Le Canada offre une «énorme récompense» au Hamas, selon Nétanyahou

David Baxter, La Presse Canadienne
Le Canada offre une «énorme récompense» au Hamas, selon Nétanyahou

OTTAWA — Le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou a accusé le Canada, le Royaume-Uni et la France d’avoir fait miroiter au Hamas une «énorme récompense» en menaçant de prendre des mesures contre Israël concernant la crise humanitaire dans la bande de Gaza.

Il réagissait à une déclaration commune publiée lundi par le premier ministre du Canada, Mark Carney, son homologue britannique, Keir Starmer, et le président français, Emmanuel Macron, ont publié lundi une déclaration commune menaçant Israël de «sanctions ciblées» en réponse à sa nouvelle offensive militaire à Gaza et à la quantité «nettement insuffisante» d’aide alimentaire autorisée dans l’enclave.

Le Hamas a salué la lettre dans une déclaration en ligne mardi, la qualifiant de «pas important dans la bonne direction».

Le Hamas, désigné comme une entité terroriste au Canada, a exhorté le reste de la communauté internationale à prendre des mesures concrètes pour mettre fin à «l’agression sioniste sauvage» et demander des comptes à Israël, qu’il qualifie d’«État voyou».

Le chef conservateur, Pierre Poilievre, a critiqué la position du gouvernement canadien, affirmant dans une publication sur les réseaux sociaux qu’il est «inacceptable de menacer Israël avec des sanctions et de « nouvelles actions concrètes » alors qu’un groupe terroriste situé à ses frontières retient ses citoyens en otage».

«Lorsque des groupes terroristes comme le Hamas affirment que vos actions constituent un ‘pas important dans la bonne direction’, cela signifie que vous faites fausse route», a écrit M. Poilievre. «Cette guerre peut se terminer demain si le Hamas remet les derniers otages, dépose ses armes et se rend. Les conservateurs défendront toujours le droit d’Israël à exister et à se défendre.»

Le Royaume-Uni a été le premier à mettre en œuvre les menaces de la déclaration commune. Le ministre britannique des Affaires étrangères, David Lammy, a annoncé mardi que son gouvernement suspendait les négociations de libre-échange avec Israël et avait décrété de nouvelles sanctions visant les colonies de Cisjordanie.

«L’histoire les jugera, a affirmé le ministre britannique des Affaires étrangères, David Lammy. Bloquer l’aide. Étendre la guerre. Ignorer les préoccupations de ses amis et partenaires. C’est indéfendable. Et cela doit cesser.»

Le Canada et la France n’ont pas pris de mesures similaires à ce stade.

Un minimum de vivres autorisés à entrer

Israël poursuit sa nouvelle offensive militaire dans la bande de Gaza malgré les critiques internationales croissantes.

L’armée israélienne a lancé mardi des frappes aériennes qui, selon les autorités sanitaires, ont tué au moins 85 Palestiniens.

Les responsables israéliens ont également déclaré avoir autorisé l’entrée de dizaines de camions supplémentaires transportant de l’aide humanitaire dans l’enclave palestinienne.

Plus de deux millions de personnes vivent sur le territoire gazaoui, sous blocus israélien depuis près de trois mois. Les experts ont mis en garde contre le risque élevé de famine.

Sous pression, Israël a accepté cette semaine d’autoriser l’entrée d’une aide minimale sur le territoire.

L’ONU a déclaré mardi qu’aucune aide n’était parvenue aux Palestiniens, deux jours après le début de l’arrivée de nouvelles fournitures dans la bande de Gaza.

La déclaration commune de MM. Carney, Macron et Starmer fait suite aux déclarations de Benyamin Nétanyahou lundi, selon lesquelles Israël envisageait de «prendre le contrôle de tout Gaza» et encouragerait ce qu’il a qualifié d’émigration volontaire vers d’autres pays – une proposition rejetée par les Palestiniens.

Dans une publication sur les réseaux sociaux, le premier ministre israélien a accusé les dirigeants du Canada, de la France et du Royaume-Uni d’«offrir une énorme récompense pour l’attaque génocidaire contre Israël du 7 octobre, tout en incitant à de nouvelles atrocités de ce type».

«Il s’agit d’une guerre de civilisation contre la barbarie. Israël continuera de se défendre par des moyens justes jusqu’à la victoire totale», a martelé M. Nétanyahou dans son communiqué sur les réseaux sociaux.

La déclaration commune indique que les trois pays soutiennent le droit d’Israël à se défendre, mais qualifient son escalade militaire de «tout à fait disproportionnée».

Le Canada, le Royaume-Uni et la France ont également dit s’opposer à «toute tentative d’expansion des colonies en Cisjordanie» et ont menacé Israël de sanctions si le gouvernement ne met pas fin à leur expansion.

Mardi, le ministre Lammy a rappelé dans un communiqué que le gouvernement israélien avait la responsabilité d’intervenir et de mettre un terme aux «actes agressifs» des colons israéliens extrémistes.

«J’ai constaté par moi-même les conséquences de la violence des colons. La peur de leurs victimes. L’impunité de leurs auteurs», a fait valoir le ministre britannique des Affaires étrangères.

«Le gouvernement israélien a la responsabilité d’intervenir et de mettre un terme à ces actes agressifs. Son inaction persistante met en péril les communautés palestiniennes et la solution à deux États», a-t-il ajouté.

Le Royaume-Uni a imposé des sanctions contre deux «avant-postes de colons illégaux» et deux organisations «soutenant la violence contre les communautés palestiniennes» en Cisjordanie.

Une déclaration sans grandes conséquences

Thomas Juneau, professeur d’affaires internationales à l’Université d’Ottawa, a qualifié cette lettre de déclaration «relativement significative» de la part des trois nations.

«Cela témoigne de l’impatience croissante de nombreux membres de la communauté internationale face à la décision d’Israël de prolonger ses opérations militaires à Gaza», a analysé M. Juneau.

«Ce n’est pas si important, car le contenu de la déclaration commune de lundi ne diffère guère de la position traditionnelle du Canada, de la France et du Royaume-Uni à l’égard du conflit israélo-palestinien. Le fond n’est donc pas nouveau.»

Le professeur a ajouté que la pause du Royaume-Uni dans les négociations commerciales avec Israël est davantage un geste symbolique, car les marchandises continuent d’être expédiées entre les deux pays.

En fin de compte, l’expert en affaires internationales a estimé que toute action prise par l’un de ces trois pays, ou par les trois, n’aurait pas beaucoup d’impact sur Israël.

«Il ne faut pas se faire d’illusions: quelles que soient les mesures ou les déclarations fermes adoptées par le Canada, elles n’auront aucun impact sur Israël, a expliqué M. Juneau. Le seul acteur international qui peut avoir un impact sur Israël, ce sont les États-Unis. Tout le reste, au-delà des États-Unis, est secondaire.»

Le directeur général du ministère israélien des Affaires étrangères, Eden Bar Tal, a déclaré que son pays avait accepté la proposition de cessez-le-feu et de libération des otages de l’envoyé spécial des États-Unis au Moyen-Orient, Steve Witkoff, cette fin de semaine, mais a affirmé que le Hamas l’avait rejetée.

– Avec les informations de l’Associated Press

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