Mortagne-au-Perche, terre de nos ancêtres

Par Raymond Marier

Cette semaine, nous visitons avec vous Mortagne-au-Perche, 150 km au sud-ouest de Paris, lieu d’origine de l’ancêtre français de Pauline, Zacharie Cloutier. Ça faisait cinq ans qu’elle rêvait d’y aller.

En arrivant par la D930, la ville nous apparaît en contrebas, entourée de larges vallons cultivés. À l’Office du tourisme, la dame reçoit souvent des Québécois à la recherche de leur passé. Elle nous dit tout de suite qu’il n’y a plus de Cloutier parmi la population, mais que la ville se souvient de Zacharie. Une plaque est installée en sa mémoire à la Résidence Les Roches.

Fierté

Nous marchons dans les rues de Mortagne-au-Perche en essayant d’imaginer son passé. Nous entrons à l’église Notre-Dame où un magnifique vitrail montre la contribution de Pierre Boucher au développement de la Nouvelle-France. On ne peut s’empêcher d’être touchés en pensant à la ville de Boucherville et à l’hôpital qui porte son nom, pas très loin de Saint-Jean.

Poursuivant la promenade, nous sommes intrigués par la présence de plusieurs boucheries-charcuteries dans cette petite ville de 4 000 habitants. Les trophées exposés et la variété impressionnante de boudins et de saucisses en vitrine nous poussent à entrer chez M. Pascal Cédille, rue des Quinze fusillés.

Accueillant, fier de son métier et de ses trophées, il nous parle du Québec où son fils a émigré. Comme au temps de nos ancêtres, dit-il, la vie semble y offrir encore davantage de possibilités. Avec un brin de tristesse, il dit que son fils y a trouvé du travail et réussit bien, bien mieux que s’il était resté en France.

Muséales de Tourouvre

Après avoir photographié la plaque commémorative de Zacharie Cloutier, nous nous rendons au Musée de l’Émigration française au Canada, à Tourouvre, tout près de Mortagne. Une mine d’informations y attend les Québécois, comme nous, intéressés par leurs origines françaises.

Nos ancêtres sont partis au XVIIe siècle en signant des contrats de trois ou de cinq ans au service d’un recruteur. Aventuriers et travailleurs acharnés, ils sont partis à une époque où les privilèges seigneuriaux les privaient de droits de chasse, de pêche et de toute possibilité d’ascension sociale. De plus, au fil des générations, la terre, partagée en héritage entre tous les enfants, devenait de plus en plus petite et ne suffisait plus à faire vivre une famille.

Au Québec, ils devaient travailler à construire et à défricher au service de leur patron, logés et nourris pendant la durée du contrat, avec un maigre salaire équivalent au prix de 500 kilos de pain. Au terme du contrat, ils pouvaient devenir propriétaires de terres dix fois plus grandes, peut-être d’un commerce et même d’une seigneurie.

Zacharie Cloutier

C’est Robert Giffard, recruteur pour la Compagnie des Cent Associés, qui a entraîné Zacharie, maître charpentier, et 42 autres Percherons qui sont partis à la fin du mois de mars 1634. Ils ont été accueillis par Champlain à leur arrivée à Québec, le 4 juin de la même année, après plus de deux mois d’un long et difficile voyage.

Zacharie, sa femme Xainte Dupont et leurs cinq enfants ont été logés dans le fort de Québec en attendant de construire leur maison. Son métier de maître charpentier lui permit d’obtenir d’intéressants contrats. La maison de Robert Giffard, l’église de Québec et le fort Saint-Louis font partie de ses réalisations.

Trois ans après son arrivée, il prit possession de «La Clouterie», sa terre promise, à Beauport. Il s’établit ensuite à Château-Richer où il mourut en 1677. Il serait l’ancêtre de tous les Cloutier d’Amérique. On dit même qu’il y aurait des gènes de Cloutier dans presque tous les Québécois francophones.

Nous apprenons avec stupéfaction que seulement 33 500 Français émigrèrent en Nouvelle-France pour coloniser toute l’Amérique du Nord, de l’Atlantique au Pacifique. Les Anglais, de leur côté, envoyèrent 250 000 colons, tous concentrés dans les régions de l’Atlantique, près de New York. Avec l’information présentée comme ça, on réalise que la défaite française était inéluctable.

Bravo cousins

Les Muséales présentent aussi une exposition de sculptures sur bois montrant les visages de l’émigration percheronne au Canada. L’artiste, Christian Champagne, s’est plongé dans l’histoire de cette époque et a reproduit ou imaginé la tête de ces aventuriers. Il nous fait sentir l’élan qui les habitait.

Nous découvrons ainsi le visage de Zacharie Cloutier et des ancêtres de plusieurs amis québécois, les Mercier, les Tremblay, les Boucher, les Fortin, les Gagnon, tous Percherons.

Pierre Tremblay serait l’ancêtre de 150 000 Tremblay en Amérique du Nord et Julien Mercier, l’ancêtre de 80% des Mercier, dont le premier ministre du Québec de 1887 à 1891, Honoré Mercier.

Avant de partir, en passant à la boutique du musée, on a acheté du sirop d’érable du Québec. Vous vous demandez peut-être si ça coûte cher, en France. Oui, très cher: même prix qu’au Québec.

Originaires du Perche

• Zacharie Cloutier

• Pierre Boucher

• Julien Mercier

• Pierre Tremblay

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Mathieu Cloutier
Mathieu Cloutier
2 années

Merci, excellent article! J’aimerais bien faire le voyage un jour!