Le Parti québécois remporte l’élection partielle dans Jean-Talon, à Québec

Caroline Plante, Patrice Bergeron et Thomas Laberge, La Presse Canadienne
Le Parti québécois remporte l’élection partielle dans Jean-Talon, à Québec

QUÉBEC — Le candidat du Parti québécois (PQ), l’avocat Pascal Paradis, a causé la surprise, lundi, en arrachant à la Coalition avenir Québec (CAQ) la circonscription de Jean-Talon, à Québec.

Le chef de la CAQ et premier ministre François Legault a pris l’entière responsabilité de ce revers significatif.

Il s’agit d’une victoire historique, puisque jamais un candidat péquiste n’a été élu dans Jean-Talon. En fait, avant que la CAQ s’en empare, la circonscription était considérée comme une forteresse libérale, les élus libéraux s’y succédant de 1965 à 2019.

Dès le début de la soirée, M. Paradis, qui succède à la caquiste Joëlle Boutin, prenait les devants et affichait une avance quasi insurmontable. Après dépouillement de 57 boîtes de scrutin sur 163, il avait acquis 44 % du vote et une confortable majorité de 4105 voix.

Les résultats préliminaires ont provoqué des cris de joie chez les sympathisants péquistes qui étaient réunis dans un restaurant de la capitale nationale, alors que l’ambiance au local électoral de la CAQ était funèbre; les ministres qui étaient présents avaient l’air sonnés.

Le PQ n’avait pas gagné d’élection complémentaire depuis décembre 2016. Presque entièrement rayé de la carte, il ne comptait que sur trois députés à l’Assemblée nationale, avant qu’un vent de sympathie ne le propulse récemment dans les sondages d’opinion.

La formation de Paul St-Pierre Plamondon a fait campagne dans Jean-Talon sur le thème des promesses brisées de la CAQ, notamment l’abandon de l’engagement phare de construire un troisième lien autoroutier entre Québec et Lévis. 

Peu après 21 h, accompagné de son candidat victorieux, M. St-Pierre Plamondon a pris la parole, en déclarant que la CAQ, qui avait manqué de «transparence» dans plusieurs dossiers, recevait là un «avertissement bien mérité».

«Ce soir, chers amis, nous avons fait la démonstration hors de tout doute que le CAQ n’est plus invincible. Nous avons démontré clairement aux Québécois que la CAQ pouvait être vaincue et qu’un seul parti est en mesure d’y arriver, le PQ», a lancé le chef péquiste sous un tonnerre d’applaudissements.

On comptait au total 10 candidats.

M. Paradis affrontait Marie-Anik Shoiry de la CAQ, Olivier Bolduc de Québec solidaire (QS), Élise Avard Bernier du Parti libéral du Québec (PLQ) et Jesse Robitaille du Parti conservateur du Québec (PCQ).

Le candidat péquiste a finalement récolté 44,06 % des appuis, devant Mme Shoiry de la CAQ (21,33 %), M. Bolduc de QS (17,50 %), Mme Avard Bernier du PLQ (8,85 %) et M. Robitaille du PCQ (6,07 %).

La cheffe de Climat Québec, l’ex-ministre péquiste Martine Ouellet, figurait aussi sur les bulletins de vote. Elle a reçu 1,20 % des appuis.

Saluant la victoire de Pascal Paradis, M. Legault a pris le blâme pour la défaite. S’adressant à sa candidate, il a déclaré: «Marie-Anik, tu n’as pas perdu. C’est la CAQ et moi qui avons perdu.»

Il s’est engagé à mieux répondre aux priorités des gens de Québec.

«(Ils) nous ont envoyé un message (…) pour nous dire: «Vous devez faire un examen de conscience». C’est ce qu’on va faire. J’ai bien l’intention dans les prochains mois de rebâtir ce lien de confiance avec les gens de Québec», a affirmé M. Legault.

Un électeur sur cinq avait voté par anticipation. Selon Élections Québec, le taux de participation final s’est établi à 55,21 %. Lors de la dernière élection partielle dans Jean-Talon, en 2019, le taux de participation avait été de 49,2 %.

Le comté de Jean-Talon comprend principalement les arrondissements de Sainte-Foy et Sillery. Près de 93 % des gens qui y habitent parlent français à la maison; la moyenne d’âge est de 42,6 ans et le revenu moyen des ménages est de 133 000 $.

Près de 25 % des citoyens de la circonscription détiennent un baccalauréat, et 22,9 % ont un diplôme universitaire supérieur au baccalauréat (comparativement à 8,9 % à l’échelle du Québec).

Chaude lutte sur le terrain

Cette campagne électorale a été une lutte serrée sur le terrain entre la CAQ et le PQ.

On a notamment appris que M. Paradis avait déjà discuté avec la CAQ de la possibilité de se présenter comme candidat dans la circonscription de Charlevoix–Côte-de-Beaupré avant les élections générales de l’an dernier.

Durant la campagne, M. St-Pierre Plamondon a également annoncé qu’il reportait jusqu’au 23 octobre la publication de son budget d’un Québec souverain, même si un local avait déjà été réservé pour septembre et que le budget était déjà prêt à être présenté.

Il disait vouloir se consacrer sur des sujets comme le coût de la vie, ce que la publication du budget empêcherait.

Malgré sa deuxième place dans cette circonscription en 2022, QS a eu davantage de mal à faire entendre sa voix dans ce duel CAQ-PQ, étant éclaboussé par quelques controverses au passage.

D’abord, la direction de QS s’était rangée derrière une candidate à l’investiture, Christine Gilbert, mais les membres ont eu le dernier mot en choisissant de nouveau M. Bolduc, qui en était à sa troisième tentative de se faire élire dans cette circonscription.

Aussi, QS a essuyé des critiques pour avoir placé des publicités sur Facebook, dérogeant ainsi au boycottage de Meta appelé par les partis.

Sans chef et à la dérive dans l’électorat francophone, le PLQ avait fort à faire pour reconquérir ce qui avait toujours été sa citadelle jusqu’en 2019. Mme Avard Bernier, sa candidate, est cofondatrice du site Viedeparents.ca.

De son côté, le PCQ d’Éric Duhaime, avec son candidat Jesse Robitaille, a misé principalement sur son opposition au projet de tramway de Québec, même s’il s’agit surtout d’un enjeu débattu sur la scène municipale.

Parade de ministres

Les caquistes avaient mis le paquet pour garder Jean-Talon dans leur giron, alors que les ministres, les députés, le personnel politique et le premier ministre François Legault lui-même ont fait campagne dans la circonscription. 

La CAQ avait une fiche presque parfaite dans les complémentaires depuis le 2 octobre 2017, lors de sa victoire inespérée avec Geneviève Guilbault dans Louis-Hébert contre le PLQ alors au pouvoir. 

Plusieurs conviennent que ce gain a été un tournant dans l’histoire du parti de François Legault.

Les caquistes ont notamment raflé Roberval, siège laissé vacant par le départ du chef libéral Philippe Couillard, en 2018, Jean-Talon en 2019 et Marie-Victorin en avril 2022.

Mais autre exception cette année: en mars, les électeurs ont élu un député solidaire, Guillaume Cliche-Rivard, lors de la complémentaire dans Saint-Henri–Sainte-Anne, à Montréal, pour pourvoir le siège laissé libre par le départ l’ex-cheffe libérale Dominique Anglade.

Partager cet article
S'inscrire
Me notifier des
guest
0 Commentaires
Inline Feedbacks
Voir tous les commentaires