COP28: «on ne peut pratiquer la politique de la chaise vide», dit Charette

Patrice Bergeron, La Presse Canadienne
COP28: «on ne peut pratiquer la politique de la chaise vide», dit Charette

QUÉBEC — Le Québec ne peut se permettre d’être absent de la COP28, la Conférence des Nations unies sur les changements climatiques à Dubaï, même si le lieu choisi est discutable, reconnaît le ministre de l’Environnement, Benoit Charette. 

Pas question de pratiquer «la politique de la chaise vide», a-t-il plaidé dans une entrevue à La Presse Canadienne publiée samedi, en laissant entendre qu’il ne fera pas d’annonce importante sur place concernant de futurs engagements de son gouvernement. 

Il s’envolera ainsi dimanche vers la pétromonarchie du Golfe persique pour représenter le Québec pendant une semaine au plus important sommet environnemental de l’année. 

«Je vous avoue que ce n’est pas le lieu naturel pour tenir une COP, mais on n’a aucun contrôle» sur le choix de l’endroit, a-t-il admis.

Cet immense rendez-vous où les États conviennent de cibles et de moyens de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) est de plus en plus noyauté par des lobbys des hydrocarbures et de grandes entreprises polluantes, selon des critiques de plus en plus audibles. 

Néanmoins, le Québec doit être présent aux négociations à titre d’État fédéré car les engagements qui s’y prennent ont des conséquences sur les politiques et plans d’action du gouvernement Legault. 

«On ne peut refuser de participer et d’exercer un leadership durant les négociations officielles qui vont se dérouler pour signer des textes internationaux importants. Malgré le lieu qui suscite peu d’enthousiasme, on ne peut se permettre de pratiquer la politique de la chaise vide.»

Le premier ministre François Legault devait se rendre à cette COP, mais a renoncé finalement pour des raisons de sécurité, à la suite du début du conflit entre Israël et la bande de Gaza. 

C’est donc son ministre de l’Environnement qui rencontrera notamment ses homologues des autres États fédérés, des Amériques, d’Europe, pour «échanger sur nos politiques respectives». 

Jeudi, il a fait savoir qu’il souhaite un plan de sortie clair des hydrocarbures dans une entente à l’issue de la COP, avec un calendrier précis. Un document de travail destiné à servir à l’accord final propose actuellement aux États de se prononcer sur une réduction ou une sortie des énergies fossiles, selon ce qui est rapporté par différents médias. 

Marché du carbone

Après avoir longtemps cherché en vain à recruter de nouveaux partenaires pour son système principal de réduction des GES, la bourse du carbone, le Québec a choisi de changer de stratégie, a reconnu M. Charette. 

«On a changé notre fusil d’épaule», a-t-il commenté. Plus question donc de vouloir accroître à tout prix le nombre de joueurs.  

Après le retrait de l’Ontario en 2018, un nouveau joueur devrait s’ajouter d’ici un à deux ans à la Californie et au Québec dans ce marché, soit l’État de Washington, si les négociations continuent de bien se dérouler. 

«Ça va dans la bonne direction», a précisé M. Charette.

Le marché du carbone est un système de plafonnement et d’échange (SPEDE) des droits d’émissions de GES entre grands émetteurs. Le plafond maximal diminue d’année en année et les entreprises sont encouragées à réduire davantage leurs émissions pour ensuite revendre des crédits carbone à d’autres entreprises qui n’y arrivent pas.  

Il y a des États aspirants qui voudraient éventuellement se joindre au marché du carbone, mais «le danger est double», a expliqué M. Charette.

De un, on n’est pas tout à fait certain de la réduction des émissions qui se sont réellement concrétisées chez les États qui songent à adhérer, alors qu’avec la Californie, les protocoles sont bien établis et on peut faire confiance au partenaire, a-t-il détaillé.

De deux, le Québec viendrait accroître son déficit commercial puisque les entreprises d’ici achètent davantage des crédits carbone à la Californie qu’elles n’en vendent. 

«Donc le but est davantage d’aller chercher des partenaires qui veulent acheter nos crédits qu’on est en mesure de vendre», a résumé M. Charette. 

Rappelons que la COP28 s’inscrit dans la continuité de l’accord de Paris de 2015, qui vise à réduire les émissions de GES afin de limiter à un maximum de 2 degrés Celsius, voire idéalement à 1,5 degré, la hausse moyenne globale de la température par rapport à l’époque pré-industrielle. 

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