Le Canada est un refuge pour des dirigeants de l’Iran selon des proches des victimes

Dylan Robertson, La Presse Canadienne
Le Canada est un refuge pour des dirigeants de l’Iran selon des proches des victimes

OTTAWA — Des proches des personnes tuées lorsque l’armée iranienne a abattu le vol PS752 en janvier 2020 affirment que le Canada est devenu un refuge sûr pour les responsables du régime.

«Le Canada est devenu un refuge pour les criminels de la République islamique d’Iran», a déclaré Hamed Esmaeilion, jeudi après-midi, devant le comité de la justice de la Chambre.

M. Esmaeilion dirige un groupe représentant des familles en deuil, dont beaucoup connaissent de nombreuses personnes qui ont travaillé pour le régime ou sont liées à de hauts fonctionnaires se déplaçant librement au Canada.

«C’est une grande préoccupation pour le peuple iranien», a-t-il indiqué. 

À un moment de répression brutale contre les femmes et les manifestants des droits de l’homme à travers l’Iran, les libéraux fédéraux font face à une pression croissante pour considérer une section de l’armée iranienne comme un groupe terroriste.

La destruction du vol PS752 près de Téhéran a tué 176 personnes, dont la plupart se dirigeaient vers le Canada, en passant par l’Ukraine. Personne n’a été tenu pour responsable pour le drame.

M. Esmaeilion a attribué cela à une bureaucratie naïve qui considère l’Iran comme un pays normal.

«Ce sont principalement les équipes juridiques ou les conseillers; ils croient toujours en la négociation avec l’Iran parce qu’ils ne voient pas l’Iran, ou le régime iranien, comme un groupe mafieux», a-t-il soutenu. 

«Si vous changez votre mentalité [en prenant en compte] que vous ne négociez pas avec la Suisse ou un pays démocratique, alors cela résoudrait le problème.»

Il a mentionné à des responsables que les Canadiens ne joueraient jamais un match de hockey avec la Corée du Nord. Pourtant, l’équipe nationale masculine de soccer du Canada devait jouer contre l’Iran en juin dernier, avant que Canada Soccer ne l’annule en raison de la pression politique.

M. Esmaeilion a déclaré qu’il était certain que des personnes affiliées à Téhéran étaient responsables d’avoir crevé ses pneus et d’avoir passé des appels téléphoniques qu’il jugeait menaçants.

La Gendarmerie royale du Canada (GRC) a précédemment déclaré qu’elle était «au courant de rapports relatifs aux victimes de menaces, de harcèlement et d’intimidation».

Une liste incomplète 

Et tandis que les libéraux ont déclaré avoir mis à jour leur liste de sanctions lundi en fonction du groupe de M. Esmaeilion, il a souligné que des proches avaient suggéré beaucoup plus de responsables il y a des mois.

«Je suis choqué de ne pas voir [le chef suprême] Ali Khamenei sur la liste», a-t-il dit, ajoutant que le président Ebrahim Raisi et l’ancien ministre des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif devraient aussi être inscrits.

Il a également interpellé le délégué de l’Iran auprès de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), établie à Montréal, en déclarant que Farhad Parvaresh devrait être expulsé du Canada.

Cette semaine, une foule d’Iraniens canadiens s’est rendue sur la colline du Parlement pour demander à Ottawa de considérer le Corps des gardiens de la révolution islamique (IRGC) comme un groupe terroriste.

Des experts ont fait valoir qu’un tel changement serait difficile à appliquer, étant donné que l’Iran a enrôlé des millions de personnes dans des rôles non combattants de la force. Une liste terroriste oblige Ottawa à geler les avoirs détenus à l’intérieur du Canada et à refuser l’entrée au pays.

Hamed Esmaeilion estime qu’il s’agit d’une préoccupation sérieuse et qu’il pourrait y avoir jusqu’à 15 000 personnes vivant déjà au Canada dans cette situation. Il a ajouté que leurs documents militaires indiquent clairement s’ils avaient un grade supérieur et s’ils ont rejoint l’IRGC par choix.

«Nous pouvons exempter ces personnes. Nous avons parlé à plusieurs avocats, et c’est une solution simple pour mettre le CGRI sur la liste.»

Il a également réitéré ses appels à tenir pour responsables les personnes impliquées dans l’écrasement du vol qui a tué sa femme et sa fille. Le groupe de M. Esmaeilion souhaite que le Canada soumette l’affaire à l’OACI et à la Cour pénale internationale.

«Jusqu’à présent, après 1000 jours, nous n’avons pas de feuille de route ; nous n’avons pas de calendrier», a-t-il dénoncé. 

Dans une entrevue mercredi, le ministre des Transports Omar Alghabra a déclaré que le Canada voulait que justice soit rendue aux victimes du vol PS752, mais qu’il devait explorer toutes les voies avec l’Iran avant qu’un tribunal international ne se saisisse de l’affaire.

«Le processus est douloureux, c’est long, c’est lourd, c’est compliqué, a-t-il reconnu. Ces organismes internationaux sont défectueux, ils sont imparfaits, mais ils sont notre meilleur moyen de tenir l’Iran responsable.»

Le ministre Alghabra a déclaré que le Canada avait aidé à mener des réformes visant à prévenir une autre catastrophe, comme l’initiative Safer Skies. L’idée est qu’un organisme mondial évalue à quel moment un conflit rend les vols civils dangereux et conseille aux entreprises et aux gouvernements de ne pas décoller.

Le vol abattu par l’Iran avait décollé quelques heures après le début d’une opération militaire en réponse à l’assassinat par les États-Unis du haut responsable militaire iranien Qasem Soleimani.

«Le PS752 n’aurait pas dû voler alors qu’il y avait un conflit à proximité», a déclaré M. Alghabra.

– En collaboration avec Caitlin Yardley. 

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