L’attaque terroriste de Veltman contre une famille musulmane lui vaut la perpétuité

La Presse Canadienne
L’attaque terroriste de Veltman contre une famille musulmane lui vaut la perpétuité

LONDRES — Un homme qui a tué quatre membres d’une famille musulmane à London, en Ontario, a commis un acte de terrorisme alimenté par l’idéologie nationaliste blanche, a statué jeudi une juge ontarienne en le condamnant à la prison à vie, sans possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans.

Nathaniel Veltman a également été condamné à une peine concomitante d’emprisonnement à perpétuité pour la tentative de meurtre d’un garçon qui a survécu à l’attaque de 2021.

Veltman, 23 ans, a été reconnu coupable en novembre de quatre chefs de meurtre au premier degré et d’un chef de tentative de meurtre pour avoir percuté la famille Afzaal avec son camion alors qu’ils se promenaient.

Il a tué Salman Afzaal, 46 ans ; sa femme de 44 ans, Madiha Salman ; leur fille de 15 ans, Yumna ; et sa grand-mère de 74 ans, Talat Afzaal. Le fils du couple, âgé de neuf ans, a été grièvement blessé, mais a survécu.

Veltman «incarnait le prototype du ‘loup solitaire’», gardant ses convictions – et un manifeste écrit – pour lui jusqu’à ce qu’il ait commis ses crimes, a déclaré la juge Renee Pomerance, qui a présidé le procès.

Mais une fois qu’il a mis à exécution son plan meurtrier, Veltman «a clairement fait savoir qu’il voulait que le monde sache ce qu’il avait fait et pourquoi il l’avait fait», a-t-elle ajouté en rendant sa décision de condamnation devant un tribunal londonien bondé.

«Cela faisait partie d’un plan. Il voulait intimider la communauté musulmane. Il voulait suivre les traces d’autres tueurs de masse et il voulait en inspirer d’autres à commettre des actes meurtriers.»

Un «exemple classique de motivation et d’intention terroristes»

Veltman n’a montré aucune émotion visible lorsque la conclusion de terrorisme a été tirée et a été vu en train de poser une question à son avocat une fois la condamnation prononcée.

Mme Pomerance, qui a explicitement choisi de ne pas nommer Veltman dans sa décision afin de lui refuser la publicité qu’il recherchait pour ses convictions, a déclaré que «la brutalité du crime, son caractère aléatoire, la haine qui l’a alimenté et les conséquences… appellent à l’imposition de la peine la plus sévère connue en droit canadien».

Le meurtre au premier degré est automatiquement passible d’une peine d’emprisonnement à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans, mais il existe un pouvoir discrétionnaire dans la détermination de la peine en cas de tentative de meurtre.

En rendant sa décision sur la peine, Mme Pomerance a jugé qu’il s’agissait d’une «conclusion incontournable» selon laquelle Veltman avait commis un acte terroriste.

«L’agresseur ne connaissait pas les victimes. Il ne les avait jamais rencontrées. Il les a tuées parce qu’elles étaient musulmanes, a-t-elle expliqué. On pourrait aller jusqu’à qualifier cela d’exemple classique de motivation et d’intention terroristes.»

Le constat de terrorisme est «très important», a insisté la procureure de la Couronne, Sarah Shaikh, devant le tribunal.

«C’est une reconnaissance du fait que l’attaque du délinquant ne visait pas seulement la famille Afzaal, mais qu’elle était également ciblée et dirigée contre l’ensemble de la communauté musulmane, a-t-elle souligné. Il s’agissait également d’une attaque contre des valeurs qui nous sont très chères en tant que Canadiens: l’inclusion, la communauté, la décence et le multiculturalisme.»

«La vie des musulmans compte aussi»

La mère de Salman, Tabinda Bukhari, a affirmé devant le tribunal que même si le jugement de jeudi reconnaissait la haine qui a coûté la vie à leurs proches, il ne pouvait pas rendre ce qui leur avait été volé.

«Ce procès ne concernait pas qu’un seul acte, a-t-elle dit en lisant une déclaration au nom de la famille. C’était un rappel brutal des lignes de fracture profondément ancrées dans notre société, des stéréotypes qui peuvent dégénérer en violence. Nous devons affronter la haine, pas seulement la condamner.»

Faisal Bhabha, professeur agrégé à la faculté de droit Osgoode Hall de l’Université York, a déclaré que la décision fournit aux musulmans canadiens «une validation morale importante de leurs expériences de haine et de discrimination et de la peur qui en résulte».

Il ressort clairement des faits de l’affaire que Veltman était motivé par la haine, a-t-il conclu.

«La triste réalité, cependant, est qu’au Canada, l’utilisation du mot terroriste s’applique presque exclusivement aux musulmans. Cela a contribué à une situation dans laquelle les musulmans canadiens n’ont pas le sentiment que leur vie est valorisée de la même manière par leurs concitoyens ou par leurs dirigeants politiques lorsque les musulmans sont victimes de violences, que ce soit dans leur pays ou à l’étranger», a écrit M. Bhabha dans un courriel.

«C’est pourquoi il s’agit aujourd’hui d’un moment critique pour que les musulmans canadiens reçoivent la validation du pouvoir judiciaire… que la vie des musulmans compte aussi.»

Au cours du procès, Veltman a déclaré qu’il envisageait d’utiliser sa camionnette pour mener une attaque et qu’il avait ressenti une «envie» de frapper la famille Afzaal après les avoir vus marcher sur un trottoir. Il a dit qu’il savait qu’ils étaient musulmans grâce aux vêtements qu’ils portaient et qu’il avait remarqué que l’homme du groupe avait une barbe.

Le jury a également regardé une vidéo de Veltman expliquant à un détective que son attaque était motivée par des convictions nationalistes blanches, et a appris qu’il avait écrit un manifeste dans lequel il se décrivait comme un suprémaciste blanc dans les semaines précédant l’attaque.

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