Québec investira 603 millions $ sur cinq ans pour protéger le français

Coralie Laplante, La Presse Canadienne
Québec investira 603 millions $ sur cinq ans pour protéger le français

MONTRÉAL — Québec investira 603 millions $ sur une période de cinq ans pour contrer le déclin du français au Québec, a annoncé dimanche le ministre de la Langue française, Jean-François Roberge, dans le cadre de la présentation de son plan pour protéger le français dans la province. 

Il était accompagné par la ministre de l’Immigration, Christine Fréchette, le ministre de la Culture, Mathieu Lacombe,  la ministre de l’Enseignement supérieur, Pascale Déry, le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville et la ministre des Relations internationales, Martine Biron, qui font tous partie du Groupe d’action pour l’avenir de la langue française. 

«Dans le contexte budgétaire difficile qui est le nôtre, ça démontre d’un très grand engagement de la part du gouvernement», a affirmé d’emblée le ministre Roberge. 

Le Plan pour la langue française de Québec inclut neuf priorités, desquelles découlent 21 mesures, dont certaines ont déjà été annoncées par le gouvernement. 

D’abord, 18 millions $ seront accordés à un suivi annuel des indicateurs de la situation linguistique au Québec, en partenariat avec l’Institut de la statistique du Québec (ISQ). 

«À partir de maintenant, chaque année, les Québécois auront un état de la situation fiable et incontestable. Chaque année, le gouvernement aura donc le devoir de s’ajuster, et nous nous engageons à le faire», a affirmé M. Roberge. Le ministre a précisé qu’une prochaine annonce sera effectuée pour dévoiler les détails du «tableau de bord» qui sera réalisé par l’ISQ. 

Les différents ministres se sont adressés aux médias à la suite de M. Roberge pour présenter les priorités qui relèvent de leur ministère. En ce qui concerne l’immigration, le Plan pour la langue française propose d’augmenter le pourcentage de personnes issues de l’immigration économique connaissant le français et d’accélérer l’obtention de la résidence permanente pour les étudiants internationaux diplômés des programmes francophones. De plus, 320 millions $ seront destinés à augmenter la francisation des travailleurs étrangers temporaires. 

«On veut propulser le français, et ça, dans toutes les dimensions possibles», a fait valoir la ministre Fréchette. 

Le plan de Québec dédie aussi 64,9 millions $ à l’amélioration de la maîtrise du français des élèves québécois. Pour ce faire, le ministère de l’Éducation prévoit notamment d’actualiser les programmes d’études du français et de sensibiliser les élèves à la lecture. 

«On se doit de donner le goût à nos enfants de parler le français, a affirmé le ministre Drainville. Les membres de nos équipes écoles, par exemple, ont une responsabilité de rappeler constamment aux élèves l’importance de parler en français dans les classes, dans les corridors, dans les cours d’école, dans les activités parascolaires.»

Le ministère de l’Enseignement supérieur a pour sa part comme priorité d’attirer et de retenir un plus grand nombre d’étudiants internationaux francophones. La ministre Déry a précisé que la hausse des droits de scolarité pour les étudiants hors Québec et de l’international s’inscrit dans cette optique. 

Du côté de la culture, le plan dédie 187,3 millions $ à l’augmentation de l’offre culturelle francophone et à son accessibilité, en améliorant notamment les conditions de productions des œuvres audiovisuelles québécoises, a indiqué le ministre Lacombe. 

«Il faut les produire avec des moyens qui sont plus importants, parce qu’on est en compétition avec des produits culturels de partout sur la planète», a dit M. Lacombe. 

«Quand on est capable de compétitionner avec ce qui se fait ailleurs sur la planète, encore faut-il que nos jeunes, nos moins jeunes les découvrent, ces produits-là, sur les plateformes numériques», a-t-il poursuivi. 

Le plan de Québec a également comme priorité d’augmenter la disponibilité des œuvres québécoises sur les plateformes numériques. Le ministre de la Culture a rappelé qu’il déposera «prochainement un projet de loi qui vise à garantir notre droit fondamental à l’accès et à la découvrabilité des contenus culturels de langue française dans l’environnement numérique». 

Enfin, Québec octroie 12,8 millions $ pour «renforcer l’attachement des Québécois à la langue française et favoriser son rayonnement». Le gouvernement prévoit, entre autres, promouvoir la recherche et les publications scientifiques en français ainsi qu’augmenter les efforts de communication en matière de langue française. 

Des réactions

La députée de Québec solidaire, Ruba Ghazal, a salué le plan d’action du gouvernement, en apportant quelques bémols. 

«Je suis par contre très déçue de l’absence de mesures structurantes pour renforcer le français comme langue du travail, l’indicateur le plus important que le ministre Roberge devrait suivre pour mesurer la vitalité de notre langue. Les ministres du Travail et de l’Emploi ne faisaient pas partie du groupe de travail du ministre Roberge, et ça paraît», a affirmé Mme Ghazal, dans une déclaration écrite. 

Le député péquiste Pascal Bérubé a également réagi au plan dans une publication sur le réseau social X. «L’annonce de ce matin n’avait rien d’un plan pouvant freiner ou inverser la déclin du français, mais tout d’une opération de relations publiques.  Nous sommes à un moment critique de notre histoire où la protection du français nécessite de réelles mesures qui pourront inverser la tendance du déclin», a-t-il écrit. 

La porte-parole du Parti libéral en matière de langue française, Madwa-Nika Cadet, est plus virulente. Pour elle, le plan ne présente rien de bien nouveau. Elle déplore le retard du gouvernement pour l’annoncer et le manque  d’échéancier. Elle lui reproche aussi un manque de financement pour la maîtrise à l’école et l’absence de mention pour le cégep et l’université.

L’Association québécoise de l’industrie du disque (ADISQ) s’est pour sa part réjouie du dépôt du plan. 

« À l’ADISQ, nous sommes animés par la conviction que nos musiques constituent un formidable outil pour la protection, la promotion et la vitalité de la langue française dans un contexte culturel unique. Nous sommes heureux de voir ce rôle reconnu dans ce plan et je félicite le Groupe d’action pour l’avenir de la langue française pour son travail » a souligné Eve Paré, directrice générale de l’ADISQ, par voie de communiqué. 

Partager cet article
S'inscrire
Me notifier des
guest
0 Commentaires
Inline Feedbacks
Voir tous les commentaires