Le Roman québécois

Le Roman québécois

Face à l’incrédulité de certains sur le fait que, semaine après semaine depuis 1976, je traite de livres publiés au Québec, dont de nombreux romans, je brandirai sous leurs yeux l’essai de Michel Biron, Le roman québécois (Boréal, coll. «Boréal express»), remarquable synthèse de l’histoire du genre depuis le 19e siècle.

Professeur de littérature québécoise à l’Université McGill, Michel Biron a, entre autres, collaboré à l’Histoire de la littérature québécoise (Boréal, 2007), travail immense devenu essentiel à la compréhension de notre institution littéraire.

On le sait, le roman est le genre littéraire préféré des lecteurs depuis plusieurs décennies. Si bien qu’aujourd’hui, il se décline en plusieurs sous-genres: du roman historique au polar, du merveilleux (fantasy) aux histoires de filles, de l’autofiction à la science-fiction, sans oublier les récits traditionnels.

Le roman québécois nous guide dans un voyage dans le temps à la rencontre des auteurs et des œuvres de fiction narrative, tout en rappelant les moments forts de l’histoire nationale. Ce parcours se fait en cinq étapes, chacune initiée par des remarques de l’essayiste portant sur l’évolution du genre, ses pratiques, ceux qui s’y adonnent, leur art ou leur originalité.

Il est d’abord question du «roman entre l’histoire et le conte, de 1837 à 1916», notamment de L’influence d’un livre de Philippe Aubert de Gaspé fils – premier roman de notre patrimoine – aux Anciens Canadiens (1863) de Philippe Aubert de Gaspé père et Angéline de Montbrun (1884) de Laure Conan (pseudonyme de Félicité Angers), en passant par les romans de Chauveau et Gérin-Lajoie. Ce sont là des récits fondateurs qui, bien qu’influencés par la littérature française de l’époque, n’en demeurent pas moins les assises de l’univers romanesque québécois.

Entre 1916 et 1945, le roman tend vers le réalisme, cette «conception selon laquelle l’écrivain ne doit pas chercher à idéaliser le monde et les hommes, mais doit s’attacher à les représenter tels qu’ils sont.» Chez nous, le «roman de la terre» a marqué cette époque; il célébrait la tradition et l’enracinement des valeurs traditionnelles. Parmi les incontournables de cette génération, il y a bien sûr Maria Chapdelaine, Menaud, maître-draveur, Un homme et son péché, etc.

De 1945 à 1960, l’individu prend le dessus sur le territoire, et la ville s’installe au cœur des histoires, effets collatéraux de la Deuxième Guerre. Les grands romanciers ont pour nom Gabrielle Roy, Roger Lemelin et André Langevin. Comme le fait remarquer Biron: «Centré sur l’individu, le roman canadien-français élargit à partir de 1945 le projet réaliste de la décennie précédente et l’ouvre aux nouvelles conditions sociales, liées à la vie urbaine et à l’essor de la bourgeoisie.»

Au cours des années 1960 à 1980, le roman surfe sur la vague de la Révolution tranquille. Qu’on pense aux œuvres de Godbout, Aquin, Ferron, Ducharme, Beaulieu. «Le roman parle le langage de son époque, il en adopte la liberté créatrice, le lyrisme, la frénésie, le désordre jubilatoire, mais aussi la crainte de l’échec et le vertige devant l’Histoire.»

Enfin, de 1980 à aujourd’hui, outre le fait que la production annuelle a décuplé, «passant d’environ 25 à plus de 200, le roman contemporain résiste à tout effort de synthèse». Le roman «littéraire» est souvent bien accueilli du lectorat; pensons à Tremblay, Poulin, Jacob ou Laberge. Quant aux grands projets romanesques dont on rêvait autrefois, il reste toujours celui de VLB.

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