Duclos veut sensibiliser les candidats à la direction du PLC aux enjeux québécois

Émilie Bergeron, La Presse Canadienne
Duclos veut sensibiliser les candidats à la direction du PLC aux enjeux québécois

OTTAWA — L’échéance pour le dépôt des candidatures dans la course à la succession du premier ministre sortant et chef libéral, Justin Trudeau, étant passée, il est maintenant confirmé qu’aucun ténor libéral issu du Québec ne sera dans la mêlée.

Le lieutenant politique du gouvernement pour la province, Jean-Yves Duclos, ne s’est pas encore prononcé en faveur d’un camp ou d’un autre, mais il agit en coulisses «pour s’assurer que les préoccupations et les contributions des Québécois au sein de la fédération canadienne soient bien entendues et bien représentées au sein des plateformes des différents candidats».

En se rendant, jeudi avant-midi, à une réunion de travail du caucus libéral du Québec, il a dit qu’il compte «tout faire» pour que les aspirants chefs soient conscients de certaines «sensibilités».

Il a mentionné, comme il l’avait fait précédemment, l’importance capitale, à ses yeux, que les candidats soient bilingues, ajoutant, cette fois, qu’il s’attend à ce que les potentiels successeurs de M. Trudeau soient au diapason des préoccupations québécoises en matière de «développement économique qui passe par la protection de l’environnement».

«(Je pense aussi aux) services de garde pour les enfants, (à) toute la sensibilité internationale dont, je pense, les Québécois sont capables, de mieux vivre parce qu’on est un peuple, une nation qui est davantage ouverte, que, je dirais, la plupart des autres communautés en Amérique du Nord, au contexte international, aux relations avec l’Europe, avec la France, avec la francophonie», a-t-il poursuivi en mêlée de presse.

Le seul candidat potentiel issu du Québec est l’ancien député montréalais Frank Baylis. L’homme d’affaires à la tête de l’entreprise Baylis Medical Technologies a reconnu en entrevue avec «Le Devoir» qu’il n’est pas vraiment connu des milieux politiques, bien qu’il estime pouvoir apporter des changements dans la façon dont fonctionne le Parlement, de la rigueur budgétaire, de même que de gagner rapidement le respect du président américain Donald Trump.

Dans un communiqué publié jeudi, son équipe souligne que M. Baylis est bilingue, en plus de signaler qu’il «a passé les deux dernières semaines à rencontrer des dirigeants communautaires et sympathisants de partout au pays, notamment au Québec».

Le ministre québécois François-Philippe Champagne, qui aurait pu être dans la course, a avoué jeudi avoir un «pincement au cœur» quant à la décision «difficile» qu’il a annoncée, la semaine dernière, de ne pas briguer la chefferie du PLC.

«Quand je suis revenu des États-Unis, je vous dirais que j’avais l’énergie pour reprendre, évidemment, la chefferie, mais la décision a été prise. Maintenant, toute l’énergie va être consacrée à défendre le Canada, défendre nos travailleurs», a-t-il mentionné en faisant allusion à son récent passage à Washington, dans le contexte de l’assermentation de M. Trump.

Celui qui est ministre de l’Innovation n’a pas voulu confirmer, en mêlée de presse, qu’il soutiendra Mark Carney, comme l’ont rapporté Radio-Canada et le «Globe and Mail». M. Champagne s’est contenté d’affirmer qu’il en aura davantage à dire dans les jours à venir et, à l’instar de M. Duclos, qu’il compte se faire entendre, comme Québécois, au cours de la course.

«Ça sera une voix forte parce que, moi, je veux défendre le Québec, défendre les intérêts du Québec, défendre le fait français dans cette course au leadership», a-t-il dit.

Chaque camp veut montrer son ouverture

Au cours d’un point de presse de sa campagne, l’aspirante cheffe ontarienne Karina Gould a dit avoir l’intention de «respecter les juridictions des provinces» lorsqu’elle a été questionnée sur les propositions spécifiques au Québec qu’elle entend faire.

«Je sais que je ne suis pas francophone, mais je parle le français, j’adore le français et je sais que c’est quelque chose qui est non négociable pour les Québécois et les francophones partout au pays», a-t-elle déclaré.

