Le ministre Champagne dit qu’il faut se concentrer sur la production d’électricité

Mia Rabson, La Presse Canadienne
Le ministre Champagne dit qu’il faut se concentrer sur la production d’électricité

OTTAWA — Le ministre fédéral de l’Industrie, François-Philippe Champagne, a consacré la majeure partie de l’année dernière à dépenser beaucoup d’argent pour d’importantes usines de batteries de véhicules électriques, alors que le Canada prenait des mesures pour solidifier sa stratégie industrielle verte.

Mais il prévient que le pays atteint les limites de sa capacité abondante en énergies renouvelables, et que produire davantage d’électricité sera essentiel pour pérenniser les gains.

«Je pense que la production d’énergie pourrait être un facteur limitant», a déclaré M. Champagne lors d’une entrevue avec La Presse Canadienne en décembre.

Il a indiqué que 2023 était l’année «où notre politique industrielle verte prend forme». 

Au cours de l’année, le Canada a annoncé plusieurs nouvelles usines importantes, notamment l’usine de batteries pour véhicules électriques de Volkswagen à St. Thomas, en Ontario, et une nouvelle usine de plastiques de Dow Chemical en Alberta. 

Le fabricant suédois de batteries Northvolt prévoit également construire sa première usine de batteries en Amérique du Nord, à McMasterville, sur la Rive-Sud de Montréal. 

Une importante usine de batteries est aussi en cours de construction à Windsor, en Ontario, par Stellantis et LG Energy Solution. Ces entreprises ont renégocié leur accord avec le gouvernement fédéral l’année dernière afin qu’il soit aussi généreux que celui de Volkswagen, qui prévoit des milliards de dollars de subventions potentielles pour chaque batterie fabriquée.

Selon M. Champagne, pour 2024, l’accent sera mis sur l’augmentation du soutien aux petites et moyennes entreprises qui soutiendront ces mégaprojets, ainsi que sur l’énergie nécessaire pour les faire fonctionner tous.

«Nous nous demandons comment développer davantage l’exploitation minière et le raffinage, a affirmé le ministre. Ce qu’il faut, c’est apporter de l’électricité à ces communautés.»

Une capacité de production limitée

M. Champagne estime que le Canada doit se concentrer dans les mois et les années à venir sur le développement de petits réacteurs nucléaires et l’expansion d’autres sources d’énergie renouvelable, notant que l’énergie est déjà devenue un facteur dans l’approbation des projets.

«Nous avons vu un certain nombre de projets pour lesquels nous devons voir où ils peuvent aller dans le pays, parce que certaines juridictions deviennent limitées en ce qui concerne la capacité de production d’énergie», a-t-il évoqué.

M. Champagne n’a pas identifié les projets en question. Mais son commentaire fait écho à celui du ministre québécois de l’Énergie, Pierre Fitzgibbon, qui a déclaré l’année dernière que le Québec allait devoir faire des choix difficiles.

Dans un discours prononcé en mai devant la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, M. Fitzgibbon avait déclaré que la demande d’électricité augmentait si rapidement que le Québec — qui produit plus d’un tiers de l’électricité totale du Canada — allait épuiser ses excédents d’électricité d’ici à la fin de 2026.

«Nos surplus ont fondu comme des glaciers sous le soleil des changements climatiques», avait dit M. Fitzgibbon. 

Selon lui, la demande augmente si rapidement que la province ne pourra pas dire oui chaque fois qu’un utilisateur industriel demandera plus d’électricité pour s’agrandir ou s’installer au Québec.

Le Canada est déjà l’un des meilleurs pays au monde pour la production d’électricité à partir de sources non polluantes. Au niveau national, plus de 80 % de l’électricité provient de barrages hydroélectriques, de parcs éoliens, de panneaux solaires et de petites quantités d’énergie marémotrice et de biomasse.

Cependant, le gouvernement fédéral prévoit que pour assurer sa transition climatique, le pays aura besoin de deux à trois fois plus d’énergie renouvelable d’ici à 2050.

D’ici à 2035, le Canada entend faire en sorte que 100 % de l’électricité ne soit pas émetteur, c’est-à-dire qu’elle soit produite à partir de combustibles renouvelables ou d’installations utilisant des combustibles fossiles et équipées de systèmes de captage et de stockage du carbone.

Le gouvernement fédéral insiste également pour que les voitures à essence cessent d’être vendues après 2035 et pour que la plupart des véhicules moyens et lourds fonctionnent à l’électricité d’ici à 2040. 

Ottawa fait valoir que les pompes à chaleur électriques sont une meilleure option pour le chauffage domestique que les chaudières traditionnelles au gaz ou au mazout, tout en incitant les grandes entreprises à utiliser moins de combustibles fossiles. 

Une transition sans précédent

Tout cela nécessitera beaucoup plus d’énergie.

Le Régie de l’énergie du Canada prévoit que la demande d’électricité augmentera de près de 50 % au cours des 30 prochaines années, principalement en raison des besoins des véhicules électriques et de la production d’hydrogène.

Le responsable du programme Clean Energy Canada à l’Université Simon Fraser, Evan Pivnick, soutient que l’approvisionnement en électricité du Canada s’est développé très progressivement au fil du temps, et qu’il est soudainement confronté à une expansion massive en l’espace de quelques décennies seulement.

«La réalité est que nous n’avons jamais connu ce type de transition auparavant», expose-t-il. 

Selon M. Pivnick, jusqu’à présent, le système s’est souvent développé en fonction de la demande. Mais le Canada doit maintenant commencer à construire plus d’énergie à offrir aux investisseurs lorsqu’ils cherchent un endroit pour installer un nouveau magasin. 

Cela nécessitera une coordination entre les gouvernements, les services publics et les industries, ce qui n’a pas toujours été le cas jusqu’à présent.

Volkswagen fait partie des entreprises qui ont clairement indiqué avoir choisi le Canada pour sa première usine nord-américaine de batteries pour véhicules électriques l’année dernière, en partie en raison de l’accès à l’énergie renouvelable.

Le ministre Champagne a clairement indiqué que l’énergie propre était pour lui un argument de vente majeur lors de toute conversation avec des investisseurs.

Partager cet article
S'inscrire
Me notifier des
guest
0 Commentaires
Inline Feedbacks
Voir tous les commentaires