La tolérance envers les sans-abri a atteint ses limites

Photo de Valerie Legault
Par Valerie Legault
La tolérance envers les sans-abri a atteint ses limites
(Photo : Le Canada Français - Laurianne Gervais-Courchesne)

La cohabitation avec les itinérants cause de plus en plus de frictions au centre-ville. Depuis le 1er janvier, leur présence a déjà généré 400 appels aux forces de l’ordre. Il faudra apprendre à vivre avec les sans-abri, répond le Service de police de Saint-Jean-sur-Richelieu. Son état-major a entendu mardi soir le point de vue des commerçants du Vieux-Saint-Jean dans le cadre d’une assemblée.

Les gens d’affaires et les policiers se rencontrent une fois par année pour faire le point sur les enjeux qui les touchent. Ils ont repris cette habitude mardi soir, après deux ans de sursis causés par la pandémie.

Beaucoup de choses ont changé depuis leur dernière rencontre en 2019. Le phénomène de l’itinérance a monopolisé les deux heures de discussions dans une salle du poste de police. Tous les commerçants présents disent avoir été témoins d’actes répréhensibles, mais pas nécessairement criminels. La mendicité, les comportements agressifs et les attroupements leur causent un grand sentiment d’insécurité.

Le Service de police répertorie 30 itinérants dans le Vieux-Saint-Jean. Le Musée du Haut-Richelieu est identifié comme un point de rassemblement important. Certains sans-abri sont plus problématiques : cinq d’entre eux sont à l’origine de 50 % des interventions policières.

Centre de jour

Les commerçants critiquent l’emplacement du centre de jour sur la rue Champlain. La tolérance de ses voisins immédiats a atteint ses limites.

«Je vois beaucoup d’échange de drogue. Y a-t-il une solution pour les disperser ?», se demande Véronique Ménard, copropriétaire du Resto Belgo, à propos des sans-abri qui le fréquentent. Au Chop Shop, on déplore que des clientes viennent moins souvent à cause des attroupements sur le trottoir.

«Je suis dans le Vieux-Saint-Jean depuis 30 ans et je n’ai jamais vu autant de sans-abri ! Louer un local sur la Place du Marché, ce n’est pas super invitant. Si le centre de jour avait été une entreprise privée, la Ville n’aurait pas été aussi patiente. C’est un problème que vous avez amené dans le Vieux-Saint-Jean. Il vous manque des outils et ça tarde pour les avoir», accuse Jean-René Bertrand, de la boutique Rookery.

Contexte

Le directeur adjoint du Service de police, Julie-Maria Lang, a rappelé le contexte entourant la création du centre de jour. Souvenez-vous du début de la pandémie, dit-elle aux commerçants. «Il fallait trouver une place pour des gens qui n’avaient pas de place, souligne Mme Lang. C’était un geste bienveillant pour des humains totalement démunis.» Avons-nous pris le temps de réfléchir aux conséquences à long terme ? Peut-être pas autant qu’il aurait fallu. «Aujourd’hui, il faut en gérer les impacts», dit-elle.

Complexe

La police ne peut régler toute seule les problèmes reliés à l’itinérance, déclare le directeur du Service de police, Stéphane Bélanger. Il s’agit d’un phénomène complexe où se superposent les troubles de santé mentale et la toxicomanie, entre autres. Donner des constats d’infraction équivaut à un coup d’épée dans l’eau. «Par contre, nous n’avons aucune tolérance envers les infractions criminelles et les abris. J’ai vécu le campement Notre-Dame à Montréal et je n’en veux pas ici», dit le chef de police sur un ton catégorique.

Le Service de police est à la recherche de financement pour ajouter un intervenant social qui répondrait aux appels avec les patrouilleurs. La demande lui a été accordée, mais l’argent se fait attendre. La sensibilisation et la formation des policiers ainsi que la création d’un comité multisectoriel sont au nombre des autres actions envisagées.

Partager cet article
S'inscrire
Me notifier des
guest
0 Commentaires
Inline Feedbacks
Voir tous les commentaires