Une laiterie patrimoniale risque de disparaître dans le secteur Saint-Luc

Camille Vanderschelden 

cvanderschelden@canadafrancais.com

Une laiterie patrimoniale risque de disparaître dans le secteur Saint-Luc
La laiterie de pierre, attenante à la maison visée par la démolition, représente une valeur patrimoniale supérieure. (Photo : (Photo Le Canada Français - Jessyca Viens Gaboriau))

L’ancienne laiterie Marcil, attenante à la maison située au 911, rue Bernier, sera bientôt démolie à moins d’une opposition des citoyens ou du ministère de la Culture. Dernier bastion de l’histoire agricole de Saint-Luc, elle laissera place à un développement commercial déjà largement présent dans le secteur. 

Le 25 avril, la Ville publiait un avis public de demande de démolition pour le 911, rue Bernier. L’immeuble visé est un corps de ferme situé dans le secteur Saint-Luc qui daterait de la fin du 19e siècle. L’ensemble comprend une maison traditionnelle québécoise, une laiterie ancienne et une grange. 

La demande de démolition émane du propriétaire de l’immeuble, M. Bernard Marcil. Il est le dernier membre de la famille Marcil, dont l’histoire est profondément liée à celle du quartier : le boulevard Omer-Marcil prend d’ailleurs le nom du père de famille. Âgé de 94 ans et sans descendant direct, M. Marcil cèderait finalement à la pression des promoteurs. Ces derniers avaient en effet grignoté les terres agricoles de la lignée une par une au profit du développement commercial.

Le corps de ferme, pris en étau dans cette zone commerciale, tenait donc plus de la résistance que du hasard. Le hic? Cet immeuble comprend une laiterie ancienne, dont la valeur patrimoniale est supérieure.

La demande de démolition a toutefois été approuvée par le comité responsable, lors de sa séance du 8 mai dernier. Or, plusieurs documents nécessaires à ces demandes manquaient à l’appel, comme l’estimation des coûts de rénovation ou encore les plans de réutilisation du sol dégagé. 

Laiterie 

La laiterie de pierre attenante à la maison constitue un bâtiment à valeur patrimoniale supérieure, un cas rare dans les demandes de démolition. Elle représente surtout la seule ancienne laiterie de la ville depuis la démolition de la laiterie Granger au profit d’un projet de condos en 2019.

En Montérégie, il resterait par ailleurs quatre laiteries anciennes : celle de la famille Marcil à Saint-Jean, une à Brossard et deux autres à Calixa-Lavallée. Dans le Haut-Richelieu, la laiterie Marcil serait donc la dernière de ce genre. 

Une maison d’été qui complétait la maison du 911, rue Bernier, avait été déplacée pour rejoindre La petite colonie, aujourd’hui fermée. Néanmoins, la laiterie tiendrait debout uniquement grâce à des câbles de fer selon Jérémie Meunier, membre du comité sur les demandes de démolition. « Les informations reçues étaient qu’il n’était pas possible de la déménager, même pierre par pierre. C’est pour cela qu’on a décidé d’approuver la démolition », témoigne-t-il. 

La maison à laquelle la laiterie est rattachée présenterait une valeur patrimoniale moyenne, ce qui aurait facilité la décision du comité. Elle représente le bâtiment principal de l’immeuble visé par la demande. Jérémie Meunier se dit toutefois « attristé » de voir la laiterie disparaître et serait encore en faveur de son déplacement. Si celui-ci était possible, la Ville aurait même cédé un terrain pour l’accueillir.

Sous condition

Les coûts de rénovation et le programme de réutilisation du sol projeté manquaient à l’appel dans le dossier présenté le 8 mai, bien qu’ils soient réglementaires. « L’acceptation de la démolition a été faite, mais à la condition de voir le plan de réutilisation du sol. On se garde donc une certaine réserve », souligne Jérémie Meunier, qui rappelle que le secteur est zoné commercial.

Le coût des travaux à réaliser aurait été estimé supérieur à celui de la démolition, bien qu’aucun montant n’ait été présenté lors de la séance. L’absence de ce montant se justifierait par la difficulté à évaluer un coût ou par un état de délabrement tel que le coût ne serait pas pertinent. 

Opposition

Tout citoyen peut témoigner son opposition dans un délai de 30 jours, en interjetant appel de la décision au Conseil municipal. Pour ce faire, il est nécessaire d’écrire au service du Greffe par voie postale ou par voie électronique à greffe@sjsr.ca. 

Le ministère de la Culture reçoit également chaque dossier de demande de démolition visant un immeuble construit avant 1940, sur lequel il peut apposer sa désapprobation selon la valeur patrimoniale du lot, et ce, dans un délai de trois mois. 

Afin de contrer le phénomène de démolition, la MRC du Haut-Richelieu endossera bientôt ce rôle : un pouvoir de désaveu se mettra en effet en place à partir de 2026, une fois le répertoire patrimonial régional établi.

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