Tennis: La Coupe Billie-Jean-King a donné du lustre à une année ardue pour le Canada

Michel Lamarche, La Presse Canadienne
Tennis: La Coupe Billie-Jean-King a donné du lustre à une année ardue pour le Canada

En novembre 2022, le Canada a soulevé la coupe Davis pour la première fois de son histoire, beaucoup grâce à Félix Auger-Aliassime. Un an plus tard, l’une de ses compatriotes l’a imité et a propulsé le pays au sommet de la pyramide du tennis féminin mondial, procurant un baume salutaire à une saison parsemée d’embûches pour les joueurs canadiens en 2023.

Cette compatriote, c’est la Lavalloise Leylah Fernandez. Le baume, c’est le triomphe du Canada lors des Finales de la Coupe Billie-Jean-King – le premier de son histoire – face à l’Italie, le 12 novembre en Espagne.

Indéniablement, ce fut l’événement marquant de l’année de tennis au Canada, et la Québécoise de 21 ans y a campé le rôle principal.

Lors des quatre matchs auxquels elle a participé en simple à Séville, Fernandez n’a concédé qu’une seule manche, contre la Tchèque Marketa Vondrousova, alors septième au monde, en demi-finale, le samedi 11 novembre.

Moins d’une heure après sa victoire contre Vondrousova, Fernandez et Gabriela Dabrowski ont mené le Canada à la grande finale grâce à une victoire en deux manches face au redoutable tandem formé de Barbora Krejcikova et Katerina Siniakova, lauréates de sept titres en tournois du Grand Chelem, ensemble, en double.

À tout seigneur, tout honneur, c’est à Fernandez qu’est revenu le mandat d’aller récolter la victoire ultime, le lendemain contre l’Italie, en grande finale. Elle s’est acquittée de cette tâche avec panache en dominant Jasmine Paolini 6-2, 6-3.

Cinq semaines plus tard, il arrive encore à Fernandez de penser à ce moment historique. Au-delà de ses propres performances, la Lavalloise se rappelle aussi de l’environnement dans lequel elle a baigné à Séville.

«On a passé beaucoup de bon temps, il y a eu beaucoup de blagues. Mes coéquipières sont très fortes, j’ai eu l’opportunité d’apprendre beaucoup d’elles», a noté Fernandez lors d’une mêlée de presse mardi midi au stade IGA.

«Comme joueuse, chaque fois que je joue pour l’équipe canadienne, je suis très fière et j’essaie de toujours bien jouer. J’ai aussi l’opportunté de partager le banc avec la capitaine Heidi (El Tabakh) et Heidi m’aide beaucoup dans les moments difficiles. La positivité que je reçois de l’équipe m’aide dans les moments difficiles et je pense que c’est à cause de ça que j’ai beaucoup de succès à la Coupe Billie-Jean-King.»

La victoire de Fernandez, sa 16e en 19 matchs en carrière à cette compétition, est venue couronner une semaine inoubliable pour le Canada. Une semaine à laquelle avait notamment contribué la Montréalaise Eugenie Bouchard, gagnante de deux matchs en double avec Dabrowski durant la phase de groupe.

Aussi, il y avait eu Marina Stakusic, une inconnue alors âgée de 18 ans et classée 258e, qui a remporté trois matchs sur quatre en simple, tous contre des rivales du top-70.

«Ç’a été une semaine vraiment extraordinaire. Je pense que les filles étaient très motivées et ont voulu faire comme les garçons (en 2022). Elles savaient que c’était possible», a analysé Guillaume Marx, chef de la performance au sein de Tennis Canada, dans une entrevue avec La Presse Canadienne.

«Après, a-t-il enchaîné, il faut un alignement des étoiles, et les étoiles se sont alignées avec Leylah qui a joué top-10 cette semaine-là; avec une excellente joueuse de double (Dabrowski) qui venait de gagner un Grand Chelem et qui était donc en confiance; avec le fait qu’on a sorti une Marina Stakusic qui a fait, je pense, l’un des exploits les plus incroyables que j’ai jamais vus.»

Soudainement, dans un scénario que personne n’aurait osé imaginer il y a cinq ans à peine, le Canada était le champion en titre des deux tournois en équipe les plus prestigieux du tennis.

Environ deux semaines plus tard, les Canadiens avaient l’occasion de maintenir cette double suprématie lors de la phase finale de la Coupe Davis, en Espagne.

Toutefois, en l’absence d’Auger-Aliassime et de Denis Shapovalov, tous deux blessés, la délégation canadienne a baissé pavillon face à la Finlande en quarts de finale, malgré une belle victoire en simple du vétéran Milos Raonic, que l’on a revu sur les courts en 2023 après une absence de deux ans.

Dans les faits, la participation du Canada à cette phase finale de la Coupe Davis semblait hors de portée.

