L’église Saint-Gérard-Majella ne sera pas démolie, a décidé à l’unanimité le comité de démolition de Saint-Jean-sur-Richelieu, lundi. Le comité refuse ainsi la requête du propriétaire de l’église, qui souhaitait ériger un bâtiment de 40 logements à sa place.
Réunis à l’hôtel de ville, le 16 juin à 17h, les conseillers municipaux Annie Surprenant, Patricia Poissant et Jérémie Meunier ont d’abord assisté à une présentation faite par le Service de l’urbanisme sur l’état de l’église.
Près de 40 Johannais et Johannaises étaient aussi présents. Ils s’étaient déplacés pour assister à la prise de décision du comité et pour faire entendre leur point de vue lors d’une période de commentaires. Avant la séance du comité, cinq oppositions citoyennes avaient aussi été transmises au bureau du greffier.
La majorité des citoyens qui ont pris la parole s’opposaient à la démolition de l’église. Plusieurs ont mentionné tenir à l’aspect patrimonial du bâtiment ; d’autres ont remis en question les promesses faites par le propriétaire de créer un espace communautaire pour compenser la disparition du parc où se trouve désormais le Faubourg Majella.
Au terme d’échanges qui ont duré plus d’une heure, les trois conseillers ont voté en défaveur de la requête de démolition. Patricia Poissant, conseillère dans le district 6 (Notre-Dame-de-Lourdes / Saint-Gérard Ouest), a décidé d’appuyer les citoyens de son quartier.
Jérémie Meunier a rappelé que le promoteur s’était engagé à conserver le bâtiment principal de l’église dans le cadre du Projet particulier de construction, de modification ou d’occupation d’un immeuble (PPCMOI) adopté en 2019. « Je vois mal la Ville ne pas respecter les PPCMOI », a-t-il justifié dans sa prise de parole.
« De mon côté, je prends en considération la consultation publique de décembre dernier, où il y avait une faible majorité, mais une majorité quand même, de gens qui s’opposaient à la démolition », a pour sa part soutenu Annie Surprenant.
Un bijou en mauvais état
Construite entre 1961 et 1962, l’Église Saint-Gérard-Majella est classifiée comme un bâtiment avec une valeur patrimoniale « exceptionnelle » par la Ville. Elle ne respecte toutefois pas les critères pour être considérée comme patrimoniale au sens du ministère de la Culture du Québec, compte tenu de l’absence du mobilier original et de l’état de dégradation du bâtiment.
La firme Patriarche, mandatée par la Ville pour produire un rapport patrimonial, a retenu que la conception de l’église à la suite d’un concours d’architecture est une rareté au Québec. Le caractère innovant du bâtiment, par exemple l’utilisation de fibre de verre pour les vitraux et de béton précontraint pour les arches, contribue à sa valeur, tout comme la proche collaboration d’un artiste pour sa conception.
De son côté, les promoteurs et propriétaires de l’église, Construction Réjean Roy & fils, ont fourni un rapport d’état établi par la firme STA Architectes. Celle-ci observe que le bâtiment a été négligé depuis plusieurs années et présente des problématiques majeures dues à sa conception initiale. Les réparations sont évaluées à 5,1 M$. Un montant additionnel de 4 M$ pourrait être nécessaire pour un renforcement sismique, en fonction du projet choisi.
Le rapport d’état a conclu que la démolition est préférable, puisqu’aucun projet de conversion ne serait viable du côté économique.
Finalement, le comité consultatif d’urbanisme de la Ville de Saint-Jean-sur-Richelieu, lui, s’est exprimé en défaveur de la démolition de l’église.
Le chemin vers la démolition
En novembre dernier, Le Canada Français rapportait que la Ville de Saint-Jean-sur-Richelieu avait reçu une demande de démolition pour l’ancienne église Saint-Gérard-Majella. Une séance de consultation et de participation publiques s’est tenue en décembre 2024.
Le rapport de cette consultation, paru en avril, a révélé qu’une faible majorité des 150 personnes interrogées s’opposait à la démolition de l’église désacralisée en 2015.
Également en avril, le promoteur du terrain a déposé une nouvelle mouture du projet proposé comme motif de démolition, qui comprenait désormais 40 logements, dont 14 logements sociaux (contre 32 logements dans la version précédente) à la place de l’église actuelle.
Construction Réjean Roy & fils devra donc retourner à la table à dessin. Le PPCMOI adopté en 2019 devra être respecté : tout projet imaginé par le promoteur devra inclure l’église.
Si les membres du comité de démolition considèrent cette étape comme terminée, ils ne tournent pas complètement la page pour autant. « Tant qu’il n’y aura pas quelque chose qui a été fait avec l’église, le dossier ne sera jamais clos », a déclaré Jérémie Meunier.