La Fédération de l’Union des producteurs agricoles (UPA) de la Montérégie demande à Québec de réviser le système de sa Bourse du carbone dans un contexte particulièrement difficile sur le plan économique, où la compétitivité des producteurs locaux est mise à rude épreuve.
Récemment, le gouvernement fédéral a mis fin à la taxe carbone qui avait été imposée à huit des dix provinces du pays sur les combustibles et sur la pollution dans le but de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES). À l’opposé, l’administration Legault a choisi de maintenir son Système de plafonnement et d’échange de droits d’émission (SPEDE) de GES.
La situation est largement dénoncée par le milieu agricole québécois qui estime que le SPEDE rate sa cible et nuit au secteur. Face aux concurrents des autres provinces (ou même des États-Unis) exemptés de cette taxe, les agriculteurs s’inquiètent de pouvoir rester compétitifs.
De nombreux producteurs de la Montérégie se sont donc rassemblés à Saint-Jean-sur-Richelieu le 1er mai dernier pour réclamer au gouvernement provincial une révision du système. « Pendant que certains grands pollueurs, souvent des industries lourdes ou de l’énergie, achètent et échangent des droits à polluer, nous, en tant que producteurs agricoles, on paie la facture ! » dénonce Jérémie Letellier, président régional de la Fédération de l’UPA de la Montérégie, évoquant une « injustice ».
Taxe carbone
Actuellement, les revenus de la Bourse carbone sont reversés au Fonds pour l’électrification et les changements climatiques du Québec qui est lui-même consacré à des programmes de réduction des GES.
Si la Bourse carbone est un marché volontaire, le SPEDE impose aux grands émetteurs de GES québécois de payer des droits d’émission afin de les encourager à réduire leur empreinte carbone. Ces droits d’émission sont ensuite transférés directement au consommateur au moment de la vente.
Le milieu agricole, très énergivore, est exclu du SPEDE, mais il y contribue indirectement, puisque les carburants fossiles tels que le diesel ou le gaz naturel lui servent au quotidien, notamment pour chauffer les bâtiments ou encore faire rouler la machinerie.
Ainsi, les producteurs agricoles ont contribué pour plus de 480 M$, par le système de la bourse du carbone, audit Fonds pour l’électrification.
Modernisation
David Phaneuf, producteur d’œufs, de grains et éleveur de volailles en Montérégie, estime ainsi payer quelque 25 000$ par année pour sa tarification carbone.
Les coûts, considérables pour des producteurs qui peinent à faire du profit dans le contexte actuel, s’ajoutent à la pression gouvernementale de trouver de nouvelles technologies plus respectueuses de l’environnement.
« Tout cet argent-là, c’est de l’argent que les producteurs ne peuvent pas investir dans leur entreprise pour améliorer la situation et leur empreinte carbone », dénonce M. Phaneuf.
En outre, le producteur rappelle que dans le domaine de la volaille et des œufs, le coût de production du Québec est basé sur celui de l’Ontario. Il souligne donc ici un « manque impossible à combler ».
106 M$ pour le secteur agricole
La demande de révision de ce système par le milieu agricole n’est pas nouvelle. Depuis l’an passé, les producteurs dénoncent l’iniquité du système et déplorent qu’aucun retour ne soit établi sur ces montants investis.
Pourtant, en juin 2024, Québec annonçait un investissement de 106 M$ sur une portée de cinq ans, issu du Fonds vert, afin de soutenir les agriculteurs dans la réduction de leur empreinte carbone.
Lors du rassemblement des producteurs de la Montérégie le 1er mai, Martin Caron, président de la Confédération de l’UPA du Québec, expliquait que les agriculteurs étaient encore « en attente » de ce financement.
