Le CIQ recommande au ministère de ne pas devancer la vaccination contre la rougeole

Katrine Desautels, La Presse Canadienne
Le CIQ recommande au ministère de ne pas devancer la vaccination contre la rougeole

MONTRÉAL — Une éclosion de rougeole frappe actuellement le Québec et les bébés de moins d’un an sont parmi les plus vulnérables comme ils ne sont pas vaccinés. Le Comité sur l’immunisation du Québec (CIQ) conseille toutefois au ministère de la Santé de ne pas devancer l’âge de la vaccination puisque cela risque de compromettre l’immunité collective. 

Il y a présentement une transmission communautaire de la rougeole au Québec, l’une des maladies les plus contagieuses au monde. Les complications graves de cette maladie comprennent une encéphalite, une pneumonie et dans un cas sur 3000, la mort. 

Selon les plus récentes données du gouvernement provincial, en date du 24 avril, il y avait 50 cas de rougeole confirmés depuis le début de l’année 2024. 

La vaccination est le meilleur moyen de se protéger contre la rougeole puisqu’il n’existe pas de remède, seulement des traitements en fonction de la complication développée. 

Selon le calendrier vaccinal du Québec, les enfants sont vaccinés contre la rougeole à l’âge de 12 et 18 mois et ils sont protégés à 95 % de cette maladie tout au long de leur vie.

Exceptionnellement, lors de voyages dans des pays où la circulation de la rougeole est préoccupante, les bébés de 6 à 11 mois sont admissibles à une dose de vaccin, indique le Protocole d’immunisation du Québec. 

Le CIQ juge que ces cas de vaccination précoce ne sont pas une menace pour l’immunité collective puisque cela concerne peu d’enfants. 

De plus, cette recommandation a pour but de diminuer le risque d’importation de la rougeole au retour du voyage. «Les nourrissons qui visitent de la famille en pays endémique ou en éclosion importante auront plusieurs contacts rapprochés, les mettant à risque accru de contracter la rougeole et de la rapporter au Québec. Une dose devancée permet donc de diminuer ce risque dans ce contexte particulier», peut-on lire dans l’avis du CIQ. 

Des parents inquiets 

Depuis qu’un premier cas de transmission communautaire a été confirmé au Québec, la santé publique s’est inquiétée d’un faible taux de vaccination dans certaines régions. Elle a lancé une campagne de vaccination ciblée pour tenter de rehausser ces taux. 

La proportion d’individus devant être protégée contre la rougeole afin d’éliminer la transmission communautaire est estimée à environ 95 %.

Dans ce contexte, plusieurs parents s’inquiètent pour leur bébé de moins d’un an non vacciné. L’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) confirme dans un avis que le service Info-Santé a reçu des appels de parents qui souhaitent devancer la vaccination de leur enfant âgé de 10 mois. 

Le ministère de la Santé a été interpellé par les régions pour qu’il donne une orientation sur cette question. Il a mandaté le CIQ pour qu’il évalue les risques et qu’il lui transmette une recommandation. 

Le CIQ a fait savoir que les données suggèrent que «l’efficacité de deux doses de vaccin à long terme est inférieure lorsque la première dose est donnée avant l’âge de 12 mois». 

Il conclut que même avec une couverture vaccinale très élevée, la perte d’efficacité vaccinale peut compromettre la capacité à contrôler la transmission de la rougeole à l’échelle populationnelle. 

De plus, aucune étude ne démontre si deux doses administrées après l’âge de 12 mois compenseraient la perte d’efficacité de la première dose précoce. 

Pour ces raisons, le CIQ conseille au gouvernement de ne pas devancer la première dose de vaccin avant l’âge d’un an. 

Dans sa recommandation au ministère de la Santé et des Services sociaux, le CIQ souligne que la France maintient l’âge de la première dose à un an «malgré une transmission considérée endémique et une incidence de cas plus élevée qu’au Québec». Le Royaume-Uni, qui a récemment déclaré un état d’urgence en lien avec une recrudescence de la rougeole, ne devance pas non plus la première dose chez les nourrissons. 

Le CIQ note toutefois une exception: les Pays-Bas qui ont autorisé lors d’une éclosion de rougeole en 2013-2014 la vaccination chez les 6 à 14 mois dans les communautés où la couverture vaccinale était inférieure à 90 %. Les anticorps chez les enfants ayant reçu une dose précoce étaient significativement inférieurs que ceux ayant reçu une première dose à 14 mois. 

Troisième dose

Le ministère de la Santé s’est demandé si un enfant ayant reçu deux doses de vaccin après l’âge d’un an pourrait être mieux protégé s’il recevait une troisième dose. 

En contexte d’éclosion, la recommandation de vacciner les personnes non adéquatement protégées qui ont été en contact avec un cas de rougeole est maintenue, ce qui inclut les petits âgés de 6 à 11 mois. Les doses reçues avant un an sont alors considérées comme non valides et la vaccination doit être reprise dès l’âge de 12 mois, en respectant l’intervalle minimal de quatre semaines entre les doses, indique le CIQ. 

Il précise que tout individu ayant reçu deux doses de vaccin après l’âge d’un an est protégé contre la rougeole. Il stipule qu’il n’y a pas d’indication de donner une troisième dose si les deux premières doses sont valides. 

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