La Cour d’appel annule l’absolution de Raphaël Lévesque pour la pagaille chez VICE

Pierre Saint-Arnaud, La Presse Canadienne

MONTRÉAL — La Cour d’appel casse l’absolution conditionnelle de Raphaël Lévesque, l’ex-leader du groupe d’extrême droite Atalante qui avait fait irruption et semé la pagaille dans les bureaux du défunt média VICE Québec avec une demi-douzaine d’acolytes masqués en mai 2018. 

Raphaël Lévesque aura donc le casier judiciaire dont il croyait s’être soustrait.

C’est la deuxième fois que le plus haut tribunal du Québec renverse une décision de première instance dans ce dossier, décisions rendues dans les deux cas par la juge Joëlle Roy, de la Cour du Québec.

Lévesque s’était présenté avec un bouquet de fleurs à la porte verrouillée du média et une employée avait déverrouillé la porte. Six autres hommes masqués portant des chandails aux couleurs d’Atalante s’étaient alors engouffrés à l’intérieur avec Raphaël Lévesque qui, lui, portait des lunettes fumées. Ils avaient fait jouer de la musique à fort volume, lancé des nez de clown et des tracts et Raphaël Lévesque avait remis un prix satirique «Média poubelle 2018» au journaliste Simon Coutu, qui venait de publier un article sur l’organisation. Le tout s’était déroulé pacifiquement, mais plusieurs employés avaient témoigné à l’effet qu’ils s’étaient sentis menacés et intimidés.

Limites à la liberté d’expression

Dans un premier temps, la juge Roy l’avait acquitté en 2020 des quatre chefs d’accusation portés contre lui, soit introduction par effraction, méfait, harcèlement et intimidation. La magistrate avait conclu que l’accusé avait fait valoir sa liberté d’expression, sans plus, tout en précisant que sa décision ne donnait pas carte blanche à ce genre d’agissement, et que «la ligne est parfois ténue entre incivilité et acte criminel».

La Cour d’appel avait renversé cette décision en avril 2022, estimant que la liberté d’expression ne permet pas d’entrer illégalement dans un lieu privé pour l’exprimer, même pacifiquement, et l’avait reconnu coupable d’introduction par effraction et de méfait, tout en ordonnant un arrêt de procédures sur ce dernier chef. La cause avait ainsi été renvoyée en Cour du Québec pour que celle-ci détermine sa peine. 

La juge Roy, cette fois, avait accepté de lui accorder en février 2023 l’absolution conditionnelle, les conditions étant une probation de 18 mois, un don de 1000 $ et le versement de 400 $ à une des victimes.

À l’emploi malgré d’autres antécédents

La Cour d’appel exprime donc son désaccord et annule l’absolution conditionnelle tout en maintenant le reste des conditions. Le banc des trois juges, qui a rendu sa décision jeudi, estime que la juge Roy a commis une erreur en refusant que les antécédents judiciaires de Raphaël Lévesque soient mis en preuve. «Il est établi que le juge de la peine doit disposer «des renseignements les plus complets possibles sur les antécédents de l’accusé pour déterminer la sentence en fonction de l’accusé plutôt qu’en fonction de l’infraction»», écrit-on en invoquant la jurisprudence. 

Le tribunal souligne que la juge a aussi commis une erreur en acceptant l’argument de l’accusé selon lequel un casier judiciaire aurait un effet néfaste sur lui et pourrait nuire à son emploi. La décision souligne qu’au contraire, «cette proposition n’est soutenue par aucune preuve probante dans un contexte où Lévesque occupe son emploi alors qu’il a été condamné à neuf infractions découlant de sept événements distincts entre 2002 et 2015. Ses dernières condamnations lui ont valu 12 mois d’emprisonnement et une probation d’un an pour un complot et un trafic de drogues.»

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