Le froid avec l’Inde n’a pas nui au commerce, selon la dirigeante d’EDC

Stéphane Rolland, La Presse Canadienne
Le froid avec l’Inde n’a pas nui au commerce, selon la dirigeante d’EDC

MONTRÉAL — Le froid diplomatique entre l’Inde et le Canada n’a pas nui au bon déroulement des affaires entre les entreprises des deux pays, constate la présidente et cheffe de la direction d’Exportation et développement Canada (EDC), Mairead Lavery.

«Nous n’avons pas constaté d’impacts sur les entreprises canadiennes qui font des affaires en Inde, sur EDC, ou sur les entreprises indiennes intéressées par le Canada», répond-elle en entrevue en marge d’une présentation dans le cadre d’un événement sur le potentiel commercial de la région Indo-Pacifique, organisé par la Chambre de commerce du Canada. 

«Les deux communautés d’affaires continuent de travailler ensemble», affirme-t-elle. 

Les relations diplomatiques sont tendues entre le Canada et l’Inde dans la foulée du meurtre d’un militant sikh en Colombie-Britannique. Ottawa accuse l’Inde d’être responsable du meurtre en sol canadien, ce que dément New Delhi.

En octobre, 41 diplomates canadiens ont été contraints de quitter l’Inde tandis que le gouvernement menaçait de ne plus reconnaître leur immunité diplomatique.

EDC a été obligée de déplacer un représentant canadien en Inde, qui mène ses activités d’un autre pays, mais elle peut aussi compter sur du personnel local, embauché pour leur connaissance de la communauté d’affaires locale. Les employés locaux continuent de mener leurs activités au pays. 

Mme Lavery reconnaît que les manchettes ont pu décourager certains entrepreneurs de brasser des affaires en Inde, mais l’effet sur le terrain n’est pas visible concrètement, assure-t-elle. «La tension s’est vraiment manifestée entre les gouvernements, pas dans le milieu des affaires.» 

La dirigeante a une réponse similaire lorsqu’on la questionne sur les tensions diplomatiques entre la Chine et le Canada. Elle souligne que les exportations du Canada vers la Chine ont, en fait, augmenté malgré les tensions. 

Les exportations vers la Chine ont atteint 31 milliards $ en 2023, selon des données de Statistique Canada. Cela se compare à 29,3 milliards $ en 2022 et 28,7 milliards $ en 2021. 

Les manchettes sur la Chine ne reflètent pas nécessairement la réalité des entreprises canadiennes sur le terrain. «De nombreuses entreprises canadiennes racontent à quel point leurs relations d’affaires sont toujours positives en Chine, qu’on y brasse toujours des affaires», affirme Mme Lavery.

Mme Lavery constate également qu’il y a un engouement pour l’Indonésie de la part des entreprises canadiennes. Le pays prévoit d’importants investissements pour déménager sa capitale tandis que Jakarta est menacée par la montée des eaux. 

«Les gens voient d’énormes projets, une population nombreuse (279 millions), une classe moyenne en croissance. Je crois que c’est un pays qui est surveillé de près.»

Québec impliqué en Inde

Au gouvernement du Québec, les tensions entre Ottawa et New Delhi n’ont pas freiné les intentions du gouvernement Legault de renforcer ses relations commerciales aux pays des Tata, Adani et Aditya Birla. 

Le bureau du Québec en Inde se trouvait dans les bureaux du consul du Canada à Mumbai, qui a suspendu ses activités en personne. 

Québec veut ouvrir ses propres bureaux en Inde afin d’être opérationnel sur le terrain, a dit la ministre des Relations internationales et de la Francophonie, Martine Biron, en entrevue le 22 mars dernier. «C’est un projet qui est en cours. J’ai rencontré le consul de l’Inde qui est basé ici à Montréal, à quelques reprises. On avance dans ce dossier-là.»

Au cours d’une brève allocution devant la Chambre de commerce du Canada, le directeur des exportations pour les marchés de l’Asie-Pacifique et de l’Océanie chez Investissement Québec International, Stéphane Fallecker, a invité les participants à ne pas faire une croix sur l’Inde. 

«Ce que j’essaie surtout de m’assurer, c’est que les gens ne se retirent pas du territoire, que l’on continue à regarder le potentiel de marché, précise-t-il en marge de la présentation. Qu’on ne manque pas le bateau. Avec les relations commerciales difficiles avec la Chine, l’Inde reste le plus grand marché pour nos produits.»

Malgré la distance géographique et les tensions géopolitiques, la région Indo-Pacifique est un incontournable pour les exportations canadiennes, croit Mme Lavery. 

«L’activité économique est de 47 trillions de dollars dans la région, qui compte 4 milliards de personnes. La classe moyenne est en expansion, la démographie est très favorable.

«Près de la moitié du PIB mondial viendra de la région d’ici 2040, je veux dire «wow!»»

Elle reconnaît qu’il y a des risques dans la région, mais «rester seulement avec ce qu’on connaît représente également un risque tandis que la diversification géographique permet justement de réduire ce risque».

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