QUÉBEC — Le taux de décrochage est quatre fois plus élevé au «régulier» que dans les programmes particuliers, a révélé mercredi le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville.
Il était interrogé par le député Sol Zanetti, de Québec solidaire (QS), dans le cadre de l’étude annuelle des crédits budgétaires du ministère de l’Éducation.
M. Zanetti tenait à savoir si un élève dans un programme dit «régulier» était plus à risque de décrocher qu’un élève inscrit dans un projet pédagogique particulier (sports-études, arts-études, etc.).
Le ministre a d’abord indiqué que le taux de décrochage pour l’ensemble du réseau est de 16,9 %.
Il se situe à 6 % dans les programmes particuliers avec sélection, et à 7,8 % dans les programmes particuliers sans sélection.
Par contre, le taux de décrochage grimpe à 24 % dans le programme régulier, a révélé M. Drainville. Il a précisé que ces données étaient «préliminaires».
Elles amènent toutefois «à une réflexion», a réagi M. Zanetti, disant s’inquiéter des iniquités dans le réseau scolaire «à trois vitesses».
«La ségrégation scolaire amène de grosses différences dans les taux de décrochage aux différents niveaux», a soutenu l’élu solidaire.
Pour le ministre, ces données démontrent surtout la pertinence de créer davantage de projets particuliers dans les écoles. Il s’est félicité d’avoir financé l’élargissement de l’accès à ces programmes.
En 2024-2025, près de 51 % des élèves au secondaire étaient inscrits à un programme particulier, une augmentation que M. Drainville a dit trouver «très encourageante».
«On veut qu’un maximum d’élèves soient inscrits dans un programme particulier», a-t-il déclaré.
Compressions de 670 millions $, 99 projets mis sur pause
L’étude des crédits de mercredi a aussi porté sur les compressions dans le réseau, qui ne représentent que 1 % du budget de l’éducation, s’est défendu le ministre.
Selon la députée libérale Madwa-Nika Cadet, les compressions en éducation cette année totalisent 670 millions $. Elle a aussi dénoncé que 99 projets d’ajout d’espace eurent été mis sur pause.
L’été dernier, 400 millions $ ont été retranchés à l’entretien des actifs. Ce sont des sommes que les centres de services scolaires (CSS) prévoyaient dépenser; elles n’avaient donc pas encore été accordées, a expliqué M. Drainville.
Ensuite, en décembre, un effort additionnel de 200 millions $ a été demandé au réseau, puis 70 millions $ supplémentaires ont été repris dans le plan de rattrapage pour les élèves.
Ce chiffre de 70 millions $ n’est pas sorti d’un chapeau, a insisté le ministre. Il a soutenu que les CSS lui ont dit en septembre qu’ils comptaient dépenser seulement 150 millions $ des 220 millions $ qui étaient disponibles pour le rattrapage.
La «consolidation» cette année, «on pense que c’est raisonnable, que c’est de la bonne gestion, s’est défendu M. Drainville. Chacun doit faire son effort.»
Par ailleurs, il a reconnu que 99 projets d’ajout d’espace ont dû être mis sur pause, soulignant toutefois que l’ensemble des demandes pour des classes modulaires ont été acceptées.
Décisions prises par «caquisme», accuse QS
M. Zanetti a déclaré avoir beaucoup «d’empathie» pour le ministre et son équipe, qui doivent faire des «choix difficiles» alors que le déficit du Québec s’élèvera à près de 14 milliards $ en 2025-2026.
Mais il a du même souffle accusé le gouvernement Legault de faire preuve de «favoritisme» dans la priorisation des projets de construction ou d’agrandissement d’écoles.
Selon QS, le gouvernement aurait investi 4189 $ par enfant dans les circonscriptions caquistes, 2799 $ dans les circonscriptions libérales, 1889 $ dans les circonscriptions solidaires et seulement 1045 $ dans les comtés détenus par le Parti québécois.
«Je rejette fermement les allégations à l’effet que les projets d’infrastructures sont déterminés par des critères partisans», a martelé M. Drainville, qualifiant les allégations de M. Zanetti de «très graves».
Il a indiqué que les projets étaient jugés sur la base de cinq critères: le besoin d’espace, l’évolution de l’effectif, la proportion de la croissance, le développement immobilier et l’emplacement nécessaire pour la scolarisation des élèves.
Le ministre a exigé que M. Zanetti dévoile sa méthode de calcul, ce que ce dernier a accepté de faire, à condition que Bernard Drainville rende publique l’évaluation réalisée pour chaque projet, qu’il ait été rejeté ou accepté.
«On a d’autres choses à faire», a répliqué le ministre en rappelant que les CSS présentaient chaque année environ 300 demandes pour la construction de nouvelles infrastructures.