôle de deux villes

LVIV, Ukraine — Les forces ukrainiennes ont affirmé avoir repris une banlieue de Kyiv et une ville orientale aux Russes dans ce qui devient une impasse sur le terrain, tandis que les négociateurs ont commencé à se réunir mardi pour une autre série de pourparlers visant à arrêter les combats.

Avant les pourparlers, qui se tiendront à Istanbul, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a affirmé que son pays était prêt à déclarer sa neutralité, comme Moscou l’avait exigé, et était ouvert à un compromis sur le sort du Donbass, la région contestée à l’est du pays.

Le maire d’Irpin, une banlieue située au nord-ouest de Kyiv qui a été le théâtre de certains des combats les plus violents près de la capitale, a déclaré lundi que la ville avait été «libérée» des troupes russes.

M. Zelensky a indiqué que les forces russes tentaient de se regrouper après avoir perdu cette zone.

«Nous devons encore nous battre, nous devons résister, a déclaré le président lundi soir dans une adresse vidéo à sa nation. Nous ne pouvons pas exprimer nos émotions maintenant. Nous ne pouvons pas élever les attentes, simplement pour ne pas nous épuiser.»

Irpin a attiré l’attention après la diffusion de photos d’une mère et de ses deux enfants qui ont été tués par des bombardements alors qu’ils tentaient de fuir, leurs corps gisant sur le trottoir avec des bagages et une cage de transport pour animaux de compagnie à proximité.

Un haut responsable américain de la défense a affirmé que les États-Unis pensaient que les Ukrainiens avaient également repris la ville de Trostyanets, au sud de Soumy, à l’est.

Le responsable, qui s’est exprimé sous couvert d’anonymat pour discuter des évaluations des services de renseignement américains, a mentionné que les forces russes restaient en grande partie dans des positions défensives près de la capitale, Kyiv, et faisaient peu de progrès ailleurs dans le pays.

Le responsable a déclaré que la Russie semblait réduire les opérations terrestres près de la capitale et se concentrer davantage sur le Donbass, la région à prédominance russophone où les rebelles soutenus par Moscou mènent une guerre séparatiste depuis huit ans.

À la fin de la semaine dernière, avec ses forces embourbées dans certaines parties du pays, la Russie a semblé réduire ses objectifs de guerre. Moscou affirme désormais que son objectif est de sécuriser toute la région orientale du Donbass, qui est partiellement contrôlée par des séparatistes soutenus par la Russie depuis 2014.

Si cette situation suggérait une éventuelle stratégie de sortie pour sauver la face du président russe Vladimir Poutine, cela faisait également craindre aux Ukrainiens que le Kremlin ait l’intention de diviser le pays en deux et de le forcer à céder une partie de son territoire.

Pendant ce temps, une cyberattaque a presque complètement déconnecté le fournisseur national de télécommunications ukrainien Ukrtelecom. Le chef du service d’État ukrainien pour les communications spéciales, Yurii Shchyhol, a blâmé «l’ennemi» sans nommer spécifiquement la Russie. Il a ajouté que la plupart des clients étaient coupés du téléphone, d’Internet et du service mobile afin que la couverture puisse continuer pour l’armée ukrainienne.

Lundi également, un dépôt pétrolier dans la région de Rivne, dans l’ouest de l’Ukraine, a été touché par une attaque au missile, a déclaré le gouverneur. Il s’agissait de la deuxième attaque contre des installations pétrolières dans la région proche de la frontière polonaise.

Ces derniers jours, les troupes ukrainiennes ont repoussé les Russes dans d’autres secteurs.

Dans la ville de Makariv, près d’une autoroute stratégique à l’ouest de la capitale, des journalistes de l’Associated Press (AP) ont vu la carcasse d’un lance-roquettes russe, un camion russe incendié, le corps d’un soldat russe et un char ukrainien détruit après y avoir combattu il y a quelques jours. 

Dans le village voisin de Yasnohorodka, l’AP a été témoin de positions abandonnées par des soldats ukrainiens qui s’étaient déplacés plus à l’ouest, mais aucun signe de troupes russes.

Vendredi, le responsable américain de la défense a déclaré que les Russes ne contrôlaient plus totalement Kherson, la première grande ville à tomber aux mains des forces de Moscou. Le Kremlin a nié avoir perdu le contrôle total de la ville du sud.

Nouveaux pourparlers

La Russie a longtemps exigé que l’Ukraine abandonne tout espoir de rejoindre l’OTAN, que Moscou considère comme une menace. Le président Zelensky a, pour sa part, souligné que l’Ukraine avait besoin de ses propres garanties de sécurité dans le cadre de tout accord.

Au cours du week-end, M. Zelensky a déclaré qu’il était prêt à accepter la neutralité. Il a également dit que «la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine ne font aucun doute», tout en suggérant en même temps qu’un compromis pourrait être possible sur «la question complexe du Donbass».

Le dirigeant ukrainien en a suggéré autant auparavant, mais a rarement commenté aussi longuement. Cela pourrait créer une dynamique pour les pourparlers, pour lesquels les délégués russes sont arrivés à Istanbul lundi, ont rapporté les médias turcs.

Pourtant, il n’était pas clair comment un compromis sur le Donbass s’accorderait avec le maintien de l’intégrité territoriale de l’Ukraine.

Les discussions antérieures, à la fois par vidéo et en personne, n’ont pas réussi à faire avancer la fin de la guerre, en cours de plus d’un mois. 

Exode des habitants

Le conflit a causé la mort de milliers de personnes et a chassé plus de 10 millions d’Ukrainiens de leurs foyers. Cela comprend près de 4 millions de personnes qui ont fui le pays.

Dans le sud du pays, le port assiégé de Marioupol a vu la moitié de sa population d’avant-guerre de plus de 400 000 personnes fuir, selon le maire de la ville, souvent sous les tirs et bombardements.

Alina Beskrovna s’est échappée de la ville dans un convoi de voitures et s’est rendue en Pologne. Elle a témoigné que des gens désespérés font fondre la neige pour obtenir de l’eau et cuisinent à feu ouvert malgré le risque de bombardement, «parce que si vous ne le faites pas, vous n’aurez rien à manger».

«Je pense que beaucoup de gens meurent de faim dans leurs appartements en ce moment sans aucune aide, a-t-elle relaté. C’est un meurtre de masse qui se produit aux mains des Russes.»

Résistance plus forte que prévu

Les forces terrestres de Poutine se sont embourbées en raison d’une résistance ukrainienne plus forte que prévu, combinée à ce que les responsables occidentaux qualifient de faux pas tactiques russes, d’un mauvais moral, de pénuries de nourriture, de carburant et d’équipement pour le temps froid, et d’autres problèmes. 

Moscou s’en est remis à la destruction des villes ukrainiennes avec de l’artillerie et des frappes aériennes.

Dans le village de Stoyanka près de Kyiv, le soldat ukrainien Serhiy Udod a déclaré que les troupes russes avaient pris des positions défensives et subi de lourdes pertes.

Les Russes ont probablement «pensé que ce serait comme la Crimée», que le Kremlin a annexée en 2014. «Mais ici, ce n’est pas comme en Crimée. Nous ne sommes pas contents de les voir. Ici, ils souffrent et se font tuer.»

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