OTTAWA — Le syndicat représentant environ 55 000 employés de Postes Canada demande à ses membres de ne pas faire d’heures supplémentaires, affirmant que ses négociateurs continueront d’examiner les dernières offres de l’employeur.
Le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes (STTP) a précisé jeudi soir qu’il demande à ses membres de «refuser de travailler plus de huit heures par jour et plus de quarante heures par semaine».
En réponse à cette annonce, Postes Canada a indiqué que ses opérations se poursuivent, mais a prévenu qu’il faut «s’attendre à des retards». La société d’État a noté que, pour le moment, il n’y a ni grève tournante ni arrêt de travail à l’échelle nationale.
Depuis minuit vendredi, le STTP est en position légale de débrayer. Le syndicat avait transmis son préavis de grève de 72 heures à Postes Canada plus tôt cette semaine.
Jeudi soir, une rencontre entre les deux parties a eu lieu, mais elle n’a pas permis d’en arriver à une entente.
«La réunion a duré moins d’une demi-heure, le STTP n’ayant soulevé que quelques-unes des nombreuses questions en suspens de manière informelle», a fait savoir la porte-parole de Postes Canada, Lisa Liu, dans une déclaration écrite.
«Malheureusement, cela n’a pas suffi à démontrer des progrès significatifs», a-t-elle ajouté.
Mme Liu a mentionné que Postes Canada avait demandé au syndicat de revenir à la table «de toute urgence» avec une réponse aux offres présentées par l’entreprise plus tôt cette semaine.
Le syndicat avait jugé que les offres étaient insuffisantes, soulignant que les travailleurs réclamaient une augmentation salariale de 19 % après des années d’inflation galopante.
Les enjeux
Le travail à temps partiel la fin de semaine s’avère l’un des principaux points de friction des négociations.
En vertu des récentes conventions collectives, les facteurs doivent être rémunérés davantage pour les quarts de travail du samedi et du dimanche, qui sont relativement rares.
Postes Canada insiste pour qu’un groupe de travailleurs à temps partiel soit déployé au besoin la fin de semaine et pendant les périodes de pointe, afin de répondre à la demande croissante de colis, plutôt que de payer les employés à temps plein au taux des heures supplémentaires.
Le syndicat a soutenu mercredi que la direction souhaitait augmenter de 20 % le nombre de postes à temps partiel dans les zones urbaines, affirmant que certains employés «seraient contraints de travailler jusqu’à 30 heures par semaine».
La semaine dernière, la commission d’enquête sur les relations de travail chez Postes Canada a proposé le recours au temps partiel, parmi une série de réformes drastiques.
Dans son rapport, elle a suggéré de réorienter Postes Canada vers la livraison de colis, de fermer certains bureaux de poste ruraux et d’augmenter le nombre de boîtes postales communautaires.
Ces réformes annuleraient un moratoire de longue date sur ces deux aspects et outrepasseraient le cadre de la négociation collective.
Le document de 162 pages du commissaire William Kaplan s’est concentré sur le modèle d’affaires défaillant de Postes Canada.
Affirmant que l’entreprise fait face à une «crise existentielle», il a recommandé de mettre fin à la livraison quotidienne du courrier à domicile pour les particuliers, tout en la maintenant pour les entreprises.
M. Kaplan a également proposé un acheminement dynamique et des emplois à temps partiel avec une rémunération comparable à celle des postes à temps plein.
Il s’est opposé à la perspective du travail à la pige avec des taux de rémunération souvent fluctuants et sans avantages sociaux.
Reprise du conflit
Mercredi, Postes Canada a rejeté la demande du syndicat d’une «trêve» de deux semaines qui aurait donné aux travailleurs le temps d’examiner en détail les dernières offres.
Dans son communiqué, le STTP a fait valoir qu’il a choisi de demander à ses membres de refuser de travailler des heures supplémentaires afin de «minimiser les perturbations pour la population et les pertes de salaire pour (ses) membres».
Le syndicat «pourrait décider de prendre d’autres mesures» à l’avenir, a-t-il averti.
Si les travailleurs des postes devaient se rendre aux piquets de grève, la livraison de près de 8,5 millions de lettres et de 1,1 million de colis par jour de semaine serait interrompue, selon les chiffres de 2023.
Cette perturbation creuserait le déficit financier croissant de l’entreprise. Elle a enregistré une perte d’exploitation de 803 millions $ au cours des neuf premiers mois de 2024, qui s’inscrit dans les 3,8 milliards $ de pertes enregistrées depuis 2018.
L’organisation a obtenu un prêt fédéral de 1,03 milliard $ en janvier.
L’automne dernier, les travailleurs des postes ont débrayé pendant plusieurs semaines. La grève a touché des millions de résidents, d’expéditeurs et de détaillants en ligne.
Au total, elle a entraîné des pertes estimées à 1,6 milliard $ pour les petites entreprises, selon la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante.