Une étude propose de réinventer le modèle de financement de la police au Québec

La Presse Canadienne
Une étude propose de réinventer le modèle de financement de la police au Québec

MONTRÉAL — Le budget des services de police au Québec a augmenté plus rapidement que les autres dépenses publiques, selon une étude publiée mardi par l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS) et l’Observatoire des inégalités raciales au Québec (OIRQ). 

Intitulée «Réinventer le financement de la police au Québec», l’étude s’est basée sur la recherche documentaire et les données statistiques pour analyser les tendances de la criminalité ainsi que celles du financement des services de police. 

À Montréal, la sécurité publique est le premier poste de dépense, sauf à partir de 2020 en raison de la pandémie, et 60 % sont alloués à la police. Le budget du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) est passé de 429 millions $ en 2002 à 724 millions $ en 2022, soit une augmentation de 169 %. 

À Québec, le budget destiné à la sécurité publique et à la police est proportionnellement moins élevé qu’à Montréal, «sans que cela compromette la sécurité des vies et des biens de la population», selon l’étude. Le montant alloué au Service de police de la Ville de Québec (SPVQ) était de 154,9 millions $ en 2020, contre 87,1 millions $ en 2002. Il s’agit d’une hausse de 178 %. Cependant, la part des dépenses de sécurité publique attribuée à la police a diminué. 

En constatant les mouvements sociaux qui entraînent une «crise de légitimité» de l’institution policière et dont une des revendications principales est son définancement, l’auteur de l’étude a proposé des principes pour guider une réforme. 

«Une partie de la population a perdu confiance dans les services policiers. Le cadre financier actuel est mésadapté aux nouveaux besoins de sécurité de la population, notamment ceux qui concernent les personnes en situation d’itinérance, les personnes toxicomanes ou aux prises avec des enjeux de santé mentale et les personnes racisées ou autochtones», a énuméré Roberson Edouard, chercheur associé à l’IRIS et co-auteur de l’étude.

Selon M. Edouard, il existe un consensus autour d’une refondation des services de police, notamment parce que «les policiers sont constamment aux prises avec des problèmes sociaux pour lesquels ils ne sont pas formés, ce qui mène parfois à des drames».

L’auteur, qui a travaillé avec les chercheurs Peterson Delva et Guillaume Hébert sur ce projet, a rappelé qu’il est impossible d’établir un lien causal entre le niveau de dépenses dans les services de police et la sécurité de la population.

«Il faut rediriger une partie des ressources de sécurité publique vers des programmes de services sociaux et communautaires tels que le logement social, l’éducation à la petite enfance et les services communautaires afin de prévenir la criminalité», a souligné M. Edouard. 

En s’appuyant sur une étude de la ville de Seattle parue l’an dernier, les chercheurs ont pu relever que la moitié des appels dirigés vers le service de police de la ville des États-Unis auraient reçu une réponse plus appropriée si elle avait été offerte par d’autres services publics ou communautaires. 

En plus de conclure son étude sur les pistes de réflexion sur de nouvelles approches en matière de sécurité publique, incluant le fait de miser sur la prévention, les auteurs ont souligné l’importance des enjeux écologiques. 

Ils ont notamment appelé à «affecter les ressources économisées à des dépenses vertes de prévention communautaire et promouvoir le développement durable en jumelant justice sociale et responsabilité climatique». Ils ont également prévenu que les crises liées aux changements climatiques risquent de «durcir le discours des mouvances hostiles à l’immigration et accroître les budgets de la sécurité publique». 

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