Colombie-Britannique: un militaire jugé en cour martiale pour ses propos anti-vaccin

Dirk Meissner, La Presse Canadienne
Colombie-Britannique: un militaire jugé en cour martiale pour ses propos anti-vaccin

VICTORIA — La lutte d’un réserviste de l’armée pour s’opposer aux exigences vaccinales imposées aux membres des Forces armées canadiennes pendant la pandémie de COVID-19 a frôlé la mutinerie et aurait pu déclencher des manifestations similaires à la prise d’assaut du Capitole des États-Unis en janvier 2021, a entendu mercredi une cour martiale en Colombie-Britannique.

L’adjudant James Topp, un ancien soldat comptant plus de 30 ans de service pour le Canada, y compris de multiples déploiements en Croatie, en Afghanistan et dans d’autres zones de guerre, devrait être sévèrement puni pour avoir utilisé son grade et son uniforme militaires pour contester publiquement les exigences vaccinales imposées aux militaires, a fait valoir le procureur au dossier, le major Ben Richard, à la cour martiale.

«Nous appelons ce tribunal à prononcer une peine sévère, a déclaré Me Richard. Il s’agit d’un adjudant expérimenté et chevronné qui utilise son grade et son uniforme pour contester publiquement sa chaîne de commandement et son gouvernement démocratiquement élu.»

M. Topp, 52 ans, qui a refusé de se faire vacciner, devrait connaître sa sentence jeudi.

Il a plaidé coupable mardi à deux accusations de conduite préjudiciable au bon ordre et à la discipline. Les charges contre lui étaient liées à deux vidéos qu’il a publiées sur les réseaux sociaux dans lesquelles il critiquait les exigences vaccinales pour le personnel militaire alors qu’il portait son uniforme de service.

M. Topp risque une peine maximale de licenciement avec disgrâce, mais son avocat, Phillip Millar, a déclaré que son client devrait bénéficier d’une libération inconditionnelle de l’armée ou de «l’amende la plus basse possible».

«Je comprends qu’il y ait des pressions pour faire un exemple de cet homme de l’unité (de réserve) des Forces armées canadiennes, a déclaré Me Millar. Mon travail consiste à apporter un peu de compassion et de compréhension sur le contexte. Si je ne parviens pas à vous convaincre de la pertinence d’une absolution inconditionnelle, je vous demanderais d’infliger l’amende la plus basse possible.»

Près d’une mutinerie

Lors de son témoignage, M. Topp a raconté qu’il était sur le point de se suicider, en novembre 2021, après avoir été suspendu avec solde de son emploi dans la fonction publique fédérale à la Gendarmerie royale du Canada (GRC). Il faisait alors face à des accusations pour sa position anti-vaccin de la part de son unité de réserve, le Royal Westminster Regiment à New Westminster, en Colombie-Britannique.

Il a soutenu qu’il avait décidé de s’exprimer publiquement contre les exigences vaccinales, ce qui a abouti à la publication de deux vidéos sur les réseaux sociaux et à une marche vers Ottawa.

Me Richard a déclaré que tous les membres des Forces armées canadiennes (FAC) ont le devoir de suivre les ordres à moins qu’ils ne soient «manifestement illégaux».

«C’est la norme juridique que tous les membres des FAC sont censés connaître», a-t-il noté. 

«Il n’y a pas de place à l’interprétation. Les FAC visent à faire passer le pays avant soi. Il s’agit de servir le Canada en temps de crise, ce qu’était certainement la pandémie de COVID-19.»

Me Richard a affirmé que les appels de M. Topp aux membres de l’armée et au public à se joindre à ses manifestations les exigences vaccinales «se rapprochaient très près de la définition juridique d’une mutinerie».

Il a demandé à la cour martiale d’envisager la possibilité pour M. Topp de convaincre les membres de l’armée de soutenir son défi, affirmant que le résultat aurait pu être similaire à l’attaque des manifestants contre le Capitole américain, le 6 janvier 2021.

Me Richard a rejeté les suggestions selon lesquelles le cas de M. Topp concernait la question de la liberté d’expression.

Pas en uniforme

M. Topp était libre de manifester en tant que citoyen civil, mais pas en tant que membre des Forces armées portant un uniforme militaire, a déclaré Me Richard.

«Il savait que ce qu’il faisait aurait des conséquences importantes et il était prêt à y faire face, a-t-il mentionné. Une absolution inconditionnelle n’est pas une conséquence.»

Me Millar, de son côté, a rappelé que M. Topp avait admis avoir réalisé des vidéos, remis en question les politiques et encouragé les gens à manifester, mais il en était également venu à représenter les préoccupations d’innombrables Canadiens frustrés par les exigences vaccinales.

«Il y a un contexte qui peut être pris en compte dans ce scénario particulier, car je pense que M. Topp est une personne tout à fait unique», a souligné Me Millar.

Il était «plutôt offensant» de comparer les manifestations anti-vaccin de M. Topp avec «la colère, le vitriol et le manque de réflexion» des manifestations américaines du 6 janvier 2021, a-t-il ajouté.

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