Une première session complète pour tester la supermajorité caquiste

Patrice Bergeron, La Presse Canadienne
Une première session complète pour tester la supermajorité caquiste

QUÉBEC — Pour une première véritable session complète, le gouvernement caquiste pourra tester à loisir à compter de mardi les effets de sa supermajorité à l’Assemblée nationale sur la bonne marche des travaux parlementaires et les résultats qu’il a promis à la population.

Au cours de cette session qui s’ouvre donc mardi et qui se conclura le 9 juin, il sera beaucoup question de l’amélioration des réseaux de la santé et de l’éducation, de la pénurie de main-d’oeuvre et de l’inflation.

La domination écrasante de la CAQ devant des partis d’opposition divisés est un beau cadeau pour le premier ministre François Legault, qui célèbre cette année ses 25 ans de carrière politique.

Mais elle comporte aussi des écueils: outre l’usure du pouvoir qui guette toujours un gouvernement en deuxième mandat, il y a de moins en moins de prétextes à invoquer pour ne pas apporter des solutions tangibles dans le domaine de la santé et de l’éducation.

La Chambre a bien siégé l’automne dernier après la victoire écrasante de la Coalition avenir Québec (CAQ) le 3 octobre, mais les travaux n’ont duré que deux semaines.

François Legault a lancé récemment que cette courte session de l’automne dernier n’avait été qu’une «pratique» pour son équipe, afin de s’assurer que toutes les recrues se familiarisent avec le fonctionnement du parlement.

Car il y a beaucoup de nouveaux venus dans cette Législature.

Rappelons que la CAQ a remporté les élections générales du 3 octobre en raflant 90 sièges sur 125, soit bien plus que les 74 de sa victoire de 2018. Cela ne laisse donc que 35 sièges aux trois autres partis en Chambre: 21 au Parti libéral du Québec (PLQ), qui forme l’opposition officielle, 11 à Québec solidaire (QS) et trois au Parti québécois (PQ)

Le chef caquiste a déjà annoncé ses couleurs pour les prochains mois, voire les prochaines années. Il a donné de nombreux indices notamment lors de la réunion du caucus présessionnel des élus de la CAQ à Laval la semaine dernière.

Bien sûr, il y a la pénurie de main-d’oeuvre qui frappe partout au Québec et que le premier ministre veut résorber notamment avec une immigration à 100 % francophone – un défi, il l’admet lui-même.

M. Legault a déjà aussi télégraphié vendredi qu’il entend demander plus de flexibilité aux syndicats pour régler le manque de bras et de têtes dans les réseaux de la santé et de l’éducation.

Cette requête est exprimée en pleine négociation pour le renouvellement des conventions collectives du secteur public qui viennent à échéance à la fin de mars.

Le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, a déjà donné un avant-goût des scénarios envisagés.

Il propose d’ajouter un deuxième adulte en classe, une éducatrice en services de garde, afin de donner un coup de main aux enseignants débordés par les besoins particuliers de leurs élèves. Le ministre a dévoilé les sept priorités sur lesquelles il veut plancher, mais il aura à annoncer dans les prochains mois leurs modalités, leur mise en oeuvre et leurs coûts.

Par ailleurs, François Legault a lancé tout récemment une sérieuse mise en garde aux industries, après plusieurs signaux annonciateurs précédemment. Québec n’a plus l’intention d’accorder automatiquement le tarif privilégié L aux grands consommateurs d’électricité.

Le tarif pourrait maintenant être modulé en fonction des efforts de réduction de la consommation et de réduction des gaz à effet de serre (GES).

Le gouvernement empruntera cette voie parce qu’il doit réduire les émissions de GES conformément à ses obligations internationales, mais aussi parce que les surplus d’Hydro-Québec sont en train de fondre à vue d’oeil.

Un projet de loi devrait être déposé pour la révision des tarifs industriels l’automne prochain.

En attendant, dès mardi matin, une commission parlementaire reprend d’ailleurs l’étude d’un projet de loi controversé visant à plafonner l’augmentation du tarif d’électricité résidentiel en fonction de l’inflation.

Le gouvernement caquiste a également au fil des derniers mois exprimé d’autres intentions législatives claires.

Une réforme du réseau de la santé ainsi qu’un projet de loi sur la révision de l’aide médicale sont attendus.

Le ministre du Travail, Jean Boulet, a fait savoir qu’il allait déposer en février un texte législatif afin d’encadrer le travail des enfants. Plus précisément il pourrait établir à 14 ans l’âge général d’admission à l’emploi, à la recommandation d’un regroupement de syndicats et d’associations patronales.

Enfin, le ministre de l’Environnement, Benoit Charette, a laissé entendre qu’il allait déposer un projet de loi pour revoir à la hausse les redevances sur l’eau, qui sont ridiculement basses au Québec.

Le premier ministre François Legault a fait savoir la semaine dernière qu’il n’avait pas l’intention de souligner ses 25 ans de carrière politique cette année. Or avec un menu aussi chargé et des priorités aussi pressantes, un gouvernement court le risque de gâcher son année et les partis d’opposition pourraient… lui faire sa fête.

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