Le député montréalais Sameer Zuberi veut débattre de la clause de dérogation

Stephanie Taylor, La Presse Canadienne
Le député montréalais Sameer Zuberi veut débattre de la clause de dérogation

OTTAWA — Il est temps de débattre de la pertinence de la clause de dérogation, affirme le député libéral de la circonscription fédérale de Pierrefonds-Dollard, Sameer Zuberi.

Le Bloc québécois a récemment présenté une motion visant à rappeler au gouvernement fédéral qu’il revient aux provinces de décider de l’utilisation de la clause dérogatoire. Les libéraux et les néo-démocrates se sont ligués pour la défaire, malgré l’appui des conservateurs.

Selon le site de l’Assemblée nationale, la clause de dérogation est «une clause de la Charte canadienne des droits et libertés qui permet au Parlement fédéral ou à une assemblée législative provinciale d’adopter une loi dérogeant à certains articles de la Charte». Le recours à cette clause doit être renouvelé tous les cinq ans.

Tout récemment, le gouvernement québécois a eu recours à la clause de dérogation lorsqu’il a adopté la loi sur la laïcité et la loi sur la langue officielle. L’Ontario a fait la même chose lorsqu’il a voulu imposer une convention collective aux employés du secteur de l’éducation.

«Quand on utilise la clause de dérogation pour restreindre les droits de certaines personnes, il est temps de remettre en question cette clause», soutient M. Zuberi.

Malgré cette position, le député refuse de demander au gouvernement fédéral qu’il rouvre le débat sur la Charte. «Le débat doit se faire au sein de la société civile et des gouvernements», dit-il.

Est-il pertinent de relancer des débats constitutionnels alors que la population canadienne a de nombreux autres soucis comme l’inflation ? M. Zuberi répond: «Ce n’est pas parce qu’un sujet est complexe qu’on doit hésiter à l’aborder».

Sameer Zuberi, le seul député fédéral musulman au Québec, croit que l’appui des Québécois à cette loi diminue, mais il juge qu’il est important de dire à ceux qui sont affectés que la contestation pourra être longue.

Cette semaine, témoignant devant un comité sénatorial sur l’islamophobie, M. Zuberi a dit espérer que la loi pourra être modifiée ou même abolie lorsque la clause de dérogation devrait être renouvelée à sa date d’échéance.

«Il faut être réaliste et ne pas prétendre que les choses ne sont pas telles qu’elles le sont» a-t-il lancé en rappelant que si une loi était validée par les tribunaux, le seul autre recours pour l’abolir, ce sont les élections.

La Cour d’appel du Québec doit se prononcer sur la constitutionnalité du recours à la clause de dérogation par le gouvernement Legault qui a été contesté par des groupes de droit et le Conseil national des musulmans canadiens. En 2021, le juge Marc-André Blanchard, de la Cour supérieure, avait statué que la Loi sur la laïcité avait des impacts «graves et négatifs» sur les personnes qui portent des symboles religieux, mais qu’elle était largement légale et ne violait pas la constitution.

Le gouvernement fédéral a déjà annoncé qu’il participerait à une éventuelle contestation de cette loi si elle devait être jugée par la Cour suprême.

Le pdg du Conseil national des musulmans canadiens, Stephen Brown, croit que la contestation judiciaire serait éventuellement fructueuse, mais ajoute qu’il «est absolument nécessaire» de réunir les parlementaires, les militants et les autres membres de la société civile pour discuter de la clause de dérogation.

M. Zuberi souhaite que ceux qui sont affectés par la loi demeurent engagés.

«Nous espérons que cette loi sera invalidée par les tribunaux, mais il est possible que cela ne se réalise pas, concède-t-il. Les gens doivent le comprendre et se préparer à moyen terme. Ne pas le comprendre ne rend pas service à ceux qui sont affectés.»

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