La GRC dévoile un complot pour envoyer des drones et de l’équipement en Libye

Jacob Serebrin, La Presse Canadienne
La GRC dévoile un complot pour envoyer des drones et de l’équipement en Libye

MONTRÉAL — La Gendarmerie royale du Canada (GRC) a révélé l’existence d’un complot pour vendre illégalement des drones et de l’équipement militaire chinois en Libye, pendant que les suspects étaient à l’emploi de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) à Montréal.

Dans un communiqué publié mardi, la GRC a précisé que les individus impliqués auraient contourné les sanctions internationales à l’aide de compagnies-écrans étrangères.

Les présumés complices travaillaient à l’OACI, une organisation onusienne dont le siège social est situé à Montréal.

Des accusations de complot ont été déposées contre Fathi Ben Ahmed Mhaouek, âgé de 61 ans, et Mahmud Mohamed Elsuwaye Sayeh, âgé de 37 ans.

Ce dernier, qui est toujours recherché et visé par un mandat d’arrestation d’INTERPOL, aurait utilisé un stratagème pour camoufler le vendeur et l’acheteur de l’équipement militaire, du matériel qui fait l’objet de sanctions de l’ONU pour la Libye. Celles-ci ont force de loi au Canada.

Quant à M. Mhaouek, il a été arrêté et est accusé d’avoir «comploté pour faciliter des transactions d’achat de pétrole libyen entre des entités prohibées et la République populaire de Chine contrairement à la Loi sur les Nations unies».L’individu a comparu mardi après-midi au palais de justice de Montréal, après avoir été arrêté plus tôt dans la journée.

«Nous avons deux accusés. L’un d’eux, Monsieur Mhaouek, a comparu cet après-midi concernant un complot alors qu’il était employé de l’OACI. Le complot consistait à offrir de vendre du pétrole de la Libye de la part d’entités sanctionnées par les Nations unies. Le pétrole était destiné à la République populaire de Chine», a déclaré la procureure fédérale Marie-Ève Moore aux journalistes.

«L’autre accusé est sous mandat d’arrestation pour lequel nous avons une notice rouge d’INTERPOL. Il est également visé par un chef d’accusation additionnel. Ce chef est également un chef de complot avec des employés co-conspirateurs de l’OACI afin d’acheter de l’équipement militaire, dont des drones qui provenaient de la République populaire de Chine et qui étaient destinés à la Lybie, ce qui est également sanctionné par les Nations unies. Tout achat d’équipement militaire est prohibé. L’enquête caution concernant la remise en liberté, pour laquelle nous nous sommes objectés aujourd’hui, est remise à vendredi. Nous pourrons exposer les faits plus en détail à ce moment. Nous pourrons exposer vendredi quelles sont les motivations exactes de notre objection.»  

Un troisième homme, James Kuang Chi Wan, est désigné dans le document d’accusation comme co-conspirateur. Les procureurs ont toutefois refusé de commenter les raisons pour lesquelles il n’a pas été inculpé.

«Nous avons découvert qu’ils ont tenté de vendre cet équipement militaire chinois à la Libye par l’intermédiaire de sociétés-écrans, ce qui constitue une violation directe de la réglementation fédérale», a déclaré le porte-parole de la GRC Charles Poirier, ajoutant que l’équipement militaire comprenait de gros drones pouvant transporter plusieurs missiles.

La réglementation fédérale interdit à quiconque au Canada de fournir du matériel militaire à l’une des factions qui combattaient dans la guerre civile en Libye ou d’aider à financer ces groupes. Selon M. Poirier, le complot présumé aurait profité à l’une des deux principales factions du conflit qui a pris fin en 2020.

«La deuxième partie du projet consistait à exporter du pétrole libyen vers la Chine, a-t-il indiqué. À l’époque, les gisements étaient sous le contrôle du général Khalifa Hiftar et le plan était de vendre des millions de barils de pétrole brut à la Chine sans que personne ne le sache.»

L’armée nationale libyenne (ANL) autoproclamée du général Hiftar a combattu contre le gouvernement libyen, soutenu par l’ONU, et a détenu une grande partie de l’est du pays pendant la guerre civile. Elle continue d’être une figure puissante dans cette région.

M. Poirier a toutefois précisé que les enquêteurs n’ont aucune indication que l’équipement militaire et le pétrole brut ont atteint leurs prétendues destinations finales. Si les deux accusés y sont parvenus, ils ont empoché plusieurs millions de dollars par mois en commissions, a-t-il avancé.

«La théorie derrière leur motivation est avant tout financière, a-t-il soutenu. Cependant, cela aurait également profité à la Chine en lui permettant de soutenir secrètement la faction de Haftar et en lui donnant un accès privilégié au pétrole libyen.»

Une enquête amorcée en 2022

L’enquête a commencé en 2022 après que la GRC a reçu ce qu’elle a décrit comme des «renseignements crédibles».

Les deux hommes bénéficiaient d’une immunité diplomatique en raison de leur travail avec l’ONU. Celle-ci a dû être levée par l’OACI avant que les deux hommes puissent être inculpés.

L’ONU a collaboré à l’enquête policière. «Rien n’indique que l’OACI était au courant du complot jusqu’à ce que nous la contactions», a déclaré M. Poirier.

«L’OACI coopère pleinement à l’enquête de la GRC sur les individus impliqués dans la plainte, qui ont quitté l’organisation il y a plusieurs années, a écrit l’organisme dans un communiqué. L’OACI condamne fermement toute action incompatible avec les valeurs de l’organisation.»

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