La lutte contre les changements climatiques doit aussi s’occuper de la santé

Bob Weber, La Presse Canadienne
La lutte contre les changements climatiques doit aussi s’occuper de la santé

EDMONTON — Les corps sont tout aussi affectés par les changements climatiques que la banquise et les forêts, signale une scientifique de l’Université de l’Alberta, Sherilee Harper.

«Les changements climatiques ont des répercussions sur tout ce qui nous préoccupe, lance-t-elle. Ce n’est pas qu’un enjeu environnemental.»

C’est la raison pour laquelle la Pre Harper et une trentaine de ses collègues provenant de disciplines allant de l’économie à l’épidémiologie se sont regroupés afin que les changements climatiques soient davantage perçus comme une menace à la santé humaine.

«Ce pôle universitaire vise à aider à faire comprendre à la population que chaque décision au sujet des changements climatiques est une décision liée à la santé», souligne celle qui est aussi une des vice-présidentes du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, l’un des chefs de file mondiaux sur la question.

«Chaque projet de recherche sur les changements climatiques a des implications sur la santé», ajoute-t-elle.

Elle cite l’exemple des pistes cyclables.

Pour les élus municipaux, les pistes cyclables sont un moyen pour diminuer les émissions de gaz provenant des véhicules motorisés, mais elles permettent aussi d’améliorer la santé des gens.

«Transformer les changements climatiques en un enjeu de la santé permettrait d’ajouter un bon poids dans la balance, souligne la Pre Harper. Des recherches démontrent que lorsqu’on relie un problème à un enjeu de santé publique, cela entraîne plus d’action que si c’est lié à un enjeu environnemental ou économique.»

Le Canada se réchauffe deux fois plus vite que la moyenne mondiale. Et de nombreuses recherches ont déjà démontré que la hausse des températures accroît les problèmes de santé.

En 2022, l’Agence de la santé publique du Canada écrivait dans un rapport que «les changements climatiques [constituaient] la plus grande menace pour la santé au Canada et dans le monde».

À cause des feux de forêt, la qualité de l’air au Canada a été l’une des plus mauvaises au monde l’été dernier. Les problèmes respiratoires, particulièrement chez les enfants, la maladie de Lyme et le virus du Nil occidental se répandent plus rapidement, les parasites proliférant dans leur nouvel habitat. La diarrhée est plus fréquente, car l’eau, en se réchauffant, accueille plus de bactéries.

Les changements climatiques ont aussi des répercussions sur la santé mentale: trouble de stress aigu, sentiment omniprésent d’une perte ou d’un deuil. Souvent, les effets sur la santé physique et la santé mentale se conjuguent.

Les menaces à la santé publique existent aussi à l’échelle mondiale.

L’Organisation mondiale de la santé prévoit que de 2030 à 2050, les changements climatiques causeront annuellement environ 250 000 morts additionnelles à cause de la malnutrition, de la malaria, de la diarrhée et du stress lié à la chaleur.

L’Universita de l’Alberta annoncera officiellement mardi la création du Climate Change and Health Hub. L’administratrice en chef de la santé publique du Canada, la Dre Theresa Tam devrait être présente. Pour le moment, le pôle sera surtout un réseau de chercheurs, d’étudiants et de gardiens du savoir des Premières Nations qui estiment qu’une collaboration interdisciplinaire est nécessaire et qui veulent échanger des idées et des recherches. 

De tels pôles existent déjà aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Australie, mentionne la Pre Harper.

Le pôle compte aussi faire valoir sa présence dans le débat public.

«Nous pensons qu’il est vraiment important de pouvoir compter sur un centre, qui, au cours de cette période de désinformation, peut mobiliser des ressources bien informées. Il faut fournir des preuves afin que les politiciens prennent des décisions en se fondant sur des preuves.»

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