Un conseiller conteste les sanctions résultant de ses pancartes sur les pensionnats

La Presse Canadienne
Un conseiller conteste les sanctions résultant de ses pancartes sur les pensionnats

CHARLOTTETOWN — Un conseiller de village de l’Île-du-Prince-Édouard demande au tribunal d’annuler les sanctions qui lui ont été imposées après qu’il eut affiché sur sa propriété une pancarte remettant en question l’existence de tombes anonymes sur les terrains d’anciens pensionnats fédéraux pour Autochtones.

Dans les documents déposés la semaine dernière auprès de la Cour suprême de l’Île-du-Prince-Édouard, le conseiller de Murray Harbour, John Robertson, affirme que ses collègues conseillers ont outrepassé leur autorité et violé ses droits le 18 novembre 2023, lorsqu’ils ont décidé qu’il avait enfreint le code de conduite du conseil.

Les conseillers ont alors décidé de lui imposer une amende de 500 $ et de le suspendre de son poste municipal pour six mois. M. Robertson, élu en novembre 2022, a également été démis de ses fonctions de président du comité de maintien et a reçu l’ordre d’écrire des excuses au maire, au conseil et à la communauté autochtone.

La demande de révision judiciaire du conseiller, datée du 16 février, affirme que ces sanctions étaient déraisonnables parce qu’elles ne tenaient pas compte de ses droits fondamentaux à la liberté de pensée, de croyance, d’opinion et d’expression, tels que garantis par la Charte des droits et libertés.

M. Robertson soutient qu’il ne devrait pas être puni pour avoir exprimé des opinions qui n’ont rien à voir avec son rôle de membre élu du conseil.

Entre fin septembre et début octobre de l’année dernière, coïncidant avec la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation, le conseiller a affiché une pancarte sur sa propriété avec les messages «Vérité : canular de charnier» et «Rendez à Sir John A. son intégrité».

John A. Macdonald, le premier premier ministre du Canada, est considéré comme l’un des architectes du système des pensionnats parce qu’il a promu des politiques d’assimilation et de violence envers les peuples autochtones.

En mai 2021, la Première Nation Tk’emlups te Secwepemc a annoncé qu’un radar pénétrant dans le sol avait révélé les restes possibles de pas moins de 215 enfants autour de l’ancien pensionnat de Kamloops, en Colombie-Britannique. Depuis lors, de nombreuses autres Premières Nations du Canada ont recherché des tombes anonymes sur les sites de pensionnats sur leurs territoires.

«Interprétation excessive» du code de conduite

«Le sujet des déclarations contestées de M. Robertson incluait la remise en question de la fiabilité des reportages de nature politique et l’expression d’une opinion concernant une personnalité politique et ne concernait aucune fonction exercée par M. Robertson en tant que membre du conseil», indique la demande, arguant que les autres conseillers ont eu recours à une «interprétation excessive» du code de conduite.

Le document indique que M. Robertson a résisté aux demandes de démission, «affirmant que l’expression de ses opinions sur des sujets politiques n’était pas adéquatement soumise au contrôle du conseil». Terry White, maire de Murray Harbour, localité de 282 habitants, n’a pas pu être joint vendredi pour commenter.

Le conseil a embauché un enquêteur tiers qui a conclu que les pancartes de M. Robertson violaient le code de conduite, mais l’enquêteur n’a formulé aucune recommandation concernant les sanctions, indique la demande. De plus, le document affirme que le conseil n’a pas fourni les raisons de ses actions.

Le 20 décembre, le ministre provincial des Communautés, Rob Lantz, a déclaré que M. Robertson avait jusqu’à la fin du mois pour se conformer aux sanctions. Mais une fois ce délai passé, M. Lantz a alloué une prolongation de deux semaines le 2 janvier, affirmant que M. Robertson venait tout juste de rentrer au Canada et n’était pas au courant de l’ultimatum.

Cette deuxième date limite n’a pas été respectée. Le 24 janvier, M. Lantz a confirmé qu’il avait demandé à un cabinet d’avocats de mener une enquête sur l’affaire, principalement parce qu’il avait reçu des conseils d’avocats du gouvernement disant que c’était la chose prudente à faire, étant donné que la province n’avait jamais eu affaire à ce genre de cas auparavant.

À l’époque, M. Lantz avait déclaré que le conseiller ne s’était pas présenté aux réunions du conseil ni n’avait répondu aux conclusions du conseil. «Il a fait preuve de mépris envers ses collègues du conseil et envers le processus», a reconnu M. Lantz lors d’une entrevue le mois dernier.

En vertu de la Loi sur le gouvernement municipal de la province, seul le ministre a le pouvoir de révoquer un conseiller.

Le sénateur de l’Île-du-Prince-Édouard, Brian Francis, le chef de la Première Nation Abegweit, Roderick Gould Jr., ainsi que le maire de Murray Harbour et d’autres conseillers ont tous demandé la démission de M. Robertson.

— Par Michael MacDonald à Halifax

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