Nanisme: des défis gigantesques

Par Christiane Dumont

Le nanisme est un handicap rare qui n’est pas toujours pris au sérieux, déplore l’Association québécoise des personnes de petite taille dont est membre la Johannaise Marie-Claude Chapadeau. Alors que dans de nombreuses situations de la vie courante les obstacles se multiplient, la Johannaise déploie beaucoup d’ingéniosité pour s’adapter à un monde qui n’est pas conçu pour elle.

Née à Sept-Îles au sein d’une famille de grands, Marie-Claude Chapadeau souffre de pseudo achondroplasie, une des 500 formes de nanisme répertoriées dans le monde. Cela se traduit par la petitesse des membres et du tronc.

Le médecin qui assiste à l’accouchement ne doute pas qu’elle fera carrière comme clown dans un cirque, et il ne se prive pas de l’annoncer brutalement à sa mère. À sa décharge, il faut savoir qu’on recense habituellement un seul cas de nanisme par 10 000 habitants, ce qui en fait une maladie peu comprise, même par les professionnels de la santé, selon Karine Villeneuve, directrice de l’Association québécoise des personnes de petite taille (AQPPT).

Sur les conseils du médecin, sa mère la pousse à faire du sport, malgré des douleurs persistantes aux jambes. Mauvais conseil, à 12 ans, une radiographie révèle qu’elle a les os usés comme ceux d’une personne âgée Aujourd’hui, Mme Chapadeau s’en tient aux cours d’aquaforme en compagnie de personnes âgées, ce qui convient mieux à sa condition.

La jeune femme gagne sa vie comme analyste en réclamation en assurance de personne. Mais elle s’était d’abord tournée vers une carrière exigeante sur le plan physique, dans la transformation des matières plastiques.

Accepter sa condition

«C’était mon discours à 20 ans: chus normale, je peux tout faire», se rappelle-t-elle. Karine Villeneuve explique que, puisque le nanisme n’affecte pas les capacités cérébrales et qu’il permet une certaine mobilité, même des handicapés ne le considèrent pas comme un handicap.

«Vous marchez, nous dit-on. Oui, c’est vrai. Mais dans la majorité des cas, nous souffrons de maladies osseuses ou organiques. Pendant que vous faites un pas, moi, j’en fais trois: à la fin d’une journée, la dépense d’énergie est énorme», constate la directrice de l’AQPPT. 

Aujourd’hui, à 36 ans, le point de vue de Marie-Claude Chapadeau s’est rapproché de celui de son association: «Je me suis aperçue que j’ai des limitations, et aujourd’hui, j’essaie d’en tenir compte», assure-t-elle.

La hauteur des meubles, des guichets automatiques, des parcomètres et des marches dans les édifices, de même que la lourdeur des portes dans les bâtiments publics et la profondeur du mobilier sont autant d’obstacles pour les personnes de petite taille.

Des solutions ingénieuses

Mme Chapadeau et son mari, Jocelyn Bertrand, de petite taille lui aussi, se sont fait construire une maison pour eux. La hauteur des comptoirs, des éviers, des commandes de la douche, des marches d’escalier, des robinets a été prévue à leurs dimensions. Plus besoin de faire des aller-retour sur le tabouret pour préparer les repas!

Autre solution pragmatique, le couple loue une partie du sous-sol à un ami qui leur verse un loyer minime en retour de menus services: il tond la pelouse, sort la poubelle, déblaie l’entrée de la maison l’hiver, et accompagne toujours Mme Chapadeau au marché.

N’ayant pas tout à fait le même type de nanisme, chacun des conjoints a son auto. Marie-Claire Chapadeau peut conduire celle de son conjoint, mais pas l’inverse. «J’adore conduire, avoue la Johannaise, je mange de l’asphalte.»

Autre amélioration à leur vie: les triporteurs pour enfant, légers, qu’ils ont achetés des États-Unis. Elle qui a reçu une prothèse à chaque hanche, se porte beaucoup mieux depuis qu’elle en a fait l’acquisition. «J’ai gagné en qualité de vie. Il y a des endroits où je n’allais pas pour éviter d’être piétinée. Mais depuis que j’ai mon triporteur, je suis allée à la Ronde, dans des musées et aux montgolfières», relate-t-elle avec fierté.

Se reconnaître chez les autres

Ce qui lui a manqué beaucoup à l’adolescence, c’est de n’avoir personne à qui parler. Elle était entourée d’amis, mais ça n’allait jamais plus loin. Elle se souvient de ce garçon qui l’aimait bien, et qui lui a avoué en pleurant qu’il ne poursuivrait pas sa relation avec elle parce qu’il ne pouvait surmonter le regard des autres.

Du fait de leur rareté, les personnes de petite taille sont constamment entourées de grands, 80% d’entre elles naissant dans des familles sans antécédent de nanisme. Mme Chapadeau se souvient du choc qu’elle a subi lorsqu’elle est allée à une première rencontre de l’AQPPT.

Pour lire la suite de cet article consultez Le Richelieu ou son édition virtuelle.

 

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