Des députés fédéraux veulent entendre Catherine Tait, présidente de CBC/Radio-Canada

Mickey Djuric, La Presse Canadienne
Des députés fédéraux veulent entendre Catherine Tait, présidente de CBC/Radio-Canada

OTTAWA — Des députés fédéraux veulent entendre à Ottawa la présidente de CBC/Radio-Canada, Catherine Tait, qui vient d’annoncer que le radiodiffuseur public devra réduire ses effectifs de 10 %, sans exclure toutefois la possibilité d’accorder des primes aux dirigeants de la société d’État.

Le Comité permanent du patrimoine canadien des Communes a convenu jeudi à l’unanimité de convoquer la présidente du radiodiffuseur public pour expliquer les coupes — et les primes potentielles. Le comité veut entendre Mme Tait lors de sa première réunion de 2024, après les vacances des Fêtes, mais aucune date n’a encore été fixée pour cette réunion.

En attendant, le Bloc québécois a profité de la période des questions pour appeler la ministre du Patrimoine, Pascale St-Onge, à licencier l’actuelle présidente du diffuseur public si cette dernière ne renonce pas à la suppression d’emplois.

«Lundi, ce n’est pas 600 congédiements qui auraient dû être annoncés. C’est, en fait, zéro ou un seul. Si Catherine Tait ne recule pas sur ses coupes, est-ce que la ministre va la congédier?» a lancé le porte-parole bloquiste pour ce dossier, Martin Champoux.

Mme St-Onge lui a alors réitéré qu’en prenant le pouvoir en 2015, les libéraux de Justin Trudeau ont renversé des coupes qui avaient été faites par les conservateurs dans le financement à CBC/Radio-Canada.

Dans une intervention précédente, la ministre a invité «la direction de CBC/Radio-Canada à répondre aux questions que les gens se posent présentement concernant leur politique de rémunération».

«Le diffuseur public qui reçoit du soutien de fonds publics est imputable devant la population canadienne», a-t-elle soutenu. 

M. Champoux, qui lui avait demandé si elle maintenait sa confiance en Mme Tait, s’est dit «content que la ministre veuille aussi avoir des réponses de la présidente de CBC/Radio-Canada».

Les députés membres du comité du patrimoine ont convenu de faire rapport à la Chambre qu’étant donné les suppressions d’emplois, il serait inapproprié que CBC/Radio-Canada accorde des primes aux membres de la direction.

Le porte-parole du diffuseur public, Leon Mar, a déclaré jeudi dans un courriel que CBC/Radio-Canada était au courant de la motion adoptée en comité et que ses dirigeants étaient «impatients de répondre aux questions des membres du comité».

Puisque le diffuseur public est indépendant des pouvoirs politiques, les députés ne peuvent pas décider comment CBC/Radio-Canada dépense ses budgets. 

La société d’État a annoncé lundi qu’elle prévoyait supprimer 600 emplois et ne pas pourvoir 200 postes vacants au cours de la prochaine année, alors que le radiodiffuseur public est aux prises avec un manque à gagner de 125 millions $. 

Interrogée à l’émission phare de CBC News «The National» si les dirigeants recevaient des primes cette année malgré les coupes, Mme Tait a répondu qu’il était trop tôt pour le dire. «Nous examinerons cela, comme nous le ferons pour tous nos postes budgétaires dans les mois à venir», a-t-elle dit.

M. Mar a confirmé jeudi dans son courriel que le radiodiffuseur public ne reconsidérerait pas les primes qu’il aurait versées en vertu des contrats existants. «Les modifications apportées à nos accords de rémunération existants avec les employés, qu’ils soient syndiqués ou non, ne sont pas à l’étude pour le moment», a précisé M. Mar dans un courriel adressé à La Presse Canadienne.

Primes «de rétention»

Les députés libéraux, conservateurs et néo-démocrates du comité du patrimoine ont exprimé leur consternation face aux commentaires de Mme Tait sur les primes.

«En tant qu’ancien PDG, je ne peux pas imaginer avoir licencié des employés avant Noël et avoir ensuite envisagé de toucher une prime», a déclaré jeudi le député libéral Taleeb Noormohamed, qui est également secrétaire parlementaire de la ministre du Patrimoine canadien.

«Le gouvernement ne contrôle pas Radio-Canada et nous ne pouvons donc pas lui dire quoi faire, a-t-il admis. Mais je pense qu’il est très important pour nous, en tant que parlementaires, de poser à Mme Tait ces questions, lorsqu’elle comparaîtra, sur l’opportunité pour les dirigeants d’envisager des primes.»

Des documents de CBC/Radio-Canada précédemment obtenus grâce à la Loi sur l’accès à l’information révèlent que plus de 99 millions $ en primes ont été accordés aux employés du diffuseur public entre 2015 et 2022. Ce chiffre comprend 16 millions $ distribués l’année dernière à plus de 1100 employés — le montant le plus élevé versé depuis au moins sept ans.

CBC/Radio-Canada définit son programme de primes comme un «plan d’incitation à court terme». Il vise à encourager «la rétention des employés et à les motiver à atteindre ou dépasser les objectifs commerciaux qui sont alignés sur notre plan stratégique», a déclaré le porte-parole du diffuseur plus tôt cette semaine.

Par ailleurs, des voix se sont élevées au Québec pour dénoncer les coupes qui frappent de façon égale les services anglais et français de CBC/Radio-Canada, alors que les cotes d’écoute en français du diffuseur public sont bien supérieures.

– Avec des informations d’Émilie Bergeron

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