Environ deux mois plus tôt, à Bologne, le capitaine canadien Frank Dancevic avait également dû se passer d’Auger-Aliassime et de Shapovalov lors de la phase de groupe.

Toutefois, les jeunes Gabriel Diallo et Alexis Galarneau ainsi que le vétéran Vasek Pospisil ont pris le relais en gagnant huit matches sur neuf contre l’Italie, la Suède et le Chili, et assuré au Canada une place à la phase finale.

Des obstacles

Le Canada a réussi d’autres bons coups sur la scène du tennis en 2023, mais ils ont été peu nombreux et, en général, tardifs.

En octobre, Auger-Aliassime a défendu avec succès son titre au tournoi de Bâle, et Fernandez a gagné un troisième tournoi en simple en carrière, à Hong Kong.

Fernandez a aussi pris part à deux finales en double avec l’Américaine Taylor Townsend, dont celle des Internationaux de France.

Et en septembre, Dabrowski est devenue la première Canadienne à conquérir un titre en double féminin à un tournoi du Grand Chelem, lors des Internationaux des États-Unis.

Pour le reste, on a eu droit à des glissades au classement qui n’ont pas épargné les athlètes les plus en vue du tennis canadien.

Après une fin prometteuse en 2022 qui lui avait permis de se hisser au sixième rang de la hiérarchie du tennis masculin, Auger-Aliassime se retrouve 29e au classement mondial.

En tournois du Grand Chelem en 2023, il n’a gagné que trois matchs sur sept, tous en Australie, en janvier. À Roland-Garros, à Wimbledon et à Flushing Meadows, il a été éliminé chaque fois en première ronde.

À l’Omnium Banque Nationale, à Toronto, en août, Auger-Aliassime a aussi plié l’échine dès son premier match.

«Je pense qu’il a été très importuné par (sa blessure à) son genou. Il a traîné ça toute la saison», a souligné Marx au sujet du Montréalais.

«Aujourd’hui, ce qu’il faut comprendre, a-t-il ajouté, c’est que les marges sont tellement petites sur le circuit que si tu n’es pas à 100 %, tu ne peux pas te maintenir au plus haut niveau. C’est aussi simple que ça. Je ne juge pas ce qui s’est passé. Je pense qu’il a été vraiment pénalisé.»

Les blessures ont aussi coupé court aux saisons de Denis Shapovalov (genou) et de Bianca Andreescu (dos).

De 18e au classement en début d’année, Shapovalov, inactif depuis Wimbledon, a chuté jusqu’au 109e rang, le repoussant hors du top-100 pour la première fois depuis août 2017.

Andreescu, dont le dernier match en 2023 a eu lieu en première ronde à l’Omnium Banque Nationale, à Montréal, s’est hissée au 27e rang en avril avant d’aboutir au 95e échelon à deux semaines de la nouvelle année.

Ce fut également compliqué pour Fernandez qui s’est retrouvée au 96e échelon en simple, à la fin de juin, après avoir entamé l’année en 40e place.

«Au niveau individuel, au milieu de l’année, tout le monde a un petit peu reculé. C’était difficile», a admis Marx, lorsqu’il a été invité à brosser un portrait de l’année qui s’achève.

«Finalement, il y a eu de bonnes choses. Dabrowski qui gagne en double aux Internationaux des États-Unis, Leylah qui remonte petit à petit à partir de l’été et qui finit 35e. On a fait une fin de saison incroyable avec la Coupe Billie-Jean-King et Félix qui gagne à Bâle. Les joueurs ont bien récupéré en fin de saison. J’espère maintenant que tout le monde va être en santé pour attaquer une année 2024 complète.»

Djokovic intouchable?

Au niveau international, le Serbe Novak Djokovic et la Polonaise Iga Swiatek entameront la nouvelle année au premier rang de l’ATP et la WTA, respectivement.

Chez les dames, les aspirantes sont nombreuses avec, entre autres, la Biélorusse Aryna Sabalenka et les Américaines Coco Gauff, championne des Internationaux des États-Unis, et Jessica Pegula, gagnante à Montréal en 2023.

De son côté, Djokovic semble bien en selle, au point où le Grand Chelem calendaire est à sa portée.

«Il est encore là, il va être encore là longtemps», croit Marx.

«Ça fait 20 ans qu’il prépare son corps pour être là le plus longtemps possible et il recueille les fruits aujourd’hui. Il joue à un niveau absolument incroyable. On a l’impression qu’il progresse encore. Je ne vois pas comment il va disparaître dans les trois prochaines années», a-t-il enchaîné. 

L’autre question en 2024 sera de savoir à quoi ressemblera le retour de Rafael Nadal. Les premiers tournois en Australie nous en donneront peut-être un indice.

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