MONTEBELLO, Ont. — Le ministre fédéral de l’Environnement, Steven Guilbeault, soutient que le prix du carbone sur les combustibles, qui a un impact sur les consommateurs, «n’est pas la seule» mesure de lutte aux changements climatiques et, si elle passe à la trappe, «il faudra (la) remplacer par autre chose».
M. Guilbeault a fait ces commentaires lundi en marge d’une retraite du conseil des ministres qui se déroule à Montebello, en Outaouais, dans le contexte où les principaux aspirants chefs à la succession du premier ministre Justin Trudeau proposent de revoir la tarification fédérale du carbone.
«Je discute présentement avec les candidats et candidates pour savoir, »ok, mais si on n’a pas le volet de prix sur la pollution pour les consommateurs, avec quoi on le remplace pour continuer à lutter contre les changements climatiques? »», a-t-il dit aux journalistes en mêlée de presse.
La tarification du carbone est une politique phare du gouvernement de Justin Trudeau. Tant l’ex-ministre Chrystia Freeland que l’ex-gouverneur de banques centrales Mark Carney, ainsi que la leader parlementaire Karina Gould, entendent revisiter cette mesure pour tenter de se montrer au diapason de préoccupations exprimées dans la population sur le coût de la vie.
Tous trois aspirent à devenir le prochain chef libéral, alors que les conservateurs promettent, de longue date, de mettre la hache dans ce qu’ils appellent «la taxe carbone».
Questionné à savoir si, personnellement, il estime qu’un remplacement du prix sur la pollution pour les consommateurs est nécessaire, M. Guilbeault n’a pas répondu directement.
«Je constate que c’est devenu très impopulaire auprès de la population, essentiellement à cause des mensonges de Pierre Poilievre, a-t-il offert. Alors moi, ce que je veux, c’est que le Canada continue d’avancer dans la lutte aux changements climatiques.»
Les conservateurs ont riposté, au moyen d’une déclaration écrite de leur cheffe adjointe, Melissa Lantsman, laquelle soutient que «les libéraux tentent maintenant de faire croire aux Canadiens qu’ils agiront différemment, simplement pour sauver leur carrière politique».
Selon eux, il est clair que les libéraux, au pouvoir depuis 2015, ont «puni les Canadiens pendant des années en augmentant le coût de tous les produits, de l’essence à l’épicerie» et qu’ils n’ont pas l’intention de changer de trajectoire.
Le ministre de l’Environnement promet de tenter d’être réélu à la prochaine élection fédérale, peu importe quel sort sera réservé au prix sur les combustibles.
Il a néanmoins insisté sur les effets d’un tout autre volet de la politique, soit la «composante pour les industries».
«Le volet industriel nous donne trois fois plus de réduction d’émissions que le volet pour les consommateurs. Je ne vous dis pas que ce n’est pas une mesure importante, il faudra le remplacer par autre chose», a-t-il conclu.
Il n’a, en outre, pas caché ses craintes face à l’administration du président Donald Trump, assermenté lundi. Le jour même, la Maison-Blanche a annoncé que les États-Unis se retireront de l’Accord de Paris sur le climat.
«Le président américain, comme Pierre Poilievre d’ailleurs, ne croit même pas à la réalité des changements climatiques alors que la Californie passe à travers l’une des pires saisons des feux de forêt de son histoire», a dit celui qui était auparavant un militant écologiste notoire.
M. Guilbeault a toutefois nuancé qu’il reste à voir ce qu’il adviendra des investissements américains prévus en ce qui a trait à la loi sur la réduction de l’inflation, connue par son acronyme anglais IRA, qui prévoit d’imposantes sommes sur le plan de l’environnement.
«Il faut se rappeler que près des deux tiers des investissements qui sont faits à travers ce programme fédéral américain sont dans des États républicains, a-t-il affirmé. Ça crée beaucoup d’emplois, ça génère beaucoup d’investissements.»
M. Guilbeault, s’il pointe du doigt l’effet des déclarations de M. Poilievre pour expliquer la perception des Canadiens quant au prix sur la pollution, refuse de dire s’il considère que les propos du chef de l’opposition officielle influencent les débats internes au Parti libéral du Canada. Même son de cloche du côté de la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, qui s’en est tenue à mentionner qu’elle a «fait connaître» son «point de vue» sur la course au leadership, évoquant le fait qu’elle appuie la candidature de M. Carney.