Les distilleries et les brasseurs veulent une baisse de la taxe d’accise

Sarah Ritchie et Jordan Press, La Presse Canadienne
Les distilleries et les brasseurs veulent une baisse de la taxe d’accise

OTTAWA — Les producteurs d’alcool espèrent que le gouvernement fédéral réduira la taxe d’accise dans son prochain budget.

Les spiritueux, le vin, les produits du tabac et les produits du cannabis produits au Canada sont assujettis à la taxe d’accise qui est ajustée chaque année, le 1er avril. Celle-ci a augmenté une nouvelle fois, vendredi.

Le comité permanent des Finances de la Chambre des communes a récemment recommandé que le gouvernement fédéral «adopte un système de taxe d’accise progressive, à l’instar de [celui aux] États-Unis, afin d’aider les petits distillateurs canadiens et les autres producteurs d’alcools artisanaux à tirer leur épingle du jeu au Canada et à l’étranger».

La recommandation a été saluée par les microbrasseurs du pays.

«Le comité a compris que nos taux de la taxe d’accise étaient complètement déjantés, surtout si on les compare avec ceux en vigueur aux États-Unis et dans d’autres pays, dit le directeur général de l’Association des microbrasseries canadiennes, Rick Dalmazzi. Il nous a entendus. Le gouvernement le fera-t-il cette année ? Ça, c’est une autre question.»

Le Congrès des États-Unis a modifié la taxe d’accise pour les importateurs de bière et les brasseurs en 2017.

Selon le groupe américain Beer Institute, 99 % des brasseries ont bénéficié d’une réduction de moitié de leur taxe d’accise à cause de la baisse importante du taux pour les petits producteurs. Les brasseurs les plus importants n’ont obtenu qu’une baisse de trois pour cent.

Au Canada, observe M. Dalmazzi, environ 1000 des 1200 microbrasseries produisent moins de 2000 hectolitres de bière par année.

«Quelle que soit la taille de la brasserie, on paie la taxe d’accise à un certain taux. Celui-ci augmente en fonction des hectolitres produits.»

Mais les taux de taxation inférieurs sont limités à une production de 75 000 hectolitres, un volume en apparence inatteignable lorsque le système a été mis en place il y a 15 ans.

Aujourd’hui, les microbrasseries les plus importantes peuvent produire environ 200 000 hectolitres, et même plus.

«Celles de taille moyenne et les plus importantes veulent prendre de l’expansion, ajoute M. Dalmazzi. La taxe d’accise, particulièrement le taux supérieur, leur nuit vraiment.»

Vignobles

L’ensemble des vignobles canadiens devront face à une augmentation de leurs dépenses à compte de juin. Ils ne seront plus exemptés de la taxe d’accise pour la première fois depuis 16 ans.

Le tout résulte d’une dispute commerciale avec l’Australie. Ce pays s’est plaint à l’Organisation mondiale du commerce que cette exemption était discriminatoire pour le vin importé.

Le Canada a accepté de remettre en vigueur la taxe d’accise pour les vignobles à compter de juin 2022.

En 2021, le gouvernement a réservé 101 millions $ sur deux ans pour la mise en œuvre d’un programme pour le secteur viticole afin de l’aider à contrer cette dépense supplémentaire.

«On aimerait bien voir les modalités du programme», lance la pdg d’une association des vignobles de l’Ontario, Grape Growers of Ontario, Debbie Zimmerman.

Elle ajoute que le secteur souhaite que ce programme soit prolongé pendant 10 autres années. «Nous avons besoin d’une certaine stabilité pour l’avenir.»

La pandémie a provoqué de l’incertitude chez les quelque 700 vignobles de l’Ontario, du Québec, de la Colombie-Britannique et de la Nouvelle-Écosse, qui comptent beaucoup sur les touristes-consommateurs.

Plusieurs vignobles n’ont pu engager un nombre suffisant de travailleurs étrangers pendant la pandémie, mentionne Mme Zimmerman. Les producteurs ont dû faire face à des problèmes auxquels ils n’étaient pas habitués.

«Habituellement, après une mauvaise récolte, on se dit que cela va finir par s’arranger. Ce ne fut pas le cas avec la pandémie, car elle est demeurée en place, année après année.»

La levée des mesures restrictives a semé un peu d’espoir au sein de ce secteur. Les marges de profit demeurent minces pour plusieurs petits producteurs. On s’inquiète que la hausse des coûts soit refilée aux consommateurs, faisant en sorte que les produits canadiens deviennent moins concurrentiels. Cela pourrait provoquer des fermetures.

Le cabinet de la ministre des Finances Chrystia Freland n’a pas répondu à une question concernant la recommandation du comité permanent des Finances.

Un porte-parole du ministère de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire se contente de dire que le gouvernement collabore avec vignobles pour mettre en place le programme d’aide. Plus de renseignements seront bientôt dévoilés.

Des députés de l’opposition ont présenté cette semaine des projets de loi pour modifier la Loi sur l’accise et la Loi de 2001 sur l’accise.

Le conservateur Pat Kelly souhaite que l’ajustement automatique annuel des droits applicables à la bière, à la liqueur de malt, aux spiritueux et au vin, soit éliminé. Il demande aussi une baisse des taux.

«Cette taxe qui augmente sans cesse nuit au plaisir de prendre une bière avec des amis ou d’ouvrir une bouteille de vin au dîner, et rend ce plaisir de plus en plus inabordable pour les travailleurs canadiens qui doivent déjà composer avec une crise de l’inflation», a-t-il déclaré à la Chambre des communes, jeudi.

De son côté, le député néo-démocrate Richard Cannings veut éliminer la taxe d’accise pour les bières artisanales non alcoolisées.

«Aucun des principaux partenaires commerciaux du Canada n’applique une taxe d’accise sur la bière à faible teneur en alcool», a-t-il fait état.

Les deux projets de loi ont franchi l’étape de la première lecture.

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