Réforme des langues officielles: le Bloc s’en prend aux députés du «West Island»

Michel Saba, La Presse Canadienne
Réforme des langues officielles: le Bloc s’en prend aux députés du «West Island»

OTTAWA — Le Bloc québécois a lancé jeudi une attaque en règle lors de la période des questions contre les députés libéraux montréalais qui s’opposent au projet de loi C-13 qui modernise la Loi sur les langues officielles.

«Il y a les intérêts du Canada, il y a les intérêts du Québec et ça a l’air qu’il y a les intérêts du West Island. Et pour les acteurs du “West Island Story”, c’est juste ça qui compte. Ils sont prêts à sacrifier les minorités francophones et acadiennes du Canada. Ils refusent de protéger le français au Québec», a lancé Mario Beaulieu, le porte-parole bloquiste en matière de langues officielles.

La ministre responsable du dossier, Ginette Petitpas Taylor, lui a alors répondu qu’elle a pour «priorité» de protéger et promouvoir le français partout au pays, y compris au Québec. «Et aussi, on a notre responsabilité de protéger les communautés de langues officielles en situation minoritaire», a-t-elle ajouté en référence aux anglophones du Québec.

Ce quatrième de cinq échanges houleux aux Communes survient alors que la dissension au sein des rangs libéraux est plus vive que jamais. Dans les derniers jours, des députés de la région de Montréal, dont un ministre, ont menacé de voter contre le projet de loi déposé par leur propre parti.

Le Bloc québécois a ainsi entrepris jeudi de dresser un sommaire de ce que leur leader parlementaire, Alain Therrien, a qualifié de «répliques toutes aussi ridicules les unes que les autres» des députés qui prennent part à la «West Island Story», une étiquette que ses collègues et lui-même n’ont cessé de poser.

«“Le Canada est un pays anglophone”, dit le député de Westmount. “Il n’y a pas de déclin du français au Québec”, dit la députée de Saint-Laurent, entre deux voyages en Grèce. “Je ne peux pas appuyer le projet de loi C-13 parce qu’il contient certains amendements conservateurs et bloquistes”, rajoute le député de Mont-Royal», a énuméré M. Therrien.

Alors qu’il s’interrogeait une fois de plus à savoir si les libéraux imposeront la ligne de parti sur C-13 ou si ce sera un vote libre – ce que le whip en chef du gouvernement affirme ne pas avoir encore décidé -, le lieutenant libéral pour le Québec, Pablo Rodriguez, est allé au front.

«Je ne vois pas en quoi ça l’inquiète, a-t-il envoyé. Les bloquistes vont voter contre. Ils vont voter contre un projet de loi qui vient renforcer le français au Québec, renforcer le français à travers le Canada, qui va donner plus de pouvoir au commissaire aux langues officielles.»

Mercredi, le chef bloquiste Yves-François Blanchet a révélé qu’il «ne voit pas comment on pourrait voter contre» le projet de loi C-13 s’il assujettit les entreprises privées de compétence fédérale au Québec à la Charte de la langue française, ce qui n’est pas encore acquis, mais que les oppositions – qui forment une majorité – ont indiqué qu’elles appuieraient.

Le porte-parole du Bloc en matière de langue française, Denis Trudel, s’est plus tard jeté dans la mêlée. Il a réclamé que la ministre exige des excuses de la députée Emmanuella Lambropoulos pour les «faussetés» qu’elle a répandues, en évoquant que la loi 96 empêche de recevoir des soins en anglais au Québec, ce qui a forcé le CIUSSS de l’Ouest-de-l’Île-de-Montréal à entreprendre une tournée médiatique pour «remettre les pendules à l’heure».

«Au Québec, un francophone peut recevoir des soins en français et un anglophone peut recevoir des soins en anglais et même un patient allophone va avoir des services dans sa langue quitte à faire appel à des interprètes parce qu’on a du cœur», a crié M. Trudel.

Levant le ton d’un cran supérieur, Pablo Rodriguez lui a gueulé que les députés bloquistes «ont du cœur, pour ce qui est du jugement, moins certain». Il s’est ensuite moqué du choix du Bloc d’avoir choisi de traiter de la disposition de dérogation la semaine dernière lors de sa journée de l’opposition.

Les députés doivent reprendre vendredi matin l’étude du projet de loi. C-13 consacre un nouveau droit de travailler et d’être servi en français au Québec et dans les «régions à forte présence francophone» des autres provinces dans les entreprises privées de compétence fédérale, comme les banques, les compagnies aériennes ou ferroviaires. Or, la Charte de la langue française du Québec ne donne pas le choix de la langue. C’est le français, point.

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