Un meuble que l’on voit peu souvent

Par Mario Wilson
Un meuble que l’on voit peu souvent
Un tel meuble peut facilement valoir 2500$ chez un antiquaire.

Les meubles de notre histoire québécoise qui ont fait notre renommée dans le pays et même aux États-Unis sont certes l’armoire (idéalement à pointe de diamant), le lit à baldaquin, le banc à seaux ainsi que le poêle à deux ponts comme ceux des Forges du Saint-Maurice, près de Trois-Rivières.

Ces pièces de mobilier ancien côtoient quelques fois les huches à pain, les vieilles chaises droites de l’île d’Orléans ou encore les coffres avec moulure en V que tant d’amateurs, comme le magicien Alain Choquette par exemple, apprécient avec beaucoup d’ardeur, de fougue et d’intensité.

Il y a de ces meubles anciens qu’on ne voit vraiment, j’insiste, vraiment pas souvent. La chronique de cette semaine porte sur ces fauteuils-tables dont très peu d’exemplaires nous sont parvenus en bonne condition.

Peu souvent

En 25 ans d’évaluation, celui-ci est le troisième que j’ai le bonheur d’examiner. On sait tous que le désir de maximiser l’utilité des meubles de la petite maison des nouveaux habitants du pays (longtemps nommés colons), nous a permis d’apprécier les bancs de «quêteux».

Il s’agissait de grands sièges le jour, mais une fois ouverts, on y installait l’itinérant qui y dormait après un bon repas en famille.

C’est ici le même principe de rationalisation de l’espace qui a développé ce meuble mi-fauteuil pour le repos, mi-table pour les repas.

Le principe du grand plateau servant de table, qui bascule le long du mur et devient ainsi un fauteuil (plutôt inconfortable, faut-il le souligner), est une très ancienne invention qu’il est possible de voir sur de très vieilles gravures françaises et anglaises.

Assemblage

L’assemblage avec tenons et mortaises, le pin (essence de bois facilement malléable par les habitants modestement outillés) et la simplicité évidente du style de ce meuble nous rappellent les conditions de vie si humbles de nos ancêtres. Très peu d’atomes crochus avec les superbes et immenses meubles de la fin du dix-neuvième siècle fabriqués de façon industrielle avec les plus beaux chênes de nos forêts nord-américaines.

On se demandera encore pendant de nombreuses années, comment les générations précédentes trouvèrent le courage, la ténacité et la curiosité de conserver de tels meubles.

En effet, sans réels attraits esthétiques, ni même d’utilité évidente alors que les grandes maisons victoriennes ont permis le développement des meubles d’apparat, de vitrines pour les collections quelques fois futiles, pourquoi a-t-on conservé ces très «ordinaires» huches à pain, bancs de «quêteux» et fauteuils-tables de nos ancêtres?

Bonne valeur

Heureusement que certains de nos aïeuls nous ont laissé de tels fauteuils-tables, considérant qu’ils se vendent près de 2500$ chez les antiquaires aujourd’hui. Mais avant tout, un tel meuble est un souvenir de la vie si difficile de ceux qui nous ont précédés, avant même qu’ils aient cette idée bizarre de contester l’autorité des descendants anglais, 75 ans après la Conquête.

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