MONTRÉAL — Un homme qui a tué sa mère et une voisine à Vaudreuil-Dorion, en Montérégie, l’année dernière, a été déclaré non criminellement responsable, plus tôt cette semaine, des accusations de meurtre. La Couronne devrait demander une désignation de délinquant à risque élevé à son égard.
Un juge de la Cour supérieure du Québec a rendu sa décision lundi dans l’affaire Fabio Puglisi. L’homme de 45 ans a également grièvement blessé une troisième personne lors d’une agression au couteau survenue le 15 février 2024.
Puglisi avait été accusé de meurtre au deuxième degré pour les meurtres de sa mère, Elisabetta Puglisi-Caucci, 68 ans, et de Manon Blanchard, 53 ans, qui vivait dans la même tour à condos que la mère et le fils.
Il a également été accusé de tentative de meurtre pour une agression contre une femme de 70 ans qui a survécu.
Lors d’une audience tenue le 8 mai, la Couronne et la défense ont conjointement recommandé que Puglisi soit déclaré non criminellement responsable pour troubles mentaux. Le juge Alexandre Bien-Aimé Bastien a abondé dans ce sens dans une décision rendue à Salaberry-de-Valleyfield, également en Montérégie.
Le juge Alexandre Bien-Aimé Bastien a indiqué dans son jugement que Puglisi demandait à être déclaré non criminellement responsable «pour cause de troubles mentaux». Selon la loi, cela l’a «privé de la capacité de savoir que ces gestes étaient moralement mauvais au moment où il les a commis», a écrit le juge.
«Le tribunal ne peut faire autrement que conclure que M. Puglisi était, au moment des événements, privé de la capacité de décider rationnellement si l’acte d’attaquer les victimes était moralement mauvais et, par conséquent, de faire le choix rationnel d’agir de la sorte», a écrit le juge Bien-Aimé Bastien.
«M. Puglisi ne peut donc, dans ces circonstances, être tenu criminellement responsable des meurtres de Mmes Caucci et Blanchard, ou de l’attaque perpétrée à l’endroit de (la troisième victime), même si la preuve établit clairement qu’il en est l’auteur.»
Puglisi a poignardé sa mère 16 fois et sa voisine 12 fois. Mme Blanchard avait frappé à la porte du logement de la mère et du fils pour leur signaler que leur chien était en liberté dans le couloir, et a été tiré à l’intérieur par Fabio Puglisi.
Les rapports toxicologiques ont révélé que le sang de Puglisi ne contenait aucune trace détectable des médicaments qui lui avaient été prescrits pour stabiliser son comportement. La décision du juge précise que sa famille et son équipe de gestion de cas avaient indiqué que Puglisi n’avait pas pris ses médicaments pendant plusieurs semaines avant l’agression.
«Il n’est donc pas étonnant que son état mental se soit dégradé durant cette période et qu’il était aux prises avec de nombreux symptômes psychotiques le jour des événements», a écrit le juge.
Puglisi avait souffert d’épisodes psychiatriques s’étalant sur plus de dix ans. Sa famille a constaté que sa santé mentale a commencé à se détériorer vers 2010. En 2012, il a été évalué par des médecins après avoir agressé un inconnu et a été suivi par un hôpital de Pointe-Claire jusqu’en 2019. En juin 2020, il a été évalué de nouveau après avoir été accusé d’avoir tenté de vendre un faux tableau de Jean-Paul Riopelle et a été suivi par un hôpital jusqu’en 2022.
Sa santé mentale a recommencé à se détériorer depuis, plus particulièrement à la fin de 2023. Le 15 novembre 2023, sa mère a appelé la police parce que son fils tenait des propos incohérents sur Dieu. Mais il n’a pas été transporté à l’hôpital et, le lendemain, il a agressé une femme dans la rue et s’est présenté comme «Jésus».
On lui a diagnostiqué un trouble schizo-affectif et il a obtenu son congé de l’hôpital à la mi-décembre 2023. Peu de temps après, il a recommencé à manifester de l’instabilité et, le 1er février, sa mère a signalé qu’il n’était plus stable. Le juge a indiqué que la mère de Puglisi avait confié à une infirmière que son fils avait besoin d’un psychiatre.
«L’infirmière lui (a répondu) que l’équipe n’a pas le pouvoir de le traiter contre son gré dans les circonstances et lui (a intimé) de ne pas hésiter à appeler les services d’urgence si elle décèle des éléments de dangerosité pour elle, son fils ou autrui», peut-on lire dans le jugement.
Puglisi est détenu dans un hôpital psychiatrique de Montréal depuis son arrestation pour les agressions au couteau et reçoit des traitements antipsychotiques depuis plus d’un an, a déclaré le magistrat.
«Son état mental s’est amélioré à certains égards, mais demeure tout de même perturbé. En effet, même lors de l’audition, M. Puglisi a continué d’affirmer à tort qu’il n’avait pas eu le choix d’agir autrement que comme il l’a fait», a écrit le juge.
Le dossier de Fabio Puglisi reviendra devant le tribunal le 20 juin.
La Couronne a annoncé qu’elle chercherait à le faire déclarer délinquant à risque élevé, ce qui limiterait ses déplacements à l’hôpital psychiatrique.