Des médecins canadiens réclament des actions à la Journée de la santé à la COP28

Jordan Omstead, La Presse Canadienne
Des médecins canadiens réclament des actions à la Journée de la santé à la COP28

TORONTO — Des médecins canadiens comptent profiter de la première Journée de la santé à la COP28  pour demander la mise en place d’une nouvelle agence fédérale dévouée aux effets des changements climatiques sur la santé.

Selon la présidente de l’Association médicale canadienne, Kathleen Ross, les fortes chaleurs de l’été dernier et la pollution de l’air provoquée par les incendies de forêt devraient inciter le gouvernement à organiser une politique à l’échelle du pays.

Ce «secrétariat au climat et à la santé» devrait travailler avec les différents gouvernements afin de mettre une place un système de santé peu polluant permettant de résoudre les problèmes de santé liés aux changements climatiques, dit la Dre Ross.

«Nous reconnaissons que la solution à la crise climatique ne sera pas élaborée dans un seul bureau gouvernemental», ajoute-t-elle.

Pour la première fois depuis le début des conférences sur le climat organisées par l’ONU, la COP28 réservera une de ses journées à santé. La Journée de la santé vise à explorer les liens entre la santé et les changements climatiques. L’Organisation mondiale de la santé considère que le réchauffement est la plus grande menace à la santé du XXIe siècle.

«Les changements climatiques amplifient vraiment les risques pour la santé. C’est le message que nous devons livrer», souligne la Dre Ross, présente à la COP28.

Des médecins et des experts du climat affirment que le Canada est l’un des endroits où on peut constater le plus les effets du réchauffement planétaire sur la santé.

Le dôme de chaleur au-dessus de la Colombie-Britannique en 2021 est lié à la mort de plus de 600 personnes en Colombie-Britannique. Des feux de forêt d’une gravité sans précédent ont rempli l’air de polluants, aggravant les risques à la santé des gens souffrant d’asthme et de maladie cardiaque. L’hôpital de Yellowknife, au Yukon, a dû être évacué l’été dernier à cause d’un feu de forêt qui le menaçait.

Une urgentologue de Yellowknife, la Dre Courtney Howard, dit que si la planète était un patient, il faudrait la transférer dans une salle de traumatologie.

«Supprimer graduellement les carburants fossiles est le plus important traitement», juge celle qui préside la délégation de Société internationale des médecins pour l’environnement à la COP28.

Lier les changements climatiques à une crise sanitaire «change complètement les enjeux», croit la Dre Howard. Cela rend plus tangibles les effets directs sur la santé humaine des aliments que l’on mange et de l’air que l’on respire.

«J’ai une obligation et la responsabilité de prôner des politiques de santé publique qui mettent l’accent sur les changements climatiques. Je dessers une population vulnérable dans un des endroits qui se réchauffent le plus rapidement sur la planète.»

Le Canada doit en faire plus pour s’assurer que le système des soins de santé n’exacerbe pas le problème, fait valoir la Dre Howard. Elle regrette notamment que les gouvernements aient à peine commencé à mettre en vigueur l’entente conclue à la COP26 de Glascow, en Écosse, selon laquelle les signataires s’engageaient à concevoir des soins de santé respectueux du climat.

«Il n’existe même pas des données sur les émissions de gaz à effet de serre. Nous n’avons pas encore de plan pour parvenir à la carboneutralité, dit-elle. D’autres pays sont tellement en avance sur nous qu’ils commencent à nous voler des gens parce que nous n’avons pas de plan et que nous n’avons pas d’emploi pour eux.»

Le secteur des soins de santé compte pour environ 4% de l’ensemble des émissions de GES au pays.

Des médecins soulignent également les effets des changements climatiques sur la sécurité alimentaire, notamment des communautés autochtones éloignées, et sur les personnes itinérantes.

«Les gens vivant dans des conditions de pauvreté ne peuvent peut-être pas s’acheter un climatiseur ou, s’ils en ont un, refusent de le faire fonctionner à cause du prix de l’électricité, note la Dre Samantha Green, la présidente élue de l’Association canadienne des médecins pour l’environnement

«Ce sont des gens qui vivent dans des endroits densément peuplés, dans des quartiers racialisés n’ayant pas assez d’arbres. La température dans ces îlots urbains peut être supérieure jusqu’à 12 degrés de celle des quartiers voisins.»

Tout en appuyant l’idée de créer un secrétariat aux climats et à la santé, la Dre Green espère que cette proposition ne rejettera pas dans l’ombre «l’importance fondamentale d’éliminer progressivement les carburants fossiles.»

«C’est la mesure la plus importante que le Canada peut mettre en place», fait-elle valoir.

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