La deuxième vague de COVID-19 et un reconfinement possible planent au-dessus de la tête des commerçants du Vieux-Saint-Jean telle une épée de Damoclès. Si ceux interrogés par Le Canada Français soulignent avoir connu somme toute un bel été, ils ne cachent pas leur inquiétude pour les semaines à venir, surtout avec le passage en zone orange dès jeudi et l’invitation du gouvernement d’éviter tout rassemblement d’ici la fin du mois d’octobre.
Au Bistro La Trinquette, la terrasse extérieure a permis à l’entreprise de réaliser entre 60 et 70% de son chiffre d’affaires habituel tout en respectant les principes de la distanciation sociale. «On a enlevé les tables de ping-pong, la pétanque et on a pu étaler nos tables jusqu’au fond. On n’a pas perdu de places assises, mais on ne pouvait pas laisser la clientèle s’assoir au bar ou être debout», souligne Loretta Brenko, copropriétaire du Bistro La Trinquette, dans une entrevue accordée au journal vendredi.
À l’intérieur du commerce, la capacité est limitée à 50%. «On essaie de mettre des séparateurs pour maximiser les places. C’est épeurant pour la suite parce que c’est plus petit», poursuit-elle.
Restauration
La saison estivale a été bonne au Bistro Viva Pasta, notamment grâce à la terrasse, souligne le copropriétaire André Thériault.
Quelques minutes avant de réaliser l’entrevue avec M. Thériault vendredi après-midi, le gouvernement Legault invitait les gens à annuler toutes leurs activités et rassemblements pour les 28 prochains jours. Lundi, les restaurateurs et tenanciers de bars de la communauté métropolitaine de Montréal (CMM), situés en zone rouge, apprenaient leur fermeture jusqu’au 28 octobre. Les commerçants de Saint-Jean-sur-Richelieu évitent pour le moment cette avenue.
«Le gouvernement est de plus en plus restrictif. Quand il dit aux gens de rester à la maison, ça ne nous aide pas. On anticipe l’automne. On ne sait pas ce que l’avenir nous réserve. Vont-ils nous fermer? Réduire nos heures d’ouverture? On vit à la semaine», relate M. Thériault.
Sécurité
Ce dernier est d’avis que les gens sont davantage en sécurité dans les restaurants ou les bars que dans les événements tenus à domicile. «Je pense que c’est mieux de nous garder ouverts. On a des mesures sanitaires. C’est utopique de penser que les jeunes vont aller se coucher après la fermeture des établissements. Ils vont plutôt ailleurs pour finir la soirée où il n’y a pas de Purell ni de masque», poursuit M. Thériault.
Il avoue que la perspective de l’automne et de l’hiver est préoccupante et angoissante.
Même son de cloche du côté de Loretta Brenko. «C’est sûr que de se faire tapocher sur la tête, c’est lourd à porter, sachant qu’à la maison, les gens ne respectent pas nécessairement les consignes. On souhaite juste de ne pas fermer. On vit au jour le jour.»
Boutiques
Deux autres commerçantes rencontrés vendredi dernier étaient tout de même optimistes. Chez Gypsie Bohème, la propriétaire Sandra Moreira mentionne avoir connu une augmentation de ses ventes en ligne et une bonne affluence à sa boutique de la rue Richelieu. «On est en mode croissance créative. On reste flexible. On a un plan B en cas de confinement pour maintenir les emplois. On voit l’automne comme l’été. On trouve des solutions», dit-elle en soulignant aussi la vague d’achat local. «On sent la présence de la société plus que jamais. Les gens sont à l’affût», poursuit Mme Moreira.
La rentrée scolaire a été bonne chez Chaussures Pierre Roy. «On a une clientèle fidèle et l’achat local continue à faire son chemin», indique Stéphanie Fraser, copropriétaire de l’endroit.
Elle ajoute que la température les aide aussi. «Les gens vont avoir besoin de bottes d’hiver», enchaîne-t-elle. Dans l’éventualité d’une autre fermeture décrétée par le gouvernement, la commerçante souligne que l’entreprise poursuivra ses ventes numériques et ses livraisons. «On est forts de l’expérience du printemps et on a l’avantage d’avoir pignon sur rue. C’est un plus d’être au centre-ville», enchaîne Mme Fraser.
Vitalité
En plus des conséquences néfastes de la COVID-19 sur les commerçants, le Vieux-Saint-Jean a vu trois bars de la rue Richelieu fermer leurs portes, soit Le 66, Tequila et Cognac. Cela porte à une dizaine le nombre de locaux vacants dans le Vieux-Saint-Jean.
La conseillère municipale du secteur, Mélanie Dufresne, souligne toutefois l’arrivée récente de nouveaux commerçants, dont Treize Chocolats, La Fabrique à saucisse, Pastel Café et Inspire Comptoir Santé. Le restaurant Chop Shop agrandit également en ouvrant la boutique Piman sur la rue Champlain à côté de son adresse actuelle.
«Il reste des locaux à louer, mais il y a beaucoup de mouvement, c’est positif. Les commerçants s’entraident. Il y a une belle dynamique qui aide à la vitalité. Les boutiques vont super bien. Il y a un bel engouement pour le centre-ville», dit-elle.
Mme Dufresne est toutefois préoccupée par certains. «Je m’inquiète pour les restaurants et les bars-terrasses. Avec la COVID-19, c’est difficile. Les annonces du gouvernement ne les aident pas. J’interpelle les citoyens en leur demandant de les soutenir en allant chercher du take-out», lance-t-elle.
Pour Mélanie Dufresne, l’équilibre est fragile. «Beaucoup sont installés depuis peu. Je ne veux pas aller à l’encontre du gouvernement Legault, mais il faut être là pour les restaurateurs. Je me demande si certains établissements vont voir 2021.»
Événements annulés
L’annulation d’événements majeurs comme la Saint-Jean-Baptiste, la vente-trottoir, la Boom de l’été et Mon Vieux-Saint-Jean la nuit a également des incidences sur les activités et les recettes des commerçants. «Ce sont des journées de perdues», indique Mme Brenko.
«Ça représente des pertes, mais on a réussi à s’en sortir. On est chanceux d’avoir les aides gouvernementales», ajoute M. Thériault. Les commerçants soulignent également que les installations estivales de l’Oasis Vieux-Saint-Jean ont attiré de la clientèle dans le centre-ville.