Au Gré des Champs délaisse l’étiquette biologique

Daniela Vargas Rojas

drojas@canadafrancais.com

Au Gré des Champs délaisse l’étiquette biologique
Marie-Pier Gosselin, copropriétaire de la fromagerie Au Gré des Champs avec l'une des vaches de son troupeau composé de suisses brunes.  (Photo : (Photo Le Canada Français- Jessyca Viens-Gaboriau))

Après plusieurs mois de réflexion, la fromagerie Au Gré des Champs a décidé de ne pas maintenir la certification biologique pour ses fromages. À cause de la hausse des taux d’intérêt provoquée par l’inflation, elle n’est plus en mesure d’assumer les coûts liés à la certification. Toutefois, dans la pratique rien ne change. L’entreprise, qui compte plus de deux décennies d’expérience, maintiendra son engagement en faveur d’une agriculture de proximité respectueuse de l’environnement et du bien-être animal.

« Ça fait un an que j’ai commencé à réfléchir à l’utilité d’une étiquette biologique dans la commercialisation de nos produits. Je trouve ça important de dire que je ne remets pas en question la place du biologique ni aucune des pratiques. Cela dit, il s’agissait d’une décision qui ne changeait en rien nos valeurs et nos pratiques durables qui restent les mêmes », affirme Marie-Pier Gosselin, copropriétaire de la fromagerie avec ses parents, Daniel Gosselin et Suzanne Dufresne.

Économie

La décision de ne plus payer la certification biologique est venue à la suite d’analyses sur les coûts liés à cette dernière. « À cause de l’inflation et la hausse des taux d’intérêt, comme entreprise, on se voyait obligé de couper quelque part pour pouvoir supporter ces frais additionnels. On avait investi en 2021 pour agrandir nos étables et rénover la fromagerie. Comme je ne voulais pas compromettre des projets environnementaux qui nous tiennent à cœur, on a décidé de ne plus investir sur l’étiquette de nos fromages », ajoute Mme Gosselin. 

Selon la copropriétaire, ce n’est pas le coût de la certification qui était dispendieux, car le prix demandé est déterminé selon le chiffre d’affaires de l’entreprise. Toutefois, l’étiquette biologique ne représentait pas une plus-value pour la fromagerie. 

« Comme producteur transformateur, mon fromage qui est sur la tablette à côté d’un autre fromage pas biologique n’est pas plus cher. Puis si l’on compare, on ne veut pas monter nos prix. Les gens achètent parce que c’est bon et local. On n’est pas capable d’aller chercher la plus-value. Également, avant de prendre cette décision, on a consulté une firme de communication qui a fait des sondages pour demander à nos clients leur opinion. Les résultats ont montré que, pour eux, le plus important est notre vision d’entreprise familiale et locale », raconte-t-elle.

Des pratiques éthiques

Afin de donner à leur troupeau un traitement éthique dans le respect de leur bien-être, la fromagerie Au Gré des Champs continuera à nourrir ses vaches avec 75% de foin ou d’herbe biologique. Les veaux élevés avec leur mère ou d’autres nourrices sont sevrés seulement à l’âge de 4 ou 5 mois. Également, ils n’utilisent pas d’hormone pour provoquer le cycle de reproduction des vaches ni d’antibiotiques de manière systématique. Leurs vaches pâturent en toute liberté du mois de mai à octobre. 

« On continuera à prendre soin de nos vaches de la même manière. On pratique un élevage en respect avec l’animal. Ça veut dire qu’on s’adapte aux cycles naturels de l’animal. On accompagne notre troupeau avec des traitements comme la phytothérapie. Par exemple, on utilise des huiles essentielles pour le contrôle des mouches. Aussi, la clé pour des vaches en santé, c’est la prévention. On leur offre un environnement calme et on les vaccine aussi contre les maladies. Une pratique permise par la certification biologique », assure cette amoureuse des animaux. 

La copropriétaire ajoute qu’un des avantages de ne plus avoir la certification est qu’elle ne sera pas obligée de jeter le lait des vaches pendant 30 jours. « Avec la certification, si les vaches prenaient des antibiotiques en cas de besoin, on était obligé d’attendre 30 jours avant de pouvoir utiliser le lait. Cela générait des pertes pour nous. Bien sûr, on va continuer à attendre quelques jours, mais pas un mois au complet », estime-t-elle.

Agriculture biologique

Les copropriétaires de la fromagerie Au Gré des Champs, Daniel Gosselin et Suzanne Dufresne font partie des pionniers en agriculture biologique dans la région. Ils ont certifié leurs terres pour la production biologique du foin et d’autres céréales telles que le soya en 1995. Encore aujourd’hui, ils comptent maintenir le même type de production dans leurs champs. En plus de pouvoir nourrir leurs vaches avec leurs propres herbes, ils sont capables également de vendre un pourcentage de leur production.

« Pour nos champs, il n’était pas question d’arrêter la certification biologique. On travaille dans le respect des pratiques et ça nous aide aussi économiquement parlant. On n’utilise pas de pesticides et on fait attention de ne pas semer les mêmes produits plusieurs fois dans le même terrain. On a des projets importants avec le MAPAQ [le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec] qui nous subventionne et nous accompagne pour l’application des techniques biologiques », explique Marie-Pier Gosselin.

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