Mme Gould s’est engagée, si elle devient première ministre, à inclure dans l’éventuel discours du Trône du gouvernement un engagement à déposer de nouveau le projet de loi C-282 visant à exclure le système de gestion de l’offre de toute négociation commerciale internationale.

Des députés québécois qui appuient ouvertement M. Carney ont, de leur côté, fait valoir que la provenance d’un aspirant chef est loin d’indiquer que ce dernier ne serait pas conscient des spécificités du Québec.

«Ça ne m’inquiète pas du tout», a, entre autres, soutenu l’élu de Louis-Hébert, Joël Lightbound.

Il a affirmé que la prochaine personne aux commandes des troupes libérales pourra certainement démontrer de l’ouverture en étant à l’écoute, notamment «des ministres d’envergure au Québec». Il a mentionné, pour appuyer son point, les ministres des Affaires étrangères et de l’Environnement, Mélanie Joly et Steven Guilbeault, qui ont publiquement offert leur soutien à M. Carney, de même que M. Champagne, qui pourrait se ranger dans le même camp.

De façon plus large, si l’on tient compte de tous les élus qui siègent au conseil des ministres, l’ancien gouverneur de la Banque d’Angleterre recueille bien plus d’appuis que celle qui est vue par plusieurs comme sa principale rivale, l’ex-vice-première ministre Chrystia Freeland.

«Ce n’est pas une question d’être contre elle ou contre d’autres candidats. Je peux mettre l’emphase sur l’économie. Je peux mettre notre économie sur la bonne voie, et surtout avec mes collègues, construire et bâtir l’économie la plus forte du G7», a dit M. Carney en répondant à l’une des trois questions de journalistes auxquelles il a accepté de répondre, en se rendant à un événement tenu en privé par sa campagne. Il a prononcé un discours devant ses sympathisants dans une foire alimentaire du centre-ville d’Ottawa à la devanture entièrement vitrée, des citoyens s’arrêtant pour regarder la scène.

Le ministre de l’Emploi et député de Gatineau, Steven MacKinnon, qui appuie également cet aspirant chef, «pense que les Gatinois voient en Mark Carney quelqu’un qui offre une vision renouvelée pour le Canada, dont une vision pour la croissance économique». Il s’est, en outre, dit convaincu qu’il saura défendre les fonctionnaires fédéraux, rappelant que le chef conservateur Pierre Poilievre souhaite réduire la taille de l’État.

Un peu plus tôt, Mme Freeland a été défendue par la ministre québécoise Diane LeBouthillier (Pêches) au cours d’un échange avec des journalistes.

«Je peux vous dire qu'(elle) est quand même connue du Québec. C’était la vice-première ministre. Je peux vous dire que, moi, dans mon comté, en Gaspésie, les gens connaissent Mme Freeland», a-t-elle déclaré au sujet de l’ancienne ministre des Finances qui a claqué la porte du cabinet en décembre.

La principale intéressée et aspirante cheffe a souligné, dans une déclaration devant les journalistes qui faisaient le pied de grue, dans les couloirs de l’édifice du Parlement, qu’elle a reçu l’appui, entre autres, du président du caucus du Québec, Stéphane Lauzon. Son dossier de candidature est aussi endossé par l’ex-ministre et députée de l’Estrie Marie-Claude Bibeau.

Mme Freeland n’a, après son allocution devant les caméras, répondu qu’à une seule des questions qui lui étaient posées, soit l’une portant sur la marche arrière qu’elle entend faire, selon plusieurs médias, sur la hausse promise de l’impôt sur le gain en capital.

Mme Freeland, qui a défendu cette promesse libérale, a évoqué, en réponse à la question, la menace américaine d’imposer des tarifs douaniers de 25 % sur toute importation canadienne.

«On ne peut pas ignorer ce que fait le président Trump. (…) Pendant les négociations de l’Accord de libre-échange nord-américain, la première fois, ça m’a été dit clairement que nous voulons créer de l’incertitude, (…) nous voulons attirer tout l’argent du monde, incluant l’argent des Canadiens et Canadiennes, aux États-Unis», a-t-elle dit.

Elle a fait valoir que, «pour cette raison», Ottawa doit «changer (ses) politiques».

Mme Freeland, M Carney et Mme Gould sont vus par des observateurs de la politique et députés comme les principaux aspirants chefs de la course à la chefferie qui doit se conclure le 9 mars.

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