Sherbrooke est la seule grande ville canadienne avec un taux de zéro homicide en 2022

Pierre Saint-Arnaud, La Presse Canadienne
Sherbrooke est la seule grande ville canadienne avec un taux de zéro homicide en 2022

MONTRÉAL — La ville de Sherbrooke est la seule grande ville canadienne qui n’a enregistré aucun homicide en 2022.

Les données 2022 sur les homicides publiées par Statistique Canada, mercredi, montrent en effet que la Reine de l’Estrie est la seule parmi les 36 villes canadiennes de plus de 100 000 habitants à avoir été épargnée par ce type de violence l’an dernier.

«C’est une agréable surprise, mais en même temps on essaie de ne pas trop prendre ça pour acquis», a réagi le maire suppléant de Sherbrooke, Raïs Kibonge, lorsque rejoint par La Presse Canadienne. 

M. Kibonge sait pertinemment que sa ville a eu ses difficultés dans le passé avec le crime organisé, en l’occurrence les Hells Angels, qui y étaient bien installés dans un bunker, laissé à l’abandon depuis 2009 et démoli en 2021. «Je ne sais pas si c’est le passage du temps ou le travail des différents services de police, mais apparemment, on est devenu un territoire moins intéressant. Le crime organisé a dû migrer un peu ailleurs, où il a trouvé le moyen de vraiment mieux se cacher!»

Le Québec très bien classé

Lorsque mesuré en termes de taux d’homicides, soit le nombre d’homicides par 100 000 habitants, la ville de Gatineau vient au troisième rang, avec un taux de 0,58.

La ville de Québec vient pour sa part au quatrième rang avec un taux de 0,60 homicide par 100 000 habitants. Si on rétrécit les comparatifs aux 12 villes canadiennes de plus de 500 000 habitants, la Vieille Capitale se classe deuxième, derrière Oshawa (0,57), mais loin devant les autres.

Montréal se classe au milieu du peloton des villes de plus d’un demi-million d’habitants avec un taux de 1,49 homicide par 100 000 habitants, mais la métropole demeure bien en deçà du taux national canadien, qui se situe à 2,25.

Quant aux deux autres villes québécoises de plus de 100 000 habitants, tant Saguenay (1,16) que Trois-Rivières (1,82) se situent bien en deçà de la moyenne canadienne.

Le Québec fait d’ailleurs bonne figure dans l’ensemble, lui qui se classe systématiquement au deuxième ou troisième rang parmi les provinces et territoires tous les ans, affichant en 2022 un taux de 1,26. Cependant, même s’il conserve le troisième rang, il s’agit tout de même d’une hausse importante de 21 % par rapport à l’année précédente.

Zéro aussi pour l’Île-du-Prince-Édouard

Du côté du Nouveau-Brunswick, la province encaisse une hausse de 33 %, la deuxième plus importante au pays, mais son taux de 1,85 la place malgré tout au quatrième rang. La ville de Moncton se classe aussi très bien, son taux de 1,11 homicide par 100 000 habitants la plaçant au neuvième rang des 36 villes canadiennes de plus de 100 000 habitants.

Fait à noter, l’Île-du-Prince-Édouard occupe la première place provinciale, affichant elle aussi un taux de zéro homicide par 100 000 habitants, mais comme on n’y trouve aucune ville ou région métropolitaine de plus de 100 000 habitants, sa capitale, Charlottetown, échappe au classement des villes canadiennes, bien qu’elle ait réussi le même exploit que Sherbrooke.

À l’opposé, les villes de Thunder Bay, en Ontario et de Winnipeg, au Manitoba, affichent des taux inquiétants de 12,05 et de 6,10, respectivement. Le Manitoba enregistre d’ailleurs la plus importante hausse de son taux, un bond de 40 % par rapport à celui de 2021. Les Territoires du Nord-Ouest (6,58), le Manitoba dans son ensemble (6,24) et la Saskatchewan (5,94) affichent les taux les plus élevés et de loin, bien au-dessus de la moyenne canadienne.

Quatre années de hausse 

Le taux canadien de 2,25 était lui aussi en hausse, de 8 % par rapport à 2021 alors que le pays a été le théâtre de 874 homicides durant l’année et Statistique Canada rapporte qu’il s’agit d’une quatrième hausse annuelle consécutive. L’agence fédérale prend toutefois soin de préciser que «malgré les récentes hausses, les homicides demeurent un événement rare au Canada; ils représentaient moins de 0,2 % de l’ensemble des crimes avec violence déclarés par la police en 2022».

Dans le détail, on note que les homicides attribuables à des gangs (202 homicides, ou 0,52 homicide pour 100 000 habitants) ont grandement contribué à la hausse globale des homicides au pays. Dans ces conditions, on ne se surprend guère de constater que le nombre d’accusés ou de suspects âgés de moins de 18 ans a augmenté en 2022. Ce nombre a presque triplé, en fait, alors que, parmi les homicides classés, 90 jeunes ont été les auteurs présumés d’un homicide en 2022, comparativement à 33 en 2021 et à une moyenne de 39 au cours des 10 années précédentes. Le taux de jeunes auteurs présumés d’homicide en 2022 (1,23 pour 100 000 jeunes) était 2,2 fois supérieur à la moyenne des 10 années précédentes (0,56 pour 100 000 jeunes).

Victimes: un nombre disproportionné d’Autochtones

Du côté des victimes, une statistique troublante revient encore cette année, soit que 225 victimes d’homicide en 2022 étaient des Autochtones, soit un peu plus du quart (27 %) des victimes d’homicide, une proportion légèrement plus élevée que celle observée l’année précédente (24 %). Le taux d’homicides commis contre des victimes autochtones s’établissait à 10,98 victimes pour 100 000 Autochtones. Il s’agit d’un taux plus de six fois supérieur au taux d’homicides commis contre des non-Autochtones (1,69 pour 100 000).

Une autre donnée troublante émane du rapport qui nous apprend qu’en 2022, cinq policiers ont été victimes d’homicide. Il s’agit du nombre le plus élevé enregistré depuis 1985, année au cours de laquelle cinq policiers avaient aussi été victimes d’homicide.

Mentionnons enfin que les armes à feu sont responsables de 41 % des homicides et que, parmi ceux-ci, près des deux tiers (63 %) ont été commis au moyen d’une arme de poing.